Glas, une trop rapide montée en gamme


Hans Glas était un industriel allemand dynamique qui a développé son affaire à une allure record, à partir d’une microcar baptisée Goggomobil. Mais cette aventure qui s'est ensuite orientée vers le haut de gamme a été de courte durée. La firme Glas née en 1954 disparaissait dès 1969.


L'entreprise de fabrication de matériel agricole Glas est fondée en 1883 par Andréas Glas. Son fils, Hans (1890/1969), après un apprentissage dans l'entreprise familiale, complète sa formation dans le machinisme agricole chez Massey Haris en Allemagne, puis chez McCormick et Ford aux Etats- Unis. Après la période trouble de la Première Guerre mondiale, il rentre au pays en 1920, afin de reprendre en main l'affaire créée par son père. Il en devient le patron incontesté dès le début des années 30, en confirmant et renforçant la très bonne réputation de l'entreprise dans son domaine. La production de matériel agricole reprend en 1948. Dans le cadre de la reconstruction économique du pays, l'entreprise d'Hans Glas connaît un brillant développement. 

D'abord atelier de réparation de matériel agricole, Andréas Glas s'installe en 1905 en tant que fabricant de semoirs et autres matériels agricoles. Le succès lui permet d'ouvrir une nouvelle usine à Dingolfing.

Une première diversification est entreprise en 1951, avec la commercialisation d'un scooter baptisé Goggo Roller, renommé Glas Isaria à l'exportation. C'est une première réussite en dehors du domaine agricole, avec un engin plus confortable et au comportement routier plus sûr que le Vespa italien.

Le nom Goggomobil provient d’un scooter fabriqué à près de 50 000 exemplaires par la firme Glas entre 1951 et 1956. Ce scooter baptisé Goggo, inspiré des Vespa italiens, débute sa carrière avec un 125 cm3 rapidement remplacé par un 150 cm3 puis un 200 cm3.


1954 : Glas Goggomobil


La diversification se poursuit à partir de mars 1955 avec la production de la première automobile Glas, la Goggomobil T 250, une petite berline trois volumes de 2,90 mètres de long. Elle répond à une forte demande de la jeune clientèle qui a désormais les moyens, grâce à une élévation du niveau de vie, de s'offrir une petite voiture sur quatre roues.

Il s'agit d'une bicylindre à moteur arrière - comme c’est alors souvent le cas sur ce type de véhicule - de 245 cm3 à deux temps et refroidissement par air, d’une puissance de 13,5 ch. Ce modèle va devenir l’un des microcars les plus populaires en Allemagne entre 1955 et 1969. Avec un poids de 435 kg, la Goggomobil file allègrement jusqu'à 72 km/h. Son style amusant et sympathique inspire une certaine Fiat 500 lancée deux ans et demi plus tard. De nombreux autres industriels allemands tentent de se faire une place au soleil sur ce nouveau marché : BMW avec son Isetta, Zündapp, Lloyd, Heinkel et Messerschmitt notamment.

Au cours de sa carrière, le moteur de la Goggomobil évolue dans des versions T 300 (293 cm3, 15 ch, 85 km/h), T 400 (392 cm3, 20 ch, 95 km/h), se rapprochant ainsi de la puissance des premières Fiat 500 (21 ch) ou Autobianchi Bianchina (17,5 ch). La T est fut la première à s'incliner durant l'été 1965, avant la T 400 qui résiste jusqu'au printemps 1967. Sur les premières Goggomobil, les portes s'ouvrent dans le mauvais sens. Ce n'est qu'à partir de mars 1964 qu'elles s'ouvrent d'arrière en avant.

Le coach Glas Goggomobil met un terme à la carrière du scooter Goggo, mais son moteur est au début une simple extrapolation de celui qui était monté sur le deux roues. Son succès dans ses différentes motorisations dépasse les espérances du constructeur, puisque 214 313 exemplaires de la Goggomobil sont produits jusqu'en 1969. Le modèle illustré ici avec les portes qui s'ouvrent dans le " mauvais sens " est antérieur à mars 1964.

Une version coupé TS habillée d’une calandre en forme de cœur est lancée en 1957. Ce petit coupé de 3,04 mètres de long adopte le même système d’ouverture des portes que la berline sur laquelle il est basé, et donc change aussi ce système d’ouverture en 1964. Le coupé Goggomobil est doté d’une carrosserie différente de celle de la berline, avec des angles vifs et de petits ailerons à l’arrière, ainsi qu’une lunette panoramique. Ce coupé adopte au long de sa carrière les différents moteurs du coach sous les appellations TS 250, TS 300 et TS 400. Vendu 10 à 20 % plus cher, Il vise essentiellement une clientèle urbaine et féminine. La TS 300 disparait comme la T 300 durant l'été 1965, la TS 400 au printemps 1967, et la TS 250 en 1969. Un total de 66 511 exemplaires ont été produits.

Le coupé Goggomobil bénéficie d’un style plus recherché, avec des arêtes vives, de petits ailerons à l’arrière, une lunette panoramique et cette petite calandre en forme de cœur à laquelle on ne reste pas insensible. Celle-ci est bien sûr factice puisque le moteur est à l’arrière. On remarque les roues de très faible diamètre qui ont peut-être inspiré la Mini du groupe BMC lancée en 1959.

Les coachs et coupés Goggomobil connaissent un succès immédiat, avec 10 000 exemplaires produits en 1955, 33 000 en 1956, 43 000 en 1957, 42 000 en 1958. Un petit van à cabine avancée basé sur la Goggomobil est commercialisé à environ 2 000 exemplaires entre 1957 et 1965, principalement pour le service postal. Enfin, environ 1 500 exemplaires d’une version pick-up à cabine avancée sont diffusés à destination des artisans.

Le fourgon Goggomobil TL est disponible au catalogue de 1957 à 1965. Il n'a pas laissé une grande place dans la mémoire collective. Il est tentant de le rapprocher des plus exotiques kei cars japonaises.

A partir de 1957, les automobiles Glas sont importées en France par les établissements Jacques Poch. Mais les petites allemandes sont vendues dans l'hexagone à un tarif proche de celui des Citroën 2 CV ou Renault 4 CV, bien plus spacieuses. Cela en a limité la diffusion.


 1957 : Glas T 600 / T 700 Isar


Ambitieux, Hans Glas souhaite remplacer la " petite " Goggomobil par un modèle un peu plus volumineux et doté d’un moteur plus gros. Dévoilée en septembre 1957, au Salon de Francfort, mais fabriquée à partir d'août 1958, la Glas Goggomobil T 600 n'élimine pas finalement sa petite soeur. En effet, observant que les T 250/300/400 se vendent encore très bien, même après le lancement de la T 600, il n'est plus question de les abandonner.

La nouvelle venue est dotée d’un bicylindre de 584 cm3 développant 20 ch. Elle est vite secondée par la T 700 de 688 cm3 et 30 ch, capable pour la première fois pour une Glas de dépasser les 100 km/h. Hans Glas débaptise les T 600 / T 700 en novembre 1959, et les présente alors à son catalogue sous le nom d'Isar 600 et 700, en référence au nom d'une rivière située en Bavière et qui traverse Munich. Les Goggomobil et Isar vont donc cohabiter ...

Le badge permet d'identifier une automobile de la marque Glas. Sinon, avec son style qui semble emprunté aux productions américaines, on aurait pu croire qu'il s'agiit d'une Opel. Même le graphisme des publicités semble emprunté à la firme de Rüsselsheim.

Le style de la T 600 qui mesure 3,43 mètres de long s’inspire manifestement de l’Opel Rekord P1 lancée en 1957. Il reprend ainsi l’idée du pare-brise panoramique, de la calandre large et de la découpe des couleurs en deux tons.

La Glas Isar (Isard dans certains pays) aurait dû remplacer la Goggomobil, mais cela n'a pas été le cas. Elle rencontre divers problèmes techniques au début de sa carrière qui ont des effets néfastes sur sa réputation. C'est par exemple le pare-brise qui peut se décoller de son support à tout instant.

Au départ imaginée comme une traction avant, la Glas Isar est finalement lancée en mode propulsion, pour des raisons de coûts et de problèmes de mise au point. L’Isar a donc un moteur situé à l’avant, mais ce sont les roues arrière qui entraînent la voiture. Surnommée " la grande Goggomobil ", elle est déclinée en une version break deux portes.

Le break Isar adopte la dénomination commerciale " Kombi ". La production du coach démarre en août 1958, celle du Kombi à l'automne 1959.

Vite démodée avec son style très fifties, la production de l'Isard chute de 11 900 exemplaires en 1962 à 5 800 en 1963. Au final, les ventes de ce modèle ne dépassent pas les 87 585 exemplaires - dont 14 274 breaks - d'août 1958 à juillet 1965, soit beaucoup moins que ne l’espère son constructeur. Sur certains marchés, dont la France, la Glas Isar est vendue sous la marque Isard (avec un d). La voiture est même fabriquée en Argentine entre 1960 et 1965, où elle connaît un petit succès.


1961 : Glas 1004/1204/1304


La production de la firme Glas remonte à 47 000 unités en 1959, puis recule à 37 000 en 1960 et 35 000 en 1961. En perte de vitesse, Glas monte encore en gamme avec la série des 1004/1204/1304. Première de la bande, la 1004 est présentée en septembre 1961 au Salon de Francfort, et fabriquée à partir de mai 1962. Ses lignes sont signées Michelotti, styliste indépendant qui oeuvre à la même époque pour Triumph et DAF. Elles restent inchangées tout au long de la carrière de l'auto, malgré les évolutions des motorisations.

La première carrosserie disponible est un coupé. C'est aussi la première à disparaître fin 1965. Puis la " Limousine " fait son entrée en janvier 1963. Il s'agit d'un simple coach deux portes plus habitable extrapolé du coupé. Le cabriolet arrivé en avril 1963 est produit jusqu'en juillet 1967. Trois niveaux de motorisation 4 cylindres se succèdent : 1004, 1204 et 1304, qui ne sont pas toutes disponibles sur les différentes carrosseries. En voici un bref aperçu :

1004, mai 1962 : 992 cm3 et 42 ch, sur coach, coupé et cabriolet
1004 TS, novembre 1963 : 992 cm3 et 64 ch (2 carburateurs Solex), sur coupé et cabriolet
1204, janvier 1963, 1 189 cm3 et 53 ch, sur coach et coupé
1204 TS, 1964, 1 189 cm3 et 70 ch (2 carburateurs Solex), sur coach, coupé et cabriolet
1304, septembre 1965, 1 290 cm3 et 60 ch, en coach et cabriolet
1304 TS, mars 1965, 1 290 cm3 et 75 ch (85 à partir de 1966), sur coach uniquement

Pour 1966, l'offre est simplifiée, puisque ne subsistent que la 1004 en coach et cabriolet (puissance ramenée à 40 ch) et les différentes versions des 1304 / 1304 TS.

Le coupé S 1004 présente un aspect singulier en raison d'un empattement très court et de longs porte-à-faux. C'est le premier modèle de cette nouvelle gamme 1004 à être disponible. La mécanique est particulièrement sophistiquée, avec un moteur à arbre à cames en tête entraîné par courroie crantée.

Les observateurs sont sceptiques quant à l'appétit du constructeur bavarois. Ainsi, en raison de volumes modérés et d'une gamme devenue pléthorique, l'absence de rentabilité devient un problème chronique. Il s'agit toujours d'une entreprise familiale, dans laquelle les fonds nécessaires au développement de nouveaux modèles et à leur industrialisation ne sont pas inépuisables. Autre contrariété, l'absence de notoriété face à d'autres marques mieux installées est pénalisante.

La " limousine " 1004 est disponible à partir de janvier 1963. Quelle que soit la carrosserie, cette gamme est boudée par le public, et les ventes ne sont pas à la hauteur de celles des Goggomobil. Glas rate son entrée sur le marché des 6/7 CV.

La vaste gamme 1004 comprend aussi un cabriolet présenté en avril 1963. L'offre pléthorique confirme les ambitions du constructeur. Glas entend bien occuper la place laissée vacante après la disparition de Borgward en 1963, en devenant - pourquoi pas - l'équivalent germanique des Lancia ou Alfa Romeo italiens.

En 1962, Glas peut se réjouir de voir l’un de ses concurrents passer de vie à trépas, le groupe Borgward dont les Lloyd et Goliath pouvaient faire de l’ombre à ses voitures. Un autre concurrent, la firme bavaroise BMW, n’est alors pas non plus sortie d’affaire, après avoir frôlé la catastrophe en 1959 avec une chute de 40 % de sa production. Personne ne croit vraiment à sa survie. Pourtant, en 1968, c’est bien BMW qui rachète Glas. En effet, entre-temps, la firme bavaroise métamorphosée a lancé avec succès sa berline 1500 puis ses grandes soeurs 1800 et 2000.

Dans la famille 1004/1304, une ultime carrosserie dénommée " CL " est proposée en septembre 1966. Le coupé ayant disparu fin 1965, de nouveau, cette série compte quatre carrosseries : coach, berline, cabriolet et ce nouveau break " CL ", appelé par les Allemands " Kombilimousine ". Son esthétique est discutable, à mi-chemin entre le coupé et le break. Si un effort avait été fait pour le rendre plus élégant, il aurait pu se qualifier dans la catégorie huppée des breaks de chasse ...

Dès le début de l'année 1967, Glas passe sous la tutelle de BMW, et perd ainsi son indépendance. Le nouveau propriétaire laisse tout de même Glas présenter en septembre 1966 une version CL basée sur sa série 1004/1304. Le résultat, à mi-chemin entre le break et le coupé, n'est pas des plus heureux. BMW fait rapidement le ménage, et les ultimes 1004/1304 sont assemblées en décembre 1967.

Au total, cette série, toutes motorisations et toutes carrosseries confondues, n'a été produite qu'à 40 703 exemplaires sur le site de Dingolfing entre 1962 et 1968. Elle n'est effectivement pas parvenue à faire remonter Glas sur le devant de la scène. Les chiffres de production sont cruels pour le constructeur Glas tous modèles confondus : 32 000 voitures en 1962, 29 000 en 1963, 28 000 en 1964, 30 000 en 1965, 27 000 en 1966, 18 000 en 1967 et seulement 8 000 en 1968, dans une usine dès lors largement surdimensionnée. Il est désormais évident que Hans Glas a échoué dans sa tentative de créer une grande marque automobile


 1963 : Glas 1300 GT / 1700 GT


Alors que la situation financière de la firme Glas devient préoccupante suite à l’insuccès de ses modèles les plus récents, le constructeur de Dingolfing se lance vers ce qui ressemble à une fuite en avant, en présentant son coupé 1300 GT en septembre 1963 au Salon de Francfort. Sa fabrication débute en mars 1964. Cette fois, Hans Glas a mis les petits plats dans les grands, en s’adressant directement au styliste italien Pietro Frua, responsable notamment des plus récentes Maserati, pour créer ce petit coupé sportif de 4,05 mètres de long.

En France, les 1300 GT en manque de notoriété ne séduit que quelques amateurs éclairés. Pour le grand public, le nom de Glas ne signifie rien ! Son importateur, Jacques Poch, malgré son dynamisme, ne peut pas non plus compter sur la densité d'un vrai réseau de distribution.

La ligne élégante de la 1300 GT tranche radicalement avec les austères et banales carrosseries des Goggomobil, Isar et 1004/1204. Ce coupé reprend toute la base technique des Glas 1004/1204 ainsi que le moteur de la 1204 réalésé pour parvenir à 1 290 cm3. Il dispose de 75 ch à ses débuts, puis de 85 ch à partir de 1966.

Une nouvelle variante 1700 GT est introduite en mai 1965, équipée d'un 1 682 cm3 de 100 ch, moteur que l'on retrouve sur les berlines 1700. Visuellement, elle se distingue par sa prise d'air sur le capot. La production des 1300 GT et 1700 GT est arrêtée en septembre 1967, avec 5 378 exemplaires au compteur, dont environ 1/3 de 1300 GT et 2/3 de 1700 GT.

Immédiatement leur succède la BMW 1600 GT qui reprend la même carrosserie. Celle-ci est produite de septembre 1967 à août 1968 à 1 255 exemplaires, uniquement en coupé. Le célèbre double haricot sur la calandre permet clairement d'identifier la marque de la 1600 GT. Sous son capot, on retrouve un 4 cylindres de 1 573 cm3 et 105 ch d'origine BMW qui équipe aussi la 1600 Ti.

Dessiné avec talent par Pietro Frua, le coupé GT n’atteint même pas les 7 000 ventes - toutes versions confondues - au cours de sa courte carrière. Son constructeur peut alors s’interroger sur son avenir.

La 1300 GT peut atteindre 175 km/h, les 1600 GT et 1700 GT 185 km/h, soit le double d’une Goggomobil encore en production ces années-là. Glas et BMW confondus, ce sont 6 635 exemplaires qui sortent d’usine entre 1964 et 1968.

La prise d'air sur le capot moteur permet de distinguer une 1700 GT d'une 1300 GT. La version cabriolet produite à 363 exemplaires est disponible à partir de 1965.

Au bord du dépôt de bilan en 1965, Glas n'a pas d'autre recours que d'accepter les conditions des pouvoirs publics, et de céder ses actifs début 1967 à l'autre constructeur bavarois BMW. En reprenant Glas, BMW fait surtout l'acquisition d'une usine complète avec 4 000 salariés compétents. Une nouvelle et ultime série de 1 255 coupés 1600 GT est vendue avec un avant remanié pour recevoir la calandre au double haricot.


1963 : Glas 1500/1700


Parallèlement à la 1300 GT, Glas dévoile une nouvelle berline au Salon de Francfort 1963, la 1500, équipée d'un quatre cylindres de 1 489 cm3. Son style élégant, bien dans l'air du temps, est aussi dû au styliste italien Pietro Frua. On prétend que cette carrosserie de 4,41 mètres de long a été proposée à Carl Borgward pour remplacer son modèle Isabella fabriqué de 1954 à 1961. C’est possible, bien que Carl Borgward ait eu l’habitude de dessiner lui-même ses voitures, ou au moins d’y apporter sa touche finale. Selon d’autres sources, cette carrosserie aurait été proposée à Borgward pour une future Hansa 1300. Malheureusement, le naufrage du groupe Borgward fin 1961 a empêché la concrétisation de l’un ou l’autre des projets.

Pour le constructeur de Dingolfing, la Glas 1500 exprime manifestement une nouvelle montée en gamme. Glas est passé progressivement de la Goggomobil (250 cm3 à 400 cm3) à l’Isar (600 cm3 et 700 cm3), puis à la série 1004/1204/1304 (1000 cm3 à 1300 cm3). Cette progression est encore plus franche lors de la commercialisation effective en septembre 1964 de la 1700, puisque le constructeur opte finalement pour un 1 682 cm3 de 80 ch. Ce même moteur sera disponible quelques mois plus tard sur la 1700 GT, mais avec 100 ch.

La Glas 1700 est issue d’un dessin de Pietro Frua proposé à Borgward en 1961 pour remplacer l’Isabella ou l'Hansa. Le groupe Borgward ayant fait faillite, c’est Glas qui a récupéré cette carrosserie qui confirme une nouvelle montée en gamme du constructeur.

On prétend que cette augmentation de cylindrée a été décidée par Hans Glas pour empêcher une concurrence frontale avec la BMW 1500 lancée en 1961. Une variante 1700 TS à deux carburateurs de 100 ch (comme sur la 1700 GT) est disponible en juin 1965. Visuellement, elle est identique à la 1700 " de base ". Les berlines Glas 1700 et 1700 TS ne rencontrent aucun succès, puisque seulement 13 789 exemplaires sont produits durant leur courte carrière, entre septembre 1964 et septembre 1967.

La Glas 1700 connaît une seconde vie en Afrique du Sud où elle est assemblée entre 1968 et 1974, sous le nom de BMW 1800 et 2000. On distingue ici le logo de l'hélice au centre de la calandre. Ce modèle est situé en terme de dimensions entre une BMW 1600 Jubilé et une BMW 2000. L'arrivée de la BMW Série 5 mettra fin à sa carrière.


1965 : Glas 2800 V8 / 3000 V8


Le dernier modèle Glas produit à Dingolfing a la forme d'un magnifique chant du cygne. Il s'agit du luxueux coupé 2600 V8, long de 4,60 mètres, dessiné par Pietro Frua. Son moteur V8 de 2 580 cm3 et 140 ch (150 ch lors de sa commercialisation) est constitué par deux quatre cylindres accolés de Glas 1300 GT. Tant pis pour le manque de noblesse de la démarche. On voit ici les limites d'une telle étude, et le côté aléatoire de l'affaire, pour une automobile qui vise le marché des coupés BMW 2000 C ou Mercedes SE. Seul le constructeur à l'étoile propose encore ce type de mécanique 8 cylindres en Allemagne sur sa limousine 600. Cela donne une idée des ambitions de Glas.

La 2600 V8 est présentée en septembre 1965 au Salon de Francfort. Les premières carrosseries sont livrées en provenance d'Italie au début de l'été 1966, et la production démarre au rythme mesuré de deux voitures par jour en juillet. Le surnom de Glaserati est communément attribuée à cette voiture. La face avant évoque en effet la Maserati Quattroporte, tandis que la découpe du pavillon et le dessin de la poupe rappellent la Sebring.

Ultime montée en gamme et chant du cygne de Glas, le coupé V8 dont le moteur est la réunion de deux 4 cylindres de Glas 1300 GT est vendu à moins de 1 000 exemplaires. La carrosserie est signée Pietro Frua qui s’est inspiré de certaines de ses réalisations antérieures, d’où le surnom de " Glaserati " donné à la voiture.

La clientèle ne se presse pas dans les concessions pour acheter une 2600 V8, un modèle coûteux produit par un constructeur dont la notoriété est plus basée sur ses voitures économiques ou de gamme moyenne. Par ailleurs, le réseau a du mal à s'adapter à l'évolution rapide des modèles. On ne vend et on n'entretient pas un coupé 2600 V8 comme une voiturette Goggomobil. En 1966, et malgré un optimisme de façade, la production quotidienne de Glas n'excède que de peu la centaine d'automobiles, dont une cinquantaine de Goggomobil ... D'ailleurs, il s'agit du seul modèle avec lequel Glas gagne de l'argent.

En douze ans, la firme Glas est passée de la voiturette à moteur bicylindre à la voiture de grand tourisme à moteur V8 ! Peut-être un peu trop rapidement et sans véritable logique, car la clientèle visée était à chaque fois fort différente. L'acheteur d’une Glas V8 n’est certainement pas un ancien client de Goggomobil … Au bord du dépôt de bilan, Glas n'a pas d'autre recours que d'accepter les conditions des pouvoirs publics, et de céder ses actifs à l'autre constructeur bavarois BMW. Dès le début de l'année 1967, Glas passe sous sa tutelle, perdant ainsi son indépendance. La production de la 2600 V8 est interrompue de janvier à septembre 1967, avec 277 unités au compteur.

Après avoir pris la direction opérationnelle des opérations, les dirigeants de BMW décident malgré tout de poursuivre la commercialisation de ce gros coupé de luxe, en y apportant quelques modifications. La cylindrée est portée à 2 982 cm3 et la puissance à 160 ch. La 3000 V8, son nouveau nom, porte désormais le badge à l'hélice sur le capot moteur et au centre des enjoliveurs. Pour autant, une certaine ambiguïté subsiste, puisque la mention Glas n'est pas abandonnée sur la carrosserie. Il s'agit donc bien d'une Glas 3000 V8 et non d'une BMW.

BMW fait le choix en octobre 1968 de sacrifier la 3000 V8 au profit de son propre coupé 2800 CS à moteur six cylindres de 170 ch. Il n'est pas question d'entretenir une concurrence interne au sein de la gamme.

Cette poursuite de la commercialisation permet d'écouler le stock des carrosseries déjà produites, et objectivement la 3000 V8 fait peu d'ombre aux modèles BMW. Malgré sa nouvelle étiquette, ce coupé grand tourisme ne peut pas se défaire de son image de voiture de luxe au rabais. BMW ne s'embarrasse pas trop longtemps de ce modèle, et toute fabrication est définitivement arrêtée en mai 68. Les dernières 3000 V8 sont vendues à perte pour clore définitivement le dossier Glas. La production a été de 389 exemplaires sous l'écusson BMW.

De 1955 à 1969, la firme Glas a fabriqué environ 430 000 voitures, dont 280 739 Goggomobil. Il est curieux de constater que la première voiture produite par la firme Glas a aussi été la dernière à quitter les lignes d’assemblage du site de Dingolfing. C'est une Goggomobil 250 qui a eu cet honneur, un an après avoir laissé derrière elle tous les modèles apparus dans l'intervalle.

La firme Glas disparaît en 1969, deux ans après son rachat par BMW, tandis que l’usine de Dingolfing est agrandie pour devenir l’un des principaux sites de BMW, qui va y produire notamment ses hauts de gamme. Ces investissements permettent au constructeur bavarois de faire passer sa production quotidienne de 375 à 650 voitures. En 2008, le site de de Dingolfing employait près de 20 000 salariés, autant que le nombre d'habitants de cette bourgade, et produisait 270 000 voitures.

Hans Glas ne survit pas longtemps à la disparition de la marque automobile qu’il a fondée en 1954 (à l'image d'un André Citroën, d'un Carl Borgward ou d'un H.T. Pigozzi), puisqu’il décède le 13 décembre 1969 à l’âge de 79 ans.


Hans Glas, 1890/1969

Texte : Jean-Michel Prillieux
Reproduction interdite, merci.

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