Packard, 1902 à 1950
James Ward Packard (1863-1928) 1936 à 1938 - 1939 - 1940 - 1941 - 1942 - 1942/1945 - 1946/47 - 1948/1949 -1949/1950 Un constructeur pour l'élite James Ward Packard n'est pas satisfait de l'automobile de marque Winton qu'il vient d'acheter en 1898. Depuis Cleveland d'où il la ramène, Packard subit un certain nombre de pannes sur les cinquante miles de son trajet. La petite histoire veut que lorsqu'il en demande les raisons à Alexander Winton, il reçoit une réponse de nature à l'inciter à entreprendre lui-même la construction de sa voiture, projet qu'il va mener avec son frère William Doub Packard, et deux mécaniciens qu'ils débauchent chez ... Winton. Les frères Packard possèdent une petite entreprise, la New York & Ohio Company, qui fabrique à Warren dans l'Ohio des lampes à incandescence et des transformateurs. C'est là que voit le jour le 6 novembre 1899 la première Packard, une monocylindre. Quatre autres voitures sont produites cette même année, puis quarante neuf en 1900. Le modèle A est suivi d'une série d'autres modèles dénommés B, C, D, E et F. Chaque appellation concrétise des innovations importantes par rapport au modèle précédent. Le 10 septembre 1900, la New York & Ohio Company est réorganisée pour la fabrication exclusive d'automobiles, et prend le nom de Ohio Automobile Company. Elles compte cinq associés, dont les deux frères Packard. Le slogan de la nouvelle firme inventé fin 1901 est astucieux et ne changera jamais : " Ask the man who owns one " (demandez à celui qui en possède une). Parmi les premiers clients, on trouve William D. Rockfeller qui, lors du Salon de New York en novembre 1900, a délaissé la marque Winton pour s'offrir deux Packard. Il restera longtemps un fidèle de la marque. Un autre client a son importance pour l'avenir de l'entreprise. Il s'agit d'un homme d'affaires du nom de Henry B. Joy. Preuve de son intérêt pour ces autos, il cherche à acquérir des actions Packard. Le 10 octobre 1902, la Ohio Automobile Company devient la Packard Motor Car Company. Toutes les nouvelles actions émises pour augmenter le capital sont acquises par Henry B. Joy et ses associés. La nouvelle société part s'installer en 1903 à Détroit, où est construite une toute nouvelle usine, puis en son sein les premières quatre cylindres de la marque. Packard, 1904 Dès les premières années, Packard adopte une politique de vente plutôt inhabituelle, dont le principe est la création de filiales implantées dans des régions clés plutôt que la vente de voitures à des concessionnaires indépendants. Tandis que les concurrents facturent le prix d'une voiture au moment de la sortie de l'usine, Packard doit attendre le paiement jusqu'au moment où la vente au client final est réalisée. Cette méthode, qui exige d'immobiliser de lourds capitaux, permet par contre d'imposer des normes de qualité élevées, et offre la possibilité de proposer sur l'ensemble du territoire une uniformité de prix et de niveau de service. James Packard conserve la direction de l'entreprise jusqu'en 1909 et la présidence du conseil d'administration jusqu'en 1912. Il s'en retourne ensuite dans sa société de matériel électrique à Warren, qui bien des années plus tard, sera incorporée à la General Motors sous le nom de Packard Electric Division. Henry B. Joy (1864-1936) Henry B. Joy lui succède, avant de quitter lui-même Packard en 1916. Il est alors en désaccord avec le directoire sur la stratégie à suivre. Joy souhaite en effet fusionner avec un ou plusieurs autres constructeurs afin de grandir, mais les autres actionnaires préfèrent garder leur autonomie. Il est remplacé par Alvan Macauley. Pour un constructeur indépendant entièrement voué aux automobiles de luxe, Packard réalise des chiffres de ventes remarquables en battant régulièrement Cadillac à partir de 1925. A l'exception de 1931, 32 et 34, Packard vend plus d'automobiles que le binôme Cadillac / La Salle jusqu'à la Seconde Guerre mondiale. Après avoir produit des versions 12 cylindres de 1915 à 1922 habillées par les plus grands carrossiers, Packard renoue avec ce type de mécanique en 1932, pour résister tant que possible à l'assaut commercial des Cadillac 16 cylindres. Mais près de 95 % des ventes portent encore sur des 8 cylindres. Packard Twelve, 1935 La One Twenty (ce nom fait référence à la longueur en pouces de l'empattement) présentée en janvier 1935 vise une nouvelle catégorie d'acheteurs : ceux qui ont toujours voulu s'offrir une Packard sans en avoir vraiment les moyens. Dans ce but, elle conserve tous les signes extérieurs des voitures de la marque, mais avec une mécanique 8 cylindres simplifiée. Malgré un prix de vente incroyablement bas vu le standing auquel elle prétend, elle est solide et assez luxueusement équipée. L'acheteur en a pour son argent. Durant le millésime 1936, Packard vend 61 027 véhicules, dont 55 042 One Twenty. Ce brillant succès commercial sauve littéralement la firme. Les publicités font référence à la 120 en 1936 et 1937, à la Eight en 1938, puis à la One Twenty à partir de 1939 Il faut voir dans la One Twenty le point de départ de la séparation entre les gammes dites Junior et Senior. La recette semble si bien fonctionner que Packard prend la décision d'étendre davantage vers le bas cette gamme Junior. En septembre 1936, le constructeur jette un nouveau pavé dans la mare en lançant une voiture encore plus basique, la Six, simplement dotée d'un 6 cylindres de 100 ch. La Six est vendue environ trois fois moins cher que la plus économique des voitures de la gamme Senior. L'accueil du public est aussi chaleureux que dans le cas de la One Twenty, sans pour autant pénaliser outre mesure les ventes de celle-ci, dont le niveau baisse de moins de 10 %. Packard atteint son record absolu de production en 1937 avec 122 593 unités, dont 65 400 Six, 50 100 One Twenty, 5 793 Super Eight et 1 300 Twelve, ce qui le place à la neuvième place des constructeurs américains. Une nouvelle usine est construite pour faire face à la demande de ces modèles plus abordables. Une Packard 1937 à 795 dollars ... Le risque de banalisation de l'image de Packard va grandissant. Mais en tant qu'industriel indépendant, ce constructeur ne bénéficie pas de l'appui financier d'un grand groupe, comme c'est le cas pour ses concurrents Cadillac (au sein de la General Motors), Lincoln (affilié à Ford) ou Imperial (qui dépend de Chrysler). Il est donc en permanence contraint d'introduire très rapidement de nouveaux produits répondant aux attentes d'un marché fluctuant. Il est aussi à la meilleure place pour comprendre que l'ère des grandes classiques appartient désormais au passé. En 1938, toutes les marques américaines connaissent une récession sévère. Packard produit 55 718 voitures. Les ventes des quatre modèles ont baissé dans des proportions comparables. Cette même année, 8 % de la production concerne la gamme Senior, mais 50 % des ressources en main-d'oeuvre lui sont affectées. Cela ne peut pas durer. L'entreprise enregistre des pertes. Les autres indépendants comme Marmon, Auburn, Cord, Duesenberg, Pierce Arrow, Stutz, etc ... ont failli depuis longtemps, faute d'ambition ou de remise en question suffisante. Chez Packard, on ne veut pas subir le même sort.
En 1938, Packard n'a pas encore totalement renoncé à l'hyper luxe, comme en témoignent ces réalisations des carrossiers Roolston (en haut) et Brunn (en bas).
Depuis 1923 toutes les Packard sont répertoriées en séries et non en années. Ainsi 1923 marque la première série, 1924 la deuxième série, etc ... La treizième série qui aurait du être commercialisée en 1936 n'a jamais existé, par superstition ! On est ainsi passé de la douzième à la quatorzième série. La dix-septième série de 1939 se décline sur deux niveaux, quatre modèles et plusieurs carrosseries. Au niveau des Junior, il y a la Six (6 cylindres, 4020 cm3, 101 ch, empattement de 122 pouces) et la One Twenty (8 cylindres, 4623 cm3, 121 ch, 127 ou 148 pouces). Chez les Senior, on compte sur la Super Eight (8 cylindres 5230 cm3, 131 ch, 127 ou 148 pouces) et la Twelve (12 cylindres, 7756 cm3, 177 ch, 134 ou 139 pouces). Les modèles 1939 ne diffèrent de ceux de 1938 que par quelques détails cosmétiques mineurs. Packard Six, 1939 Packard One Twenty, 1939 Packard Super Eight, 1939 Packard se classe en 1939 à la dixième place des constructeurs américains, avec 46 405 voitures produites, dont 24 350 en 6 cylindres. L'année se solde par un maigre profit. La Twelve, qui vit sa dernière année d'existence, n'est assemblée qu'en 446 exemplaires, sur un total de 5 744 Twelve en huit ans de règne. En 1939, la fourchette des tarifs Packard est particulièrement étendue. La Six la plus économique, le Business Coupe, ne vaut que 888 dollars, tout en restant un cran au-dessus du prix des Chevrolet ou Ford équivalentes. Viennent ensuite les 8 cylindres One Twenty et Super Eight, de 1636 à 2294 dollars. Mais le ticket d'entrée pour accéder à l'une des dernières Twelve est fixé à 4155 dollars, pour s'envoler jusqu'à 8355 dollars pour un " All Weather Cabriolet " habillée par le carrossier Brunn.
Tandis que l'Europe s'embrase et cesse pratiquement toute production automobile, les Américains poursuivent sans faiblir la fabrication de voitures de tourisme. Packard lance ses modèles 1940 le mardi 8 août 1939, ils resteront en production jusqu'à la mi-septembre 1940. Comme en 1939, la 18ème série se décline sur deux niveaux, quatre modèles et plusieurs carrosseries. Dans la gamme Junior, on trouve la One Ten (anciennement Six, 6 cylindres en ligne de 4020 cm3) et la One Twenty (8 cylindres en ligne, 4623 cm3). La gamme Senior comporte les Super Eight One Sixty et Custom Super Eight One Eighty, dotées l'une et l'autre du nouveau 8 cylindres en ligne de 5383 cm3. Ces modèles 1940 se différencient de ceux du millésime précédent par leur calandre plus étroite, flanquée de deux grilles chromées sous les phares. et surmontée d'un capot aux bords arrondis. Le reste de la carrosserie ne change presque pas. Une option climatisation figure pour la première fois au catalogue. La One Ten (101 ch) est la moins coûteuse à l'achat, et aussi la plus produite. Six carrosseries sont disponibles sur l'empattement de 122 pouces, depuis le Business Coupe à 940 dollars jusqu'au Station Wagon à 1200 dollars. La One Twenty (121 ch) dispose d'un empattement plus long (127 pouces). Deux niveaux de finition sont proposés : Standard (sur huit types de carrosseries) et Deluxe (sur quatre types). Dans la finition Standard, les prix s'échelonnent de 1038 dollars pour le Business Coupe à 1573 dollars pour la Convertible Sedan. Les version DeLuxe, à carrosserie équivalente, ne sont facturées que quelques dizaines de dollars de plus. Packard One Twenty Business Coupe, 1940
Packard One Twenty Convertible Coupe, 1940 La Super Eight One Sixty (162 ch) adopte le nouveau 8 cylindres en ligne de 5834 cm3. La mascotte de radiateur de cette série est un pélican, et non pas une déesse comme sur la One Twenty. Six carrosseries sont proposées sur l'empattement de 127 pouces, depuis le Business Coupe à 1524 dollars jusqu'à la Convertible Sedan à 2075 dollars. Packard inscrit par ailleurs à son catalogue deux Sedan quatre portes " longues ", l'une avec un empattement de 138 pouces, l'autre de 148 pouces, et une Limousine sur l'empattement de 148 pouces. La Custom Super Eight One Eighty (162 ch) succède à Twelve, avec un niveau d'équipement aussi poussé que sur l'ancien haut de gamme. Elle dispose de la même mécanique que la Super Eight One Sixty. Tout un éventail de carrosseries est proposé sur les empattements de 127, 138 et 148 pouces, dont quelques " Custom " proches du sur mesure.
Packard Custom Super Eight One Eighty Club Sedan Après avoir collaboré de longues années avec les carrossiers Dietrich, Le Baron et Rollston, Packard renouvelle sa gamme de modèles Custom en ajoutant de nouvelles versions habillées chez Darrin et chez Rollson. Rollston avec un " t " ferme en avril 1938, et la structure est reprise par de nouveaux actionnaires en septembre 1938 sous le nom de Rollson. Packard devient leur principal client.
Les réalisations de Rollson permettent de tutoyer les sommets du luxe La One Twenty est choisie par Howard Dutch Darrin pour élaborer la Convertible Victoria. Ce modèle présenté en 1939 en tant que prototype est inscrit au catalogue de Packard pour 1940, au prix de 3819 dollars. Ses lignes basses et élégantes concilient avec une certaine harmonie le style des grosses américaines et des sportives " tourers " anglaises. Arrivé à Paris au début des années 20, Howard Dutch Darrin s'y est fait remarquer pour ses talents. Associé à Thomas Hibbard de 1922 à 1931, puis au sud-américain Fernandez de 1932 à 1937, il habille les plus beaux châssis européens et américains des années 20 et 30. Sa réputation est devenue aussi brillante à Los Angeles où, en 1938, il installe une petite entreprise de carrosserie sur Sunset Boulevard, à deux pas des studios d'Hollywood, Il ne tarde pas à intéresser les plus grandes vedettes du cinéma. Errol Flynn et Clark Gable sont à inscrire sur la liste des premiers propriétaires de Packard Darrin. Pour faire face à la demande, Darrin transfère son atelier de Sunset Boulevard vers Connersville dans l'Indiana, où il s'installe dans les anciens locaux d'Auburn, plus vastes. Packard parvient en 1940 à développer significativement ses cadences en atteignant une production globale qui a plus que doublé par rapport à celle de 1939, mais en restant encore à distance du record de 1937. Sur les 98 020 voitures assemblées, on dénombre 62 300 One-Ten, 28 158 One Twenty, 5 662 One Sixty et 1 900 One Eighty.
Les Packard de Dutch Darrin sont promues
" Glamour car of the Year " La même gamme est reconduite pour 1941 sous les mêmes désignations. Dans le segment inférieur, les prix s'affichent entre 927 dollars pour la One Ten Business Coupe et 1541 dollars pour la Deluxe Wagon 4 doors, et dans le segment supérieur entre 1639 dollars pour la Super Eight One Sixty Business Coupe et 4570 dollars pour la Super Eight One One Eighty Limousine 7 doors. De nouveau, Packard propose des carrosseries signées Darrin et Rollson sur la base de la Super Eight One Eighty. Loin d'avoir succombé aux sirènes attirantes du " streamline ", les Packard du début des années 40 demeurent fidèles au style guindé de leurs devancières. La clientèle se recrute plus dans les petites villes huppées de la Nouvelle Angleterre que dans les grandes mégalopoles comme New York ou Los Angeles. Pour la convaincre, mieux vaut éviter les excès de style propres au principal concurrent, Cadillac.
Packard One Ten Deluxe Sedan Les modèles Junior - Six puis One Ten et One Twenty - ont sans doute sauvé Packard de la débâcle. Ces quelques années de répit ne doivent cependant pas faire illusion. Les " big three ", directement ou indirectement, dictent déjà leurs lois aux derniers indépendants. Pour mieux leur résister, il importe de savoir prendre les devants. Les années 40 sont riches de promesses pour les constructeurs américains les plus motivés. Chez Packard, on est bien décidé à ne pas manquer ce grand rendez-vous avec la clientèle. Howard Darrin va jouer un rôle majeur dans la naissance de la future Packard, qui devra pour se vendre se différencier de la masse. Max M. Gilman, président de la compagnie, lui demande en effet de dessiner en un temps record une automobile innovante. Il s'exécute en quelques semaines. La présentation de la maquette de Darrin au sein du studio de style de Packard provoque un réel enthousiasme. Son projet marque une rupture totale avec toutes les voitures produites jusqu'alors par ce constructeur. Cette Packard évoque plus un show car qu'un modèle de série.
Packard Clipper, 1941 Le dessin de Darrin aussi plaisant soit-il doit faire avant sa mise en production l'objet de quelques retouches en interne. La ceinture de caisse est rehaussée, l'élan des ailes vers l'arrière est réduit au niveau des portières avant. Les marchepieds sont bien présents mais dissimulés par un bourrelet de tôle agrémenté d'un joint chromé. Pour être futuriste, la ligne de la Clipper n'en est pas moins " digérable " par une clientèle même non avertie. Sur le plan mécanique, on a retenu un huit cylindres en ligne de 4625 cm3 et 125 ch. L'évènement à lieu le samedi 26 avril 1941. Ce jour-là, tous les concessionnaires Packard présentent au public la nouvelle Clipper. En haut lieu, on croise les doigts, car il faut immédiatement viser juste si l'on veut sauver Packard. La Clipper devra mener l'offensive face aux Lincoln Zephyr, Cadillac série 61, Buick 70 Roadmaster et Chrysler New Yorker. Avec pour l'instant une unique carrosserie, une Sedan quatre portes, la Clipper s'insère pour ce premier millésime en milieu de gamme, entre les One Ten / One Twenty et les One Sixty / One Eighty.
Packard Clipper, 1941 Dans la course au style ponton, Packard paraît avoir pris une bonne longueur d'avance sur ses principaux concurrents. Mais dès l'année suivante, Buick et Cadillac réagissent en proposant des carrosseries aux ailes avant presque totalement intégrées à la caisse. Nous l'avons vu, le programme de la Clipper est majeur pour Packard. Il conditionne l'avenir de la marque. Par bonheur, on va en effet respirer un peu mieux à l'issue de l'exercice 1941. Les résultats sont au vert, bien meilleurs qu'en 1940. Sur les 72 855 Packard vendues cette année-là, 16 000 sont des Clipper. Le public est conquis. Il a même été étonné de voir une marque aussi rigide que Packard proposer un produit tellement plaisant à l'oeil.
Packard Clipper, 1941 La Clipper rencontre un tel succès que son constructeur étend son design à presque toutes les voitures de 1942. Cela signifie que toutes les mécaniques du catalogue sont disponibles sur la Clipper. Cela va donc de la Clipper One Ten en 6 cylindres de 105 ch à la Clipper One Eighty en 8 cylindres de 165 ch.
Packard Clipper Special Sedan Plusieurs carrosseries de 1941 sont tout de même conservées, sur les One Sixty et One Eighty en particulier.
Packard One Sixty Convertible Coupe, toutes les Packard ne cèdent pas au style de la Clipper Packard revendique haut et fort son statut de constructeur haut de gamme. Le V8 de 5838 cm3 qui équipe les One Sixty et One Eighty est à cette époque le plus puissant moteur du marché américain. La qualité de fabrication reste aussi dans les standards les plus élevés aux Etats-Unis. Les meilleurs matériaux sont employés dans l'habitacle, que cela soit pour la sellerie, les tapis moelleux ou la ronce de noyer qui envahit le tableau de bord et le sommet des portes. En janvier 1942, Max. M. Gilman est victime d'un grave accident de voiture, qui l'empêche d'exercer ses activités. Il est remplacé par George T. Christopher, un ancien de la General Motors, qui travaille pour Packard depuis 1934. La production automobile est interrompue en février 1942. Tous les espoirs portés sur la Clipper pour les prochaines années sont anéantis. On peut penser que différents projets sont déjà bien aboutis, mais ils ne verront jamais le jour. Nous n'aurons donc en série ni cabriolets, ni somptueuses limousines, ni woodies sur base Clipper. Seul Howard Darrin propose encore quelques-uns de ses modèles très particuliers et hors de prix.
Packard 180 Super Eight Touring Sedan par
LeBaron Packard produit des moteurs d'avions Rolls-Royce Merlin et des groupes marins. La compagnie émergera du conflit en étant le seul constructeur indépendant exempt de dettes. Le nom de Packard va s'entourer dans l'industrie d'une sorte d'aura acquise au cours de ces années.
Les productions de guerre de Packard La guerre est terminée. Archi conservatrice, bénéficiant d'une image très aristocratique, la firme réussit à travers de prudentes innovations et grâce à la recherche constante d'un impeccable niveau de qualité, à maintenir sa réputation quasi légendaire. Packard ne cède à personne en matière de style et d'élégance. Il s'agit désormais de définir les orientations de la marque pour les années à venir. Au lieu de revenir aux seules voitures de grand luxe comme va le faire son principal concurrent Cadillac, chez Packard on préfère poursuivre une démarche de démocratisation des produits initiée en 1936 avec la One Twenty. Est-ce le bon choix ? Comme c'est le cas chez tous les constructeurs, les modèles de 1942 reprennent du service. L'effort de guerre n'a pas permis de dégager du temps pour penser à l'avenir. Accessoirement, cette situation imposée par les circonstances permet d'amortir les anciennes installations. L'entreprise emploie près de 28 000 salariés, et dispose d'un réseau de près de 1800 concessionnaires aux Etats-Unis. D'autres franchises sont en cours de discussion. L'avenir semble radieux, George T. Christopher est aux anges. En ciblant le marché des automobiles moyennes supérieures, il vise à terme une production de 200 000 voitures par an.
Packard Clipper, 1946 Trois caisses sont au programme : sedan quatre portes, sedan deux portes et limousine, avec selon les modèles, la possibilité d'opter pour un empattement de 3.05, 3.23 ou 3.76 mètres. L'offre moteur comprend un six et un huit cylindres. Les modèles sont baptisés par ordre croissant de prix du nom de Clipper Six, Clipper Eight, Clipper Deluxe Eight, Super Clipper et Custom Super Clipper. L'empattement court est disponible depuis la Clipper Six jusqu'à la Clipper Deluxe Eight, l'empattement intermédiaire sur les Super Clipper et Custom Super Clipper. L'empattement long concerne par définition les limousines de la série Custom Super Clipper. Le premier prix d'une Packard est de 1730 dollars. La moins chère des Cadillac est facturée 2052 dollars. L'absence des versions Convertible et Station Wagon est regrettée par une certaine clientèle. Mais sur le plan industriel, des choix se sont imposés. La première Packard Clipper modèle 1946 sort d'usine le 26 octobre 1945. Mais dans les faits le démarrage est lent. Le retour à la production automobile succède à quatre années de fabrication exclusive de moteurs. Les moyens de production doivent être réadaptés. Il faut recruter une main- d'oeuvre qualifiée. Alors que les autres constructeurs ont maintenu pendant toute la guerre une activité dans le domaine de la fabrication de véhicules et conservé leurs relations techniques et commerciales avec leurs fournisseurs, Packard repart quasiment de zéro. Même si la demande est forte, le manque de disponibilité des matières premières freine les ardeurs des constructeurs, Packard compris.
Packard Custom Super Clipper, 1946 Les premières voitures de la série Custom apparaissent en avril 1946, et il faut attendre le mois de juin pour que toutes les versions soient réellement en fabrication. Officiellement, il s'agit de la 21ème série (18 ème en 1940, 19ème en 1941 et 20ème en 1942). Pour 1947, la gamme 1946 est reconduite, à l'exception de la Clipper Eight. La marque doit prendre garde à son environnement le plus proche, celui des autres constructeurs indépendants, même si ceux-ci ne visent pas tout à fait la même catégorie d'acheteurs. Studebaker vient de présenter une toute nouvelle génération de modèles. Kaiser Frazer est depuis 1946 un acteur qu'il faut prendre en considération. Le style ponton s'impose progressivement. Un vent de fraîcheur souffle sur l'industrie US. Cela ne peut que gêner Packard. Sa Clipper en est tout de même à sa quatrième saison après 1941, 1942 et 1946. Packard vit les prémices d'une lutte qui sera sans merci. Bientôt, les " big three " qui n'ont pas la même souplesse de réaction que les indépendants présenteront eux aussi leurs nouveautés d'après- guerre. Au classement des constructeurs, Packard perd progressivement du terrain. Si la marque se classe encore 14ème pour l'année calendaire 1946, elle n'est plus que la 16ème en 1947, même si sa production est en progression, avec respectivement 42 102 et 55 477 voitures.
Packard Custom Super Clipper, 1947 La 21ème série a tenu durant deux millésimes, 1946 et 1947. Avec cette 22ème série dont la commercialisation débute en septembre 1947, la Clipper Six disparaît, et avec elle la dernière motorisation 6 cylindres, sauf pour certaines compagnies américaines de taxis et quelques marchés d'exportation. La dénomination commerciale Clipper est abandonnée. Un Convertible (cabriolet) et un Station Wagon (break) s'ajoutent aux carrosseries de l'année précédente. Le Station Wagon reprend la majorité des emboutis de la berline. Les seuls éléments en bois n'ont rien de structurel, il s'agit du plancher du coffre et des parements fixés sur les portières. Ainsi, les breaks Packard sont infiniment plus solides que ceux de la concurrence en " tout bois ".
Packard Eight Station Wagon, 1948 Quand débute l'étude de cette 22ème série, on se rend bien compte que l'aspect des Packard commence à marquer le poids des ans. Un virage s'impose sur le plan stylistique, ceci d'autant plus que les rumeurs font état de la préparation chez Cadillac pour 1948 d'une carrosserie vraiment originale. L'époque est pourtant au resserrement des budgets. Des coupes sombres sont opérées au sein du bureau de style. Si bien que ce sont les designers de chez Briggs, le fabricant des caisses Packard depuis 1941, qui prennent le relais. Les modeleurs partent d'une base technique de Clipper du millésime précédent, avec pour consigne de réutiliser un maximum d'éléments structurels, afin de limiter les coûts de développement et d'industrialisation. La grille de calandre verticale jugée trop datée cède sa place à un ensemble abaissé, carré et d'une triste banalité. Par souci de modernité, le style ponton s'impose comme une évidence. La ceinture de caisse adopte donc une ligne continue entre les ailes avant et arrière. Le résultat ne fait pas vraiment l'unanimité. Les nouveaux emboutis génèrent une augmentation de poids de 90 kg, sans aucun intérêt fonctionnel. Cette nouvelle série s'articule autour de trois motorisations 8 cylindres en ligne, 288, 327 et 256 Ci, de cinq carrosseries, Sedan four doors, Sedan two doors, Station Wagon, Convertible et Limousine, de quatre empattements, 3.05, 3.23, 3.58 et 3.76 mètres, et de quatre niveaux de finition, Eight, Deluxe Eight, Super Eight et Custom Eight. Le Station Wagon n'est disponible que dans la série Eight, et le Convertible dans les séries Super Eight et Custom Eight. Sur le plan technique, l'attachement de Packard au huit cylindres en ligne ne tarde pas à conférer à la marque une image vieillotte.
Packard, 1948 Les Packard héritent auprès du public américain de surnoms peu flatteurs, au mieux on évoque à leur sujet une baignoire renversée (tout comme les Nash d'ailleurs), au pire une éléphante enceinte. Toujours admirées et respectées jusque-là de par leur suprématie même par ceux qui ne pouvaient pas s'en offrir une, les Packard deviennent subitement des objets de raillerie. Quel revirement de situation. Les fanatiques de la marque, encore nombreux, se sentent insultés par ces nouvelles formes. Mais le constructeur n'est pas là pour entretenir la nostalgie de quelques milliers de jusqu'au-boutistes. Quoi qu'il en soit, l'essentiel de la clientèle perçoit cette série comme une réelle nouveauté, même s'il s'agit d'un simple litfing. Un an plus tard, en novembre 1948, pour passer d'un millésime à l'autre à moindres frais, les concessionnaires sont invités à renvoyer à l'usine les plaques des numéros de série des voitures invendues. Elles sont réexpédiées vers les concessions quelques jours plus tard, avec le suffixe 9.
Packard Custom Eight Four Doors, 1948 L'apparence trompeuse des Packard 1948/49 sauve la face pendant quelque temps encore, car dans l'immédiat, le marché américain de l'automobile est euphorique, et toute nouveauté signée d'un grand nom trouve de nombreux acheteurs. Donc, assez paradoxalement, la 22ème série s'écoule encore à 145 441 exemplaires jusqu'en mai 1949, dont environ 92 000 sur le millésime 1948. Packard reste devant Cadillac, à la quatorzième position sur le marché US en 1948 et 1949. Bientôt, la tendance va s'inverser sévèrement. C'est la General Motors qui dès les années vingt a institutionnalisé l'idée du changement annuel. On parle aujourd'hui d'obsolescence programmée. Conduire la voiture de l'année et non pas celle du millésime précédent, même si les différences ne concernent que quelques détails d'aspect, et même si la voiture appartient à une société de location, est devenu un marqueur social fort. Bientôt, cette idée va s'exporter vers l'Europe. Packard qui a essayé de se tenir hors de ce jeu malsain est devenu un apprenti plutôt maladroit en y jouant aussi, contraint et forcé.
Packard Four Doors, 1948 Alvan Macauley, 76 ans en 1948, président de Packard de 1916 à 1939, puis président du conseil d'administration depuis cette date, prend sa retraite en mars 1948. Ce grand patron a profité des plus belles heures de gloire de Packard. Mais il a aussi su dans les périodes de crise démontrer son efficacité en osant prendre les décisions les plus hardies. Il a choisi de produire le moteur Rolls-Royce Merlin pendant la guerre, qui a équipé avec succès l'avion de chasse P-51 Mustang. C'est aussi lui qui a souhaité rendre accessible à un plus grand nombre les Packard. Son départ intervient à un moment où la vieille firme s'engage sur une pente irréversible.
Alvan Macauley Il reste pourtant un Macauley chez Packard. Le fils Edward a pris en 1932 la responsabilité du département style nouvellement créé, non pas en tant que " fils de ", mais pour ses qualités de gestionnaire et de concepteur. Son père a du évidemment faire face aux critiques qui n'ont pas manqué de surgir. Mais il savait que grâce à son fils, il pouvait garder un oeil sur le style Packard. Le style intéressait Alvan Macauley, mais ses responsabilités exécutives ne lui laissaient pas assez de temps pour jouer un rôle actif dans ce domaine. C'est sous la supervision d'Edward que sont donc nées les Packard d'après-guerre, et notamment cette 22ème série, avec un souci permanent de limiter tout réoutillage. Elle s'inspire pour ce qui est de la face avant du prototype Packard Brown Bombey de 1944 du même Edward Macauley. En France, les établissement Barbezat dont le magasin d'exposition est installé sur l'avenue des Champs-Elysées ont repris en avril 1946 l'importation des Packard. Ces sont 124 voitures qui sont écoulées en 1947, puis 78 en 1948. Ces chiffres attestent de la fidélité d'une certaine clientèle.
Packard Brown Bombey de 1944 La 23ème série apparue en mai 1949 ne bénéficie que d'un léger lifting. La finition DeLuxe Eight n'est plus proposée. Les Packard de cette série poursuivent sur leur lancée sans changement pour le millésime 1950. Cette années là, Packard propose en option l'Ultramatic, seule boîte automatique mise au point par un constructeur indépendant sans l'aide d'une firme spécialisée dans les transmissions.
Packard vante en 1950 les mérites de l'Ultramatic Drive Packard finira par entreprendre une révision complète des lignes pour 1951. Mais la firme se fourvoiera ensuite dans sa politique de modèles bon marché, allant jusqu'à proposer un " business coupe ". Lorsque l'offre et la demande s'équilibrèrent aux Etats-Unis, les Packard furent bien incapables de résister à la déferlante des " big three ". La marque disparaissait à l'issue du millésime 1958. |