Arista


Arista est une marque automobile française fondée par Raymond Gaillard, qui a produit de manière très artisanale quelques voitures de sport à mécanique Panhard entre 1956 et 1964. Deux modèles ont singulièrement marqué son existence, le coupé Passy et l'Arista Sport. Jacques Durand, connu précédemment pour ses Atla et Sera, est à l'origine de ce second modèle.


Arista Roadster Le Mans


Raymond Gaillard (1904-1973) est un important distributeur Panhard, installé au sein du Grand Garage Molière, rue de Ranelagh, dans le 16e arrondissement de Paris. Il a longuement soutenu financièrement et distribué la marque Callista. En 1953, sur les restes de celle-ci, il donne naissance à un nouveau constructeur dénommé Arista.

Après avoir supprimé de son catalogue le cabriolet Coupes des Alpes, il expose au Salon de Paris d'octobre 1953 trois voitures. Il s'agit d'abord de la Callista Ranelagh, qui à cette occasion change de nom pour devenir l'Arista Le Mans, sans doute en souvenir des participations de Raymond Gaillard à l'épreuve mancelle de 1934 à 1936, puis de 1950 à 1952. Son bicylindre Panhard de 850 cm3 développe 42 ch Din.

Arista Roadster Sport Le Mans


Arista Roadster Rallye


Outre la Le Mans, Arista présente sur ce même Salon le coupé Rallye, qui reprend l'essentiel des caractéristiques techniques du roadster Callista Ranelagh. Ses formes compactes sont assez proches de celles de la Panhard Junior proposée depuis le printemps dernier par Pichon & Parat, sous le nom de Dolomite. Il est disponible avec une large gamme d'équipements optionnels, destinés à améliorer les performances et le confort de l'auto.

Arista Rallye

Pichon Parat Dolomite


Arista barquette


En plus de la Le Mans et de la Rallye, Arista tente sa chance avec une barquette sans portes en matière plastique qui n'entrera jamais en production. Elle permet toutefois à Raymond Gaillard et à sa petite équipe d'apprendre l'utilisation d'un nouveau matériau, la résine de verre.

Sur cette barquette Arista, le problème de manque de rigidité de la coque est très simplement résolu par la suppression des portes.


Arista Passy


Raymond Gaillard change de registre au Salon de Paris d'octobre 1954. Les Le Mans et Rallye sont abandonnées, au profit d'un coupé bien plus ambitieux, dont les lignes ont été dessinées par le styliste Maxime Berlemont, auteur trois ans plus tôt d'un agréable cabriolet sur base Dyna. La nouvelle venue dénommée Passy vise la clientèle des beaux quartiers. Avec un tel nom de baptême, on pouvait s'en douter. Arista comble l'absence d'un coupé de luxe dans la gamme Panhard. Tous les espoirs sont permis.

Le prototype du coupé Passy est encore dépourvu de pare-chocs. Il présente dessus les roues avant des coquilles chromées qui ne seront pas retenues pour la production.

La coque de la Passy est fabriquée en fibre de verre. L'utilisation de cette technique peu coûteuse à mettre en oeuvre se développe chez de nombreux constructeurs artisanaux. Elle évite de devoir découper et former des plaques en tôle. Ici, la résine utilisée a pour nom Stratyl, un nouveau matériau inventé par la société American Cyanamid, et commercialisé par Saint Gobain. Il est léger, dur comme de l'acier, et inoxydable. Chappe et Gessalin installé à Saint-Maur est le fournisseur exclusif des carrosseries de l'Arista.

Le prototype de l'Arista Passy affiche un style quelque peu flamboyant, dans l'esprit des dernières créations des grands carrossiers encore en activité au début des années 50. Il pourrait à la rigueur passer pour un coupé Renault Frégate ! La Passy pèche visuellement par son important porte-à-faux avant, dû au positionnement du flat-win Panhard.

Parallèlement à la Passy longue de 4,40 mètres, Arista propose une version Rallye, qui à part sa dénomination, n'a rien à voir avec la précédente Rallye sur base Callista Ranelagh. L'empattement de la Passy est de 2,35 mètres, son poids de 700 kg, et elle roule à 135 km/h. Sur la Rallye, ces valeurs sont respectivement de 2,13 mètres, 650 kg, et 140 km/h. La Rallye est dépourvue de banquette arrière et de pare-chocs. Le Panhard 5 CV de 850 cm3 et 42 ch Din équipe les deux versions.

Il faut attendre 1956 pour que la voiture soit effectivement disponible à la vente. Le modèle définitif adopte quelques modifications. La calandre est simplifiée, des pare-chocs sont installés, les coquilles chromées au-dessus des roues sont abandonnées ... L'accès aux places arrière reste malaisé, en raison d'un pavillon extrêmement bas.

La Rallye est facturée 1 050 000 francs, la Passy 1 150 000 francs. C'est au moins le prix de deux berlines Panhard Dyna Z. A titre de comparaison, sur le créneau des voitures artisanales, l'Alpine A 106 est vendue 800 000 francs. Les Arista Passy et Rallye sont distribuées par la Savam, société appartenant à Raymond Gaillard, installée à quelques pas du Grand Garage Molière.

Des pare-chocs et des phares additionnels sont installés sur le modèle définitif exposé au Salon de Paris 1955. Le dessin de la calandre est simplifié. Les coquilles chromées sur les roues avant sont abandonnées.

Cette voiture semble laisser la clientèle visée dans l'indifférence. Très vite, la Passy va devenir la danseuse de Raymond Gaillard, qui va financer à perte le maintien de cette marque, et sa présence au Salon de Paris. Par chance, ses activités régulières au sein du Grand Garage Molière lui permettent de dégager de confortables bénéfices.

Face aux DB et Alpine plus sportives, qui peuvent se prévaloir d'un vrai palmarès en course, les Arista font pâle figure. Elle ne brillent guère qu'à l'occasion de quelques concours d'élégance comme celui d'Enghien où leur charme agit ... sans susciter la signature du moindre bon de commande. D'ailleurs, on n'en croise jamais sur les routes ... En dépit de l'extrême faiblesse des ventes, l'Arista reste officiellement disponible. Après avoir été présent au Grand Palais de 1953 à 1955, Raymond Gaillard fait l'économie d'un stand en 1956.

On le retrouve en 1957, sur un stand minuscule, coincé entre celui de Maserati et l'un des piliers métalliques du Grand Palais. Une version remaniée de la Passy justifie ce retour. Elle bénéficie d'un toit rehaussé, qui profite à l’habitabilité et à l’accès aux places arrière. Par contre, l'équilibre des formes en souffre. Les pare-chocs désormais en deux parties sont dotés d'imposants butoirs. Les déflecteurs de portes sont supprimés.

Arista est encore présent au Grand Palais en 1958 et 1959, mais renonce à partir de 1960. Fin 1961, la Passy peut être équipée du moteur Tigre de 50 ch Din. Effectivement disponibles jusqu’en 1963, les Passy et Rallye se seraient vendues et tout et pour tout à une dizaine d’exemplaires.

Arista Passy, Salon de Paris 1958. Avec son Arista Passy, Raymond Gaillard finance à ses frais une marque automobile qui lui coûte plus d'argent qu'elle ne lui en rapporte. La foule ne se presse pas sur son stand.


Arista Sport


En 1963, Raymond Gaillard remet le couvert, et projette de commercialiser un tout nouveau coupé d'aspect franchement sportif, toujours à moteur Panhard. Le modèle est très éloigné dans l'esprit de la précédente Arista Passy. Il s'inscrit plus dans la démarche de Jean Rédélé et de ses Alpine. Ce qui retient le plus l’attention sur cette auto, c’est le hayon en forme de bulle, dont René Bonnet vient de doter la Jet, et que Jensen installera sur ses Interceptor à partir de 1966.

La genèse de ce coupé trouve son origine auprès de Jacques Durand, père des Atla et Sera, futur fondateur de la marque Jidé, qui s'est reconverti à la fabrication de volants pour René Bonnet. Lors d'une rencontre avec Raymond Gaillard dans sa concession parisienne, il lui présente le projet d'une voiture de sport qu’il a dessiné, dénommée ACPA, pour Atelier de Construction et de Production Automobile. Raymond Gaillard y voit l’opportunité de relancer sa marque Arista moribonde. Il accepte de financer l’opération à condition que la nouvelle venue puisse justement perpétuer la marque Arista.

L'Arista Sport dessinée par Jacques Durand se distingue par ses phares carénés sous bulle, sa lunette arrière ouvrante et bombée, son arrière tronqué, et ses simples butoirs faisant office de pare-chocs.

Le projet de Jacques Durand a trouvé son financement. Il se fait assister par Max Saint Hilaire, le futur créateur des BSH. Le châssis se compose de longerons et traverses formant un caisson très rigide sur lequel prend appui la coque et la mécanique de la Panhard PL 17 de 50 ch Din. Jacques Durand tient à cette mécanique, qu'il apprécie pour son excellent rapport puissance/encombrement, même si elle commence à dater face à la concurrence. Nous sommes fin 1963.

En janvier 1964, l’Arista Sport est présentée à la presse. Les deux premières voitures ont été assemblées dans une atelier situé au sixième étage du Grand Garage Molière. Puis l'activité est transférée à Vigny-le-Haut, près de Pontoise en Seine-et-Oise. Raymond Gaillard fonde à cette occasion la société Vigny Industrie, dont le directeur technique est Jacques Durand.

Raymond Gaillard fait paraître début 1964 plusieurs publicités pour le coupé Arista. La vue de profil permet de mettre en évidence le vaste hayon, au dessin très audacieux pour l'époque.

Le coupé Arista Sport définitif mesure 4,06 mètres de long, pour 1,59 mètre de large et 1,17 mètre de haut. Son empattement est de 2,26 mètres. Grâce à sa carrosserie en polyester, le poids de l’auto ne dépasse pas 620 kilos, ce qui favorise ses performances. L'Arista Sport atteint 160 km/h. La version Sport Spécial à compresseur de 80 ch Din affiche une maximum de 180 km/h.

Pour contenir le prix de revient, un maximum de pièces sont empruntées à la grande série. Le pare-brise, les poignées de portes et le système d’essuie-glace proviennent de la Renault Caravelle, la planche de bord de la Panhard 24, les phares et les poignées intérieures de la Simca P60, l'éclairage Marchal triple fonction (antibrouillard, veilleuse et clignotant) de la Peugeot 403, les charnières de porte de la Citroën DS 19, etc … La bulle de la lunette arrière en plexiglas permet une large ouverture pour accéder aux bagages, et offre une excellente visibilité. Malgré les nombreux emprunts à la série, l'Arista reste coûteuse à produire. Cela pèse sur son prix de vente, 16 950 francs, quand une Renault Caravelle ne coûte que 11 000 francs.

Les problèmes de santé de Raymond Gaillard le conduisent à se retirer dans sa villa de Saint-Tropez. Il met en vente Vigny Industrie en 1966, sans trouver d’acquéreur. En 1967, la société est en faillite, et les salariés sont licenciés. Le Grand Garage Molière est fermé et vendu, alors que la firme Panhard cesse au même moment la production de ses propres modèles. Raymond Gaillard s’éteindra six ans plus tard, en 1973.

Seulement huit Arista Sport auraient été produites en 1963 et 1964, dont cinq ou six à moteur Panhard, les autres avec des ensembles Peugeot, Fiat et Ford V6. La belle Arista Sport n’a pas eu la carrière qu’elle semblait mériter. En 1965 Jacques Durand rejoint André Morin pour de nouvelles aventures au sein de la Sovam, dans les Deux-Sèvres.

L'Arista Sport dessinée par Jacques Durand se distingue par ses phares carénés sous bulle, sa lunette arrière ouvrante et bombée, son arrière tronqué, et la présence de simples butoirs en guise de pare-chocs.

Texte : Jean-Michel Prillieux / André Le Roux
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