Peugeot Taxi H4
C'est lors du salon de Paris de 1972 qu'était présenté ce véhicule monocorps baptisé H4, basé sur un châssis et une mécanique de Peugeot 204.
Heuliez sortait des sentiers battus en proposant avec le H4 un nouveau concept adapté aux besoins des artisans taxis. Si aujourd'hui les monospaces font partie intégrante de notre quotidien, il faut se repositionner au début des années 70 où ce type de configuration appartenait encore au domaine de la science fiction. Le H4 innovait par un accès à bord facilité par des portes arrières généreuses et surtout par un rapport habitabilité / encombrement exceptionnel. Le H4, très compact, mesurait 3,65 mètres de long, 1,70 mètre de large et 1,60 mètre de haut, soit 14 cm de moins qu'une Renault Modus en longueur, pour une hauteur et une largeur sensiblement identiques. La banquette arrière était prévue pour trois passagers. A l'image des taxis londoniens Austin ou Winchester, le H4 disposait près du conducteur d'un espace à bagages. Un strapontin était installé sur cet emplacement pour accueillir si cela s'avérait nécessaire un quatrième voyageur. Une vitre séparait le chauffeur du reste de l'habitacle.
Innovation majeure à l'époque, le H4 était doté d'un toit en verre transparent, un équipement qui allait attendre les années 2000 pour se démocratiser, en particulier chez ... Peugeot (307/308 SW, 407 SW). Pour le reste, la pare-brise et les vitres latérales étaient d'une dimension inhabituelle pour l'époque. Renault à lancé la mode des boucliers avec sa Renault 5, en lieu et place des pare chocs classiques. Heuliez lui emboîtait le pas avec un ensemble teint dans la masse qui entourait la voiture, dans une couleur bleue contrastée par rapport au reste de la caisse orange. Cette teinte orange omniprésente jusque dans l'habitacle était très à la mode en ce début des années soixante dix. La mécanique issue de la Peugeot 204 demeurait fort conventionnelle : un 1130 cm3 de 60 ch SAE. L'oeil avisé aura observé la présence d'optiques empruntés au coupé 504. Le concept était semble t'il trop en avance sur son temps. Le H4 ne dépassa pas le stade du prototype. Les taxis 504 et R 16 avaient encore de beaux jours devant eux. Heuliez envisagea sur le papier d'en dériver des versions camionnette et pick-up. Peugeot fut encore sceptique face à ce type de véhicule quand Matra lui proposa quelques années plus tard un projet grand public dans le même esprit. Renault se lança avec plus d'audace à partir des plans proposés par le groupe de Jean Luc Lagardère, et connut le succès que l'on sait avec l'Espace. Le concept était décliné en 1996 sur une voiture plus courte, la première Scénic, autre réussite commerciale pour l'ex régie. Citroën suivait le mouvement bien tardivement en 1999 avec la Picasso. Heuliez avait déjà vu juste un quart de siècle plus tôt, à l'exception du style très " bio design " des premiers monospaces de série, pas encore d'actualité au début des seventies. Déjà, comme l'écrivait Marguerite Yourcenar, " C'est avoir tort que d'avoir raison trop tôt ". Cette vérité, Heuliez allait encore la vérifier bien des fois dans les prochaines années. Le prototype fut récupéré par Heuliez auprès de Peugeot et stocké au sein du conservatoire Heuliez. Lors de sa mise en vente par Artcurial le 7 juillet 2012, il se présentait dans un bel état de conservation, sans être pour autant capable de prendre la route, faute de circuit de freinage et de système de remplissage de carburant. Estimé entre 30 000 et 50 000 euros, il fut vendu 19 657 euros avec les frais.
Le H4 demeure un véhicule majeur dans l'histoire d'Heuliez. Il fut en effet le premier concept car de la marque présenté au public, si l'on considère que la Murène fut créée chez Brissonneau et Lotz, et que les Citroën DS Cabriolet quatre portes ou Simca 1501 Coupé ne furent que des transformations sur des bases existantes. Yves Dubernard, le père du H4, précise que ce véhicule " fit entrer Heuliez dans une ère nouvelle, celle de la création, de l'innovation et du design ". A l'issue de la vente Artcurial en juillet 2012, son retour dans le département des Deux Sèvres, aux mains d'un amateur éclairé, ne pouvait que rassurer le designer. Le véhicule sera désormais appelé à séjourner dans différents musées régionaux, et à participer à des évènements mettant en scène la culture et l'histoire de l'automobile.
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