Panhard 24


L'arrivée de Citroën dans le capital de Panhard


Panhard cède 25 % de son capital à Citroën en 1955 pour faire face à la crise financière qui menace sa survie. Les deux réseaux de distribution fusionnent en juillet 1956, et Citroën propose alors les modèles Panhard dans ses concessions. La participation est portée à 45 % en 1958. Ce rapprochement avec Citroën aurait pu prendre la forme d'un véritable partenariat, qui aurait permis de développer les points forts de Panhard, voire de répartir intelligemment les productions entre les deux marques. A l'époque, la Dyna Z s'intègre bien dans la gamme Citroën. L'Ami 6 n'est pas encore commercialisée, et la berline de l'avenue d'Ivry permet aux concessions Citroën de combler le vide entre la 2 CV et la DS.

Mais en prenant part au capital de Panhard, les décideurs de Javel semblent surtout apprécier la possibilité de produire à moindre coût chez Panhard la 2 CV Fourgonnette, puis plus tard la 2 CV Sahara et les premières Ami 6. Citroën se soucie peu de la stratégie commerciale et industrielle de Panhard, qui ne gagne pas d'argent à travailler ainsi en simple sous-traitant. Pire encore, les dirigeants du quai de Javel suspendent la plupart des projets de développement. Panhard peut disposer du réseau de distribution de Citroën, à la condition de ne pas faire concurrence à la firme aux chevrons. Mais la commercialisation de l'Ami 6 Citroën en 1961 vient perturber ces plans. 


La 24, un projet plein d'espoir


Panhard est exsangue. La seule solution est de proposer un modèle original, dans un créneau non occupé par l'actionnaire principal, en composant avec les faibles moyens du bord et des finances limitées. Citroën ne fera pas d'efforts pour soutenir Panhard. Il n'est évidemment plus question de concevoir un moteur inédit. Une nouvelle carrosserie est étudiée, qui va donner naissance au coach Panhard 24, dont la désignation est un clin d'oeil au palmarès des bicylindres Panhard aux 24 Heures du Mans.

Lors de la présentation de la Panhard 24 le 24 (...) juin 1963 à Versailles au coeur de la roseraie de la société Truffaut, l'un des invités, Roland Peugeot, est impressionné par le travail réalisé avec de si petits moyens. La presse quant à elle salue l'esthétique de la 24, ses trouvailles d'aménagement, son confort et ses qualités routières. Par contre, elle émet des réserves concernant son habitabilité arrière et la faiblesse de sa mécanique. La 24 est en effet équipée d'un modeste bicylindre de 848 cm3 développant 42 ch Din.

Panhard 24

C'est un produit 100 % Panhard, imaginé par Louis Bionier, épaulé par André Jouan et une équipe d'ingénieurs. Louis Bionier, responsable des études carrosseries, est entré chez Panhard & Levassor en 1921. Lorsque débute la conception de la 24, sa fin de carrière est proche, et cette voiture sera son ultime création pour Panhard, voire son chef-d'oeuvre. Comme sur la Chevrolet Corvair, une nervure parcourt sans interruption toute la caisse. Les poignées de portières s'y intègrent tout naturellement. Le dessin plat du pavillon est d'une grande finesse et confère à la voiture une allure dynamique. Les montants latéraux sont plus larges à leur sommet qu'à la base. Les doubles optiques sous verrière sont d'un aspect particulièrement novateur. La réalisation des carrosseries est confiée à Chausson, tandis que le montage final a lieu avenue d'Ivry. Les premières voitures sont commercialisées fin 1963. La 24 rentre en concurrence avec la Renault Caravelle et le coupé Simca 1000. Les coupés étrangers sont encore peu nombreux à passer la frontière.

La nouvelle Panhard 24 a été conçue pour être proposée ultérieurement en version berline quatre portes. Les dirigeants de la firme d'Ivry sont bien conscients qu'un coupé, aussi élégant et raffiné soit-il, n'est pas suffisant à lui seul pour faire vivre une grosse entreprise comme Panhard. A partir du Salon de Paris 1964, à défaut de berline quatre portes, les 24 B et 24 BT dont l'empattement est allongé de 25 cm offrent une meilleure habitabilité. Il s'agit de conserver la clientèle de la PL 17 au moment où ce modèle s'apprête à quitter les chaînes de montage. Parallèlement au lancement de la 24, Citroën porte sa participation au capital de Panhard à 76 %. La doyenne des marques n'a plus la moindre autonomie pour décider de son avenir automobile. Le 23 avril 1965, le constructeur aux doubles chevrons devient l'unique actionnaire. Sous le capot des 24 apparaît bientôt une plaque " SA André Citroën ". 

Panhard 24

A partir de septembre 1965, la publication des catalogues Panhard est confiée à l'éditeur Delpire, en charge des prospectus Citroën depuis de nombreuses années. L'amateur de beaux documents publicitaires n'est pas perdant dans l'affaire, et la présentation de la brochure de la 24 imprimée pour 1966 s'avère particulièrement attrayante. Parallèlement, la Société Nouvelle de Publicité (SNP) perd ses contrats avec la firme de l'avenue d'Ivry.

Les ventes de la 24 sont satisfaisantes durant les premiers mois. L'effet nouveauté joue à fond et Panhard reprend place sur un marché qu'il a abandonné depuis le retrait des Junior à vocation sportive. La 24 est un modèle de conquête, qui fait venir à Panhard des clients qui n'ont jamais acheté d'automobiles de la marque. En interne, son développement se poursuit. Il s'agit de corriger les quelques défauts relevés par la presse spécialisée, notamment le manque d'efficacité du freinage.


Le déclin


L'attrait pour la nouveauté passé, la courbe des ventes de la 24 cesse sa progression. Pire, la production globale de la marque s'effondre de plus de 60 % entre 1964 et 1965. On passe de 29 924 voitures à seulement 11 631 l'année suivante. La chaîne de la PL 17 est interrompue en janvier 1965. La 24, un coupé, devient la seule voiture qui défende la marque Panhard. Le réseau Citroën en général ne se bat pas pour la vendre. Aucun effort significatif n'est fait pour la promouvoir. Panhard annonce le 28 août 1967 par communiqué de presse la cessation de son activité automobile de tourisme. Une page de l'histoire automobile en France vient de se tourner. L'usine de Bruxelles Forest qui assemble les Panhard pour le marché belge et luxembourgeois cesse aussi son activité. Le bilan pour la 24 est de 28 651 voitures produites en près de quatre ans.

Pierre Bercot, PDG de Citroën depuis juillet 1958, a à ce moment-là d'autres préoccupations plus importantes que le sort de Panhard. Il doit maintenir le rang de Citroën face à Renault et Peugeot qui sont de plus en plus combatifs, et faire face à la croissance des ventes des voitures étrangères en France. Citroën s'engage à reprendre le personnel de Panhard. Certains cadres préfèrent se démettre, tandis que d'autres poursuivent leur carrière chez Citroën. L'un des plus connus, Louis Bionier, reste quelque temps pour participer à la conception de la Dyane, dont le nom est un joli clin d'oeil à la Dyna (anagramme phonétique).

La production des 2 CV Fourgonnette et Méhari est maintenue avenue d'Ivry jusqu'en 1970. Panhard va désormais de concentrer exclusivement sur la conception et la fabrication d'engins blindés légers à usage militaire. La Société de Constructions Mécaniques Panhard et Levassor est toujours installée de nos jours dans l'Essonne à Marolles-en-Hurepoix.

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