Gérard Welter

Gérard Welter - France - 1942/2018


Parallèlement à sa carrière chez Peugeot, Gérard Welter a mené une seconde vie en dirigeant son écurie de courses automobile WM avec Michel Meunier de 1969 à 1989, puis en autonomie sous le nom de WR à partir de cette date. Mais ceci est une autre histoire, sur laquelle nous n'allons pas nous étendre.


Monsieur Welter père qui travaille dans l'administration de Saint-Gobain, possède une Peugeot 402. C'est d'ailleurs dans cette voiture que Gérard Welter va apprendre à conduire.

Formation au lycée technique et professionnel du Gué-à-Tresmes, près de Meaux. Cette école forme des staffeurs ornemanistes, dont la vocation est de réaliser des maquettes, en dehors des filières classiques du bâtiment et de l'architecture. Après le lycée, avec son CAP de staffeur en poche, Gérard Welter trouve des petits boulots où il réussit à mettre en application ce qui lui a été enseigné.

1960

Le directeur du lycée de Gué-à-Tresmes est informé que Peugeot recherche une personne correspondant au profil de Gérard Welter. Ce dernier rencontre Georges Boschetti, le patron du Centre des Etudes Peugeot de La Garennes Colombes. Lors de l'entretien, la conversation s'oriente vers le sujet des voitures compactes américaines. Il se trouve que par le plus grand des hasards, Gérard Welter vient de lire un article dans " Science et Vie " à ce sujet ! Un joli coup de chance.

Il rentre chez Peugeot où le style est encore piloté par Henri Thomas, qui est remplacé cette même année 1960 par Paul Bouvot. Gérard Welter a à peine dix-huit ans. Il est surpris par les méthodes de travail ancestrales en cours au sein du département style. Les maquettes sont encore réalisées en bois par des menuisiers. Ce sont cinq ou six personnes qui gèrent le style chez Peugeot. Paul Bouvot identifie très vite le talent de Gérard Welter. Les deux hommes sympathisent, et bien souvent leurs conversations vont bien au-delà du cadre strictement professionnel.

Gérard Welter

Paul Bouvot est séduit par la dextérité de Gérard Welter, mais aussi par son physique, sa carrure de sportif et ses mains de sculpteur. Sous l'impulsion de Gérard Welter, le travail du bois est progressivement remplacé par celui du plâtre pour composer les maquettes. Gérard Welter parvient à faire l'unanimité dans sa spécialité.

Ses premières réalisations portent sur les équipements de la 404, notamment les feux arrière. Chez Peugeot, on admire ceux de la DS logés en haut de la custode. On y réfléchit, mais les tentatives pour élaborer un nouveau dessin de feux pour la 404 sont vaines. Elle conservera ses feux " Pininfarina ". Pour son plaisir, Gérard Welter construit de ses mains sa première automobile dotée d'une carrosserie en polyester, avec des éléments mécaniques de Renault Dauphine.

Gérard Welter en chemise blanche, Paul Bouvot à sa droite, lors d'une rencontre avec des représentants de Pininfarina.

Comme Paul Bouvot, Gérard Welter doit composer avec l'omniprésence de l'incontournable carrossier italien Pininfarina. Les deux entreprises collaborent depuis 1951. Cela a commencé avec le développement de la 403, dont la présentation en première mondiale a été éclipsée par celle de la DS au Salon de Paris 1955. Les projets de Peugeot et de Pininfarina sont sans cesse mis en concurrence. Les stylistes français sont tiraillés entre l'agacement d'être en compétition avec les hommes de Pininfarina, et la fierté de se trouver challengé avec une maison aussi prestigieuse.

1965

La 204 marque pour la première fois depuis l'après-guerre la fin du modèle unique chez Peugeot, puisque la 404 est en production depuis 1960. L'étude a déjà commencé quand Gérard Welter a rejoint Peugeot. Comme c'est l'usage, le projet de Paul Bouvot a été mis en concurrence avec celui de Pininfarina. C'est le projet du carrossier qui va servir de base, mais l'idée des phares ovales émane de Paul Bouvot.

Peugeot 204 Coupé et Cabriolet

Gérard Welter travaille à sculpter l'arrière du coupé et du cabriolet 204 commercialisés en 1966. C'est sa première mission d'importance pour Peugeot.

1968

Avec la 504, Pininfarina gagne de nouveau face à l'équipe de styliste de Peugeot. Les Français tentent d'imposer les phares avant " à la Sophia Loren ", mais entre la maquette et une possible industrialisation, le pas à franchir est trop important. L'idée est plus sobrement adaptée chez Pininfarina. Si le projet auquel Gérard Welter a participé n'est pas retenu en l'état, il se souvient de la maquette initiale comme étant l'une des plus belles réalisations de sa carrière.

Maquette de Peugeot 504. L'idée des optiques comparées aux yeux de Sophia Loren sera adaptée par Pininfarina pour permettre son industrialisation.

Gérard Welter pense profondément que la capacité à concrétiser rapidement une idée, un concept, fait partie intégrante du processus de créativité. Quand on a envie de définir un nouveau projet, il faut le créer, le voir, le toucher immédiatement. Sans cette réactivité avec le volume, les idées s'évaporent. Cela, il l'a compris au cours de ses études, avec l'un de ses professeurs qui sculptait la terre.

1979

L'étude de la berline 505 est menée alors que Peugeot est au plus mal. Pour Gérard Welter, elle n'apporte rien par rapport à la 504 qu'elle remplace. Son style apparaît trop fragile, trop classique. En effet, elle ne peut pas à elle seule relancer Peugeot. Pourtant, Gérard Welter et ses collègues ont dû admettre leur impuissance face à la proposition de Pininfarina. Mais déjà un nouveau projet les anime, qui porte le code M24. Il va donner naissance à la Peugeot 205.

Gérard Welter est à l'origine de cette maquette pour la 505, aux faux airs de 305 (1977). Le style intérieur sera retenu, mais pas celui de l'extérieur.

1980

Gérard Welter est choisi par Paul Bouvot pour lui succéder à la tête du style extérieur de Peugeot. Le style intérieur est parallèlement piloté par Paul Bracq. La concurrence Peugeot / Pininfarina est plus que jamais d'actualité. Gérard Welter, comme Paul Bouvot avant lui, doit en permanence composer avec cet incontournable consultant. La mission de Gérard Welter est de présider à toutes les décisions du centre de style. Il oriente le travail de son équipe de façon à amener la direction à faire des choix. Sur tous les projets, la période de liberté et de rêve est courte. Il faut très vite revenir aux réalités liées aux coûts, aux chiffres, qui limitent forcément les ambitions.

En costume clair, Gérard Welter à Velizy, en présence d'un prototype devant aboutir à la Peugeot 205 (1979).

1983

Sur le projet M24, Gérard Welter hérite des techniciens une implantation de la roue de secours sous le capot moteur. Il doit se battre en interne pour que celle-ci soit placée ailleurs. Après de houleux débats, il obtient gain de cause. Cela lui permet d'abaisser le capot, d'adopter des glaces plus grandes, et d'obtenir des proportions plus agréables à l'oeil. Gérard Welter anime une équipe, il est donc parfois difficile d'identifier la réelle paternité d'un dessin, comme a pu le préciser Gérard Godfroy au sujet de la 205.

Jean Boillot, alors directeur commercial, confie à Gérard Welter qu'il pressent que si la 205 ne rencontre pas sa clientèle, l'avenir de Peugeot est réellement compromis. Par bonheur, le succès de la 205 élégamment habillée par l'équipe de Gérard Welter sauve Peugeot du marasme dans lequel le constructeur s'est enfoncé. Avec cette voiture, les stylistes parviennent à se libérer pleinement du carcan de Pininfarina. Après des années de frustration, mais aussi d'observation de leurs " amis " italiens, l'équipe de Gérard Welter a gagné en compétitivité et en force de proposition.

 Peugeot 205, 1983

Quand Jean Todt prend en charge la course automobile chez Peugeot, sous la direction de Jean Boillot, il demande à Gérard Welter, qu'il connaît de par ses participations aux 24 Heures du Mans, de lui dessiner une maquette pour une 205 sportive. Nous sommes à l'origine du projet 205 Turbo 16. Le résultat plaît à Jean Todt et à Jean Boillot. Une voiture de course doit toujours faire la promotion du modèle de base. Donc la ressemblance doit être la plus nette possible. Dans le cas présent, c'est une réussite.

 Peugeot 205 Turbo 16


1984 / 1988

L'équipe de Gérard Welter est durant ces années 80 à l'origine de plusieurs concept cars. Ceux présentés ici sont ceux qui ont le plus marqué les esprits. L'habitude de présenter des concept cars se développe à cette époque, et Peugeot n'est pas en reste avec la Quasar de 1984, la Proxima en 1986 ou l'Oxia en 1988. Ces voitures sont destinées à améliorer sa notoriété de la marque, et à rajeunir son image auprès du grand public.

La Quasar de 1984 est le premier concept car, d'une longue série, supervisé par Gérard Welter. Dans le cas présent, le styliste Eric Berthet est l'auteur de l'esquisse originale. La Quasar est conçue autour d'une mécanique de Peugeot 205 Turbo 16. Son 4 cylindres, bien visible, développe 600 ch avec deux turbos. La coupole vitrée renvoie à l'univers de la science-fiction. L'aménagement intérieur est signé Paul Bracq. Le mariage agressif des coloris intérieurs est représentatif de la décennie : moquette bleue, cuir rouge, affichage à cristaux liquides. A cette époque, Peugeot n'affiche encore aucune politique définie pour ce qui est de la création de ce genre de show cars. On ne le sait pas encore, mais la Quasar est à l'origine d'une longue série de prototypes, qui vont se renouveler à chaque Salon de Paris.

Peugeot Quasar, 1984

Présenté au Salon de Paris 1986, le concept car Proxima, qui tire son nom de l'étoile la plus proche du soleil, arrive alors même que Peugeot vient de remporter son deuxième titre de champion du monde des rallyes avec la 205 Turbo 16. Ce coupé de 4,42 mètres de long affiche une largeur de 2,06 mètres et une hauteur de 1,14 mètre. Il est animé par un V6 PRV de 2 849 cm3 et 680 ch. La Proxima matérialise, quand on leur laisse carte blanche, la vision du futur pour l'équipe des stylistes animée par Gérard Welter. La Proxima fait appel à la fibre de carbone, légère et solide à la fois. Le coffre accueille des cellules solaires alimentant le système de ventilation. Pour l'habitacle, c'est de nouveau Paul Bracq qui est à la manoeuvre.

Peugeot Proxima, 1986

C'est plus qu'une voiture de Salon, car la Peugeot Oxia dévoilée au Mondial de l'Automobile 1988 (nouvelle appellation du Salon de l'automobile) roule pour de bon, et plutôt bien. Elle est présentée en pleine euphorie des supercars, et aurait pu aspirer à être l'une d'entre elles, aux côtés des Bugatti EB 110, Porsche 959 ou Ferrari F40. Hélas, Peugeot ne franchira pas cette étape. Le V6 PRV de 2 800 cm3 fournit 680 ch. Le styliste Alain Pottier a extrapolé de l'allure générale de la 405 une supercar, qui n'a plus grand-chose à voir avec la berline. Les phares sont ceux de la 605, modèle qui ne sera commercialisé qu'en 1989. L'Oxia marque le début d'une nouvelle ère pour le bureau de style, car après elle, tous les prototypes seront roulants. Pour Gérard Welter, concevoir ce type d'automobile, c'est à la fois expérimenter de nouvelles techniques, démontrer son savoir-faire, et satisfaire le public qui attend lors de la visite d'un Salon sa part de rêve.

Peugeot Oxia, 1988


1994 à 2007

Murat Günak, qui vient de chez Mercedes, prend en 1994 les commandes du style. A ce moment-là, Gérard Welter s'interroge sur l'intérêt de conserver son poste chez Peugeot, son employeur depuis 34 ans. Il peut en effet considérer l'arrivée du Murat Günak comme étant une atteinte à sa légitimité. Il s'en ouvre à Jacques Calvet. Murat Günak sait séduire. Il parvient à convaincre ses interlocuteurs du bien-fondé des positions assurées par le bureau de style Peugeot. Il valorise le travail des équipes. Il agit plus en tant que manager que comme styliste. Son arrivée ne ravit pas Pininfarina qui peut légitimement percevoir sa présence comme une menace. Pendant ce temps-là, Gérard Welter poursuit son travail dans le bureau de style. Contre toute attente, les deux hommes s'entendent bien. A la surprise de la plupart des observateurs, ils font même la paire, chacun gérant ses affaires.

La Peugeot Asphalte de 1996 symbolise le plaisir automobile, à mi-chemin entre la Lotus Seven et la Morgan à trois roues. Au lieu du " toujours plus ", c'est la simplicité, le dépouillement, la légèreté et le plaisir de conduite qui l'emportent. Les deux roues arrière de l'Asphalte sont jumelées. C'est lors de sa sortie la voiture la plus performante du groupe PSA, avec son petit moteur de 90 ch pour 580 kg.

Peugeot Asphalte, 1996

Nicolas Brisonneau et Marie Bois sont les deux principaux acteurs de ce projet, baptisé Peugeot RC Pique et Carreau. Quand celui-ci est lancé, Renault a déjà abandonné la marque Alpine, puisque la dernière A610 est sortie d'usine en 1995. Secrètement, Gérard Welter se dit qu'il y a une place à prendre. Les deux RC présentées à Genève en mars 2002 lui permettent de rencontrer Jean Rédélé (1922/2007). L'une des deux voitures assemblées est dotée d'un moteur diesel, en position centrale arrière. Frédéric Saint-Geours, DG de Peugeot de 1998 à 2007, a lancé un défi à ses équipes : offrir des performances équivalentes en essence et en diesel. Le constructeur est sollicité par des clients potentiels qui aimeraient voir la RC en vente libre. Hélas, ce prototype est construit sur une plate-forme spécifique, et les moyens humains manquent à Peugeot pour le développer vers la série. La Peugeot 308 RCZ de 2009 aura plus de chance.

Peugeot RC, 2002

Le concept car Peugeot 407 Elixir est présenté au Salon de Francfort en septembre 2003. Son dessin est signé Sylvain Henry. Ce break d'aspect sportif préfigure les lignes de la 407, en particulier dans sa version cinq portes commercialisée à partir d'avril 2004. Ses lignes se caractérisent par un important porte-à-faux avant et un arrière très volumineux. Le pare-brise particulièrement incliné donne naissance à un pavillon de verre. A l'arrière, une lunette arrière ouvrante est implantée sur un volet de hayon relativement vertical. La 407 Elixir est prévue pour accueillir confortablement quatre personnes. Son six cylindres Diesel HDi de 2 700 cm3 développe plus de 200 ch. Ses dimensions : 4,73 mètres x 1,92 mètre x 1,40 mètre (hauteur).

Peugeot Elixir, 2003

Après la folie des supercars à la fin des années 80, les années 90 voient un retour vers plus de réalisme, les designers se concentrant sur des concepts préfigurant les voitures de série. Il faut attendre le Mondial 2004 pour que Peugeot renoue avec le thème des supercars. La Peugeot 907 évoque les belles années du grand tourisme avec son long capot avant, qui abrite un V12 de 6 litres et 500 ch. On n'a pas connu en France une telle mécanique depuis la naissance du V12 Matra en 1968. La Peugeot 907 est parfaitement fonctionnelle, et peut donc rouler sur route ouverte. Elle porte déjà en elle les gènes esthétiques de la face avant des 207 et 308. Sur ce projet, par le biais de Gérard Welter, les spécialistes de WR (Welter Racing) et de Peugeot ont uni leurs compétences.

Peugeot 907, 2004

L'idée d'une berline surpuissante germe dans l'esprit de Gérard Welter depuis des années. Les constructeurs français sont cruellement absents de ce créneau depuis des lustres. Avec son fidèle directeur technique, Jean-Christophe Bolle-Reddat, il décide d'exploiter un nouveau V12 HDi (diesel) de 5,5 litres et 700 ch, installé en position centrale transversale. La Peugeot 908 RC, exposée au Mondial de Paris 2006, offre une habilité de limousine, alliée à la présence d'un important coffre à bagages. Seules les Ital Design Medusa de 1980, Ghia Quick Silver de 1982 et Lamborghini Portofino de 1987 se sont aventurées sur le terrain de la berline à moteur central, mais avec respectivement un 4, un 6 et un 8 cylindres, en aucun cas avec un V12.

Peugeot 908 RC, 2006

2004

En 1997, Robert Peugeot et Jean-Martin Folz, le nouveau PDG du groupe PSA, décident de regrouper les équipes de style de Peugeot et de Citroën à Vélizy. Ce nouveau centre, baptisé ADN pour Automobile Design Network, dispose de moyens importants pour concevoir des voitures innovantes et attractives. Gérard Welter regrettera de ne pas avoir anticipé cette naissance, en ayant été plus exigeant dès les années 80 après la réussite du projet M24.


1989, Peugeot 605

Porte-étendard jugé indispensable par la Direction Générale de Peugeot pour asseoir définitivement la crédibilité de la marque, l'étude du projet Z6 qui va donner naissance en 1989 à la Peugeot 605, est abordée avec humilité et ambition. L'humilité et la patience d'observer la concurrence. L'ambition d'être excellent dès le départ. Celle aussi de transposer des éléments fédérateurs, éprouvés et approuvés, de la 205 et de la 405, au sommet de la gamme. Celle enfin de trouver sa propre voie. Disposant d'un même cahier des charges, les stylistes de Peugeot et de Pininfarina tentent d'exprimer chacun de leur côté ce que doit être un haut de gamme signé du lion, taillé pour les années 90.

Il est évident pour tous que la voiture doit proposer une silhouette classique avec un coffre. La proposition de Pininfarina part avec le handicap d'être trop ressemblante à l'Alfa Romeo 164 issue des mêmes studios. Au contraire, extrapolant les thèmes choisis pour habiller la 405, le dessin des équipes de La Garenne-Colombes offre à la 605 une identité Peugeot plus marquée. L'équipe de Gérard Welter gagne la confrontation.

Peugeot 605, 1989

Peu démonstrative, mais impeccablement proportionnée, la 605 cache bien son jeu avec son important mais subtil travail de sculpture des flancs. La parenté trop étroite avec la 405 a pu en revanche jouer en sa défaveur. Commercialement, ses nombreux ennuis mécaniques - des grèves lors du lancement en série ont été à l'origine de voitures imparfaites - ont nuit à sa carrière commerciale. 254 461 exemplaires sont sortis d'usine, un nombre tout juste honorable, à comparer tout de même aux 153 252 exemplaires de la 604.

1995, Peugeot 406

De nouveau, avec la 406, l'équipe de La Garenne-Colombes remporte la mise face à Pininfarina. Mais Gérard Welter doit de nouveau composer avec les exigences des techniciens, qui veulent une voiture plus habitable. Deux des maquettes présentées à la Direction Générale répondent parfaitement au cahier des charges. La troisième s'en éloigne, volontairement. La voiture est plus basse, plus sportive, plus racée. Roland Peugeot tranche pour cette dernière. L'essentiel du travail a été réalisé par Laurent Rossi, styliste en charge de cette voiture. La suite sera encore une succession de discussions avec les techniciens, qui imposeront de nouvelles évolutions de style, qui heureusement ne remettront pas complètement en cause le dessin de la troisième maquette. Le restylage à mi-chemin de carrière sera effectué par Pininfarina.

Peugeot 406, 1995

1998, Peugeot 206

Proposer une succession digne à la 205 n'est pas une mince affaire pour l'équipe de Gérard Welter. Malgré le succès de celle-ci, la direction de Peugeot tend toujours à accorder plus de crédit aux propositions de Pininfarina. Les designers français travaillent ardemment pour trouver la recette qui doit faire mouche. Le public découvre finalement une automobile, la 206, que certains qualifient de " over designées ", comparée à la 205. Mais cette volonté de façonner l'auto dans les détails est assumée par Gérard Welter. Il pense que si les lignes sont trop pures, trop simples, cela ne peut plus fonctionner en bas de gamme. De nouveau, c'est un succès, en France et à travers le monde, car la 206 sera produite dans de nombreux pays à près de 12 000 000 d'exemplaires (contre 5 278 300 Peugeot 205).

Peugeot 206, 1998

1999, Peugeot 607

Depuis des années, l'automobile française de luxe est à la traîne face aux modèles d'outre-Rhin. Alors, Peugeot ne fanfaronne pas quand il accouche d'une nouvelle berline de haut de gamme, après les 604 et 605. Et pourtant, le constructeur donne de nouveau toutes les raisons d'y croire. La 607 est présentée au Salon de Francfort en septembre 1999. Ce lieu ne doit rien au hasard. Il s'agit de montrer aux Allemands ce dont est capable l'industrie automobile française pour les contrer. Depuis 1995, le Centre Style de Peugeot s'est remis à l'ouvrage. L'aspect est primordial sur le marché des grandes routières. Il prédispose le client potentiel, et permet de situer le produit au sein de la marque, et par rapport à la concurrence.

Peugeot 607, 1999

La parenté avec la face avant de la 206 est évidente, mais avec un traitement évidemment plus viril des volumes. Le dessin arrière ne manque pas de caractère non plus, avec des feux aux contours singuliers. Le dessin des flancs est plus banal, et la position avancée du moteur a nécessité un porte-à-faux qui apparaît bien trop long. L'arc de vitrage cherche ses modèles, quelque part entre BMW et Chrysler. Toutefois, la 607 ne manque pas d'élégance, et sa relative sagesse peut constituer une opportunité sous s'immiscer sur un marché particulièrement difficile. Hélas, malgré ses mérites, les efforts réalisés payent mal. 168 875 exemplaires sont produits de 1999 à 2010.

2001, Peugeot 307

Un des stylistes de l'équipe de Gérard Welter propose un projet original pour remplacer la classique 306. Les montants de baie de pare-brise sont très avancés. Il reste à convaincre les techniciens de la nécessité de repousser ces montants très en avant. Avec 1,51 mètre, la Peugeot est haute dans sa catégorie, et se rapproche de la Renault Scénic (1,61 mètre). Cette tendance à imiter le style des monospaces a été préfigurée dès le Mondial de l'Automobile en octobre 2000, avec le concept car Promothée, annonciateur de la 307.

Peugeot 307, 2001

2004, Peugeot 407

Gérard Welter n'est pas entièrement satisfait par cette voiture. Il lui a été demandé au fur à mesure de l'avancement du projet d'autoriser, par étapes successives, quelques centimètres en plus sur le porte-à-faux avant. C'est un éternel débat entre la technique qui doit respecter de plus en plus de normes, et le design qui veut faire beau et équilibré. Il en résulte une partie avant extrêmement lourde.

Peugeot 407, 2004

2005, Peugeot 407 coupé

Au Salon de Genève 2005, le public découvre la Prologue, qui annonce le coupé 407 dévoilé en octobre à Paris. Le problème de la longueur du porte-à-faux avant est le même pour le coupé 407 que pour la berline. Il est impossible pour l'équipe de Gérard Welter de concevoir une automobile aussi réussie et équilibrée que l'a été le coupé 406. Le coupé 407 est donc réalisé en tenant compte des contraintes techniques et d'homologation des années 2000. On demande au public de s'habituer à ces nouvelles formes étirées, que l'on retrouve aussi chez Audi, mais pas chez BMW, qui semble posséder un savoir-faire qui lui permet d'éviter ces écueils.

Peugeot 407 Coupé, 2005

2007, Peugeot 308

C'est la dernière création de l'équipe de Gérard Welter avant qu'il ne quitte Peugeot. Mais vu les délais de conception relativement longs dans l'automobile, ce n'est pas la dernière automobile sur laquelle on peut noter son influence. La 308 reprend les codes stylistiques du concept car 907 étudié à la même époque, avec ses optiques allongées, ses lignes dynamiques et l'extrémité du capot moteur plongeant vers l'avant, inspiré de ce qui se fait en F1. Par rapport à la 307, les voies sont élargies, et l'aspect général dégage un dynamisme dont ne disposait pas son prédécesseur. Avec la 308 émerge une nouvelle question. Cela reste-t-il pertinent de construire toujours plus volumineux, plus lourd, alors que la tendance est à un retour à la raison, à plus d'économie et à moins de gaspillage de matières premières ...

Peugeot 308, 2007

2007

Gérard Welter part à la retraite, à l'issue d'une carrière de 47 ans dans la même entreprise. Jérôme Gallix le remplace. Les deux hommes viennent de travailler ensemble pendant cinq ans, et Jérôme Gallix a d'emblée été annoncé comme étant le remplaçant de Gérard Welter. La passation se fait en douceur.

Robert Peugeot (né en 1950) a eu l'occasion de côtoyer Gérard Welter durant de longues années. Il a toujours parlé de lui comme d'un homme qui avait de la suite dans ses idées, capable de défendre son point de vue aussi loin que possible, lorsqu'il était convaincu de la pertinence de ses idées. Gérard Welter a eu à coeur de perpétuer l'oeuvre de Paul Bouvot, et il y est largement parvenu. C'était un homme animé par la compétition, tant dans son engagement pour Peugeot qu'au sein de son écurie WM/WR.

Gérard Welter

2018

Décès le 1er février 2018 à l'âge de 75 ans.

Principale source : Gérard Welter, une vie au design Peugeot, l'épopée des WM et WR au Mans, Christophe Bonnaud, éditions Roger Regis.

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