REO, marque cousine d'Oldsmobile
REO était une marque automobile américaine fondée en 1904 par Ransom Eli Olds, un industriel à l'origine par ailleurs d'Oldsmobile en 1897. La marque REO se situait dans un segment de gamme assez proche d’Oldsmobile qui a intégré la General Motors en 1908. REO poursuivait une carrière en solo jusqu’en 1936, date à laquelle elle abandonnait la production automobile pour se consacrer à celle des poids lourds. Les débuts de REO Ransom Eli Olds (1864-1950) fonde la marque REO, qui reprend les initiales de ses nom et prénom, en 1904 à Lansing dans le Michigan, sept ans après avoir créé Oldsmobile. Olds détient 52 % des actions de la REO Motor Car Company, ainsi que les titres de président et de directeur général, ce qui doit logiquement le mettre à l’abri d’un départ forcé, comme ce qui s’est passé chez Oldsmobile. Le différend qui a provoqué ce départ a pour origine la volonté de Ransom Eli Olds de poursuivre la production de la Curved Dash, et de la volonté de l’actionnaire principal (Samuel L. Smith) de produire des voitures plus luxueuses. Paradoxalement, la firme REO se place sur ce marché de la voiture de luxe au début des années 30. Pour assurer à sa nouvelle marque un bon approvisionnement en pièces, Ransom Eli Olds crée un certain nombre de filiales, comme la National Coil Company, la Michigan Screw Company et l'Atlas Drop Forge Company.
Fondateur des firmes Oldsmobile et REO, Ransom Eli Olds est le premier à utiliser la ligne d'assemblage dans l'industrie automobile. Henry Ford l'adaptera trois ans après lui, à partir de 1908. A l'origine, la société doit s'appeler " R. E. Olds Motor Car Company ", mais les propriétaires de la marque Oldsmobile, alors appelée Olds Motor Works, s'opposent vigoureusement à ce projet, en brandissant la menace de poursuites judiciaires, en raison d'une possible confusion des noms par les consommateurs. Ransom Eli Olds change donc le nom de sa nouvelle société en REO Motor Car Company. Olds Motor Works adopte pour sa part le nom populaire de ses véhicules, Oldsmobile. Cette marque devient avec Buick et Cadillac une division fondatrice majeure de la General Motors en 1908. Le nom de la société fondée en 1904 par Ransom Eli Olds est orthographié alternativement en majuscules (REO) ou avec seulement une majuscule initiale (Reo), et la propre littérature de la société est confuse à cet égard, la première publicité utilisant toutes les majuscules, et la publicité ultérieure utilisant une seule majuscule. Rapidement, on se met d’accord au sein de la société pour l’orthographe REO, ce qui n’est pas si courant à l’époque, la plupart des marques américaines s’écrivant avec une seule majuscule. La production de la compagnie débute avec deux modèles différents, l'un équipé d'un moteur monocylindre, l'autre avec un bicylindre. La version monocylindre peut atteindre 45 km/h. Le moteur est monté horizontalement au milieu de la voiture sous les deux sièges. Malgré cette disposition peu commune, le véhicule présente à l'avant un élégant capot, factice naturellement, dont la fonction est strictement esthétique. REO lance en 1906 sa première quatre cylindres, la REO Four. Dès 1907, avec 4 000 voitures produites cette année là, REO s'inscrit comme étant le quatrième constructeur automobile aux Etats-Unis, derrière Ford, Buick et Maxwell, mais devant Oldsmobile.
Le lancement de la REO Four n'est pas un succès. Le constructeur se maintient sur le marché en concentrant son activité sur les modèles lancés en 1904, qui se comportent remarquablement bien jusqu'en 1911. La REO Four est remplacée en 1911 par une nouvelle quatre cylindres plus puissante de 3 700 cm3, la REO Five. Celle-ci est à l'origine d'un processus de rénovation de la gamme qui va en peu de temps aboutir au remplacement des modèles originaux. Le modèle M produit de 1916 à 1920, première six cylindres du constructeur, permet à REO de se positionner sur le créneau des marques intermédiaires aux côtés notamment de Buick.
En 1916, apparaît la première six cylindres de la marque, le modèle M, mais celle-ci disparaît en 1918. Au lendemain de la guerre, REO ne produit qu’une quatre cylindres, mais en 1920 est proposée une nouvelle six cylindres de 5 litres, le modèle T, évolution du modèle M. Cette voiture de ligne agréable remporte un succès remarquable grâce par ailleurs à ses bonnes performances et à son prix modéré.
Le modèle T de 1921 s'inscrit dans la lignée du modèle M, avec une cylindrée accrue Après 1908, malgré l'introduction de voitures améliorées par Ransom Eli Olds, la part de REO sur le marché automobile américain commence à s'estomper, en raison notamment de la concurrence d'entreprises émergentes et puissantes, comme Ford ou la General Motors. En 1910, REO ajoute une division de production de camions et une usine de voitures au Canada. Le développement de REO En 1912, Ransom Eli Olds affirme qu’il a construit la meilleure voiture du monde, une voiture de tourisme pouvant accueillir deux, quatre ou cinq passagers selon les versions. Elle dispose d'un moteur de 30 ch ou 35 ch, pour 1 055 dollars, hors toit, pare-brise et réservoir d'essence, qui coûtent 100 dollars supplémentaires. Handicapée par le prix un peu surestimé de ses véhicules , la marque REO ne reviendra jamais dans le peloton de tête des constructeurs américains.
Publicité de 1913. L'automobile est encore un produit jeune, et REO tente de se faire une place parmi les nombreux constructeurs qui envahissent ce marché porteur. En 1915, alors que REO ne fabrique que 15 000 voitures, contre environ 41 000 Studebaker, 43 000 Maxwell, 44 000 Buick, 45 000 Dodge, 92 000 Willys et 501 000 Ford, Ransom Eli Olds cède son titre de directeur général à son protégé Richard H. Scott. Huit ans plus tard, il met fin également à son mandat de président de la société, conservant le poste de président du conseil d'administration. L'épisode REO le plus célèbre de cette époque est le voyage transcanadien de 1912 à bord d'une voiture de tourisme de la marque. Un mécanicien maison connu pour son expertise, Jack Haney, fait le trajet en compagnie du journaliste Thomas W. Wilby. Ce sont 6 720 km qui sont parcourus, entre Halifax en Nouvelle-Écosse, et Vancouver en Colombie-Britannique.
Pour Anney et Wilby, cette traversée du Canada est une véritable aventure. Quand les routes existent, elles sont en très mauvais état. En 1923, la marque propose un véhicule récréatif appelé " Motor Pullman Car " qui anticipe les futurs camping-cars. Conçue par Battle Creek, l'automobile comprend une extension de couchage rabattable, une cuisinière à gaz intégrée et un réfrigérateur ! En 1925, Scott, comme beaucoup de ses concurrents, lance un ambitieux programme d'expansion, conçu pour rendre l'entreprise plus compétitive par rapport aux autres constructeurs automobiles américains, en proposant notamment des voitures dans différentes gammes de prix.
De 1915 à 1925, sous la direction de Scott, l’entreprise REO reste rentable, non seulement grâce aux voitures mais également aux camions. L'échec de ce programme et les effets de la Grande Dépression déclenchée en octobre 1929 par le crash de Wall Street causent de telles pertes que Ransom Eli Olds met fin à sa retraite en 1933 pour reprendre le contrôle de REO à l’âge de 69 ans. Il en démissionne en 1934. A l’époque, le volume de production de la marque n’excède pas 5 000 unités par an, contre 33 000 en 1927, 23 000 en 1928 et 16 000 en 1929. Après une tentative ratée de fusion avec le constructeur Graham-Paige en 1935, REO abandonne la fabrication de voitures en 1936 pour se concentrer sur celle des camions. Les deux voitures les plus emblématiques de REO Entre 1927 et 1936, la marque REO est positionnée dans la hiérarchie des marques américaines entre les Ford, Chevrolet, Plymouth d’une part, et les Lincoln, Cadillac, Packard d’autre part. En milieu de gamme, elle fait face à Buick, Oldsmobile, Dodge, Chrysler et Studebaker. Les deux voitures les plus emblématiques de REO sont la Flying Cloud lancée en 1927, et la Royale commercialisée en 1931. La Flying Cloud qui remplace le modèle T est une berline dotée d’un moteur six cylindres de 3 735 cm3, équipée pour la première fois d’un nouveau système de freins hydrauliques de marque Lockheed. Plus subtilement, la Flying Cloud peut s’enorgueillir d’avoir changé la façon dont les automobiles seront nommées par la suite.
Lancée en 1927, la REO Flying Cloud six cylindres est l’une des premières voitures américaines à adopter une appellation commerciale non chiffrée, une stratégie qui va se développer tout au long des années 30 et 40. En 1927, REO ressuscite également la marque de voitures Wolverine avec un modèle proche de la Flying Cloud, mais moins cher. Avec un moteur Continental, des roues artillerie et un motif différent de grille de radiateur, la Wolverine est un échec commercial et disparaît dès 1928.
La REO Flying Cloud reçoit une carrosserie aux angles moins vifs en 1931. Cette année-là, la marque voit ses ventes tomber à 6 000 unités, contre 12 500 en 1930 et 16 000 en 1929. Le problème pour REO est que la chute de ses ventes a commencé un an avant le crash de Wall Street. La REO Royale 8 est de son côté une grande berline dotée d’un huit cylindres de 5 867 cm3. La marque croit bon d’ajouter un modèle appelé Royale 6 doté du moteur plus petit de la Flying Cloud, afin d’élargir sa clientèle. La REO Royale avec ses deux motorisations six cylindres et huit cylindres est commercialisée jusqu’en 1935.
Lancée en 1931, la REO Royale huit cylindres attaque le gratin de l’industrie automobile américaine. Le problème est que le moment est mal choisi, car on est en pleine crise économique. Les ventes de la marque continuent de baisser en 1932, avec environ 4 000 voitures écoulées. Beverly Rae Kimes, éditeur du Standard Catalog of American Cars, qualifie la Royale huit cylindres de " la plus fabuleuse REO de toutes ". En plus de sa carrosserie réalisée par Murray, cette voiture offre un huit cylindres en ligne de 125 ch, un vilebrequin à neuf paliers, une lubrification unique et des volets de radiateur à commande thermostatique. A partir de 1933, la Royale est disponible en option avec la transmission semi-automatique de REO, la Self-Shifter. Le modèle 8-31 (empattement court) châssis nu est vendu au prix de 2 145 dollars. Le modèle 8-35 (empattement long) châssis nu vaut 2 745 dollars. Les voitures carrossées coûtent près de 6 000 dollars.
La REO Royale proposée avec un six cylindres ou un huit cylindres ne parvient pas à relancer les ventes du constructeur. Le nom Royale est abandonné en 1935, laissant le champ libre aux Chrysler Royal. Ne reste que la Flying Cloud au catalogue de la marque de Lansing.
Lancée en 1934, la nouvelle REO Flying Cloud change du tout au tout, et adopte une carrosserie aérodynamique que partagent les Graham Paige, suite à un accord entre les deux constructeurs. Les ventes de REO se stabilisent à 4 700 unités en 1935, contre 4 500 en 1934 et 4 900 en 1933. Les REO Royale sont considérées aujourd’hui comme des grands classiques de l’industrie automobile américaine. A noter que le nom Royal (sans e) est choisi à partir de 1933 par la firme Chrysler pour nommer l’un de ses modèles, cette appellation ayant subsisté jusqu’en 1950. Et bien sûr, le nom Royale a été utilisé par Ettore Bugatti pour nommer ses voitures les plus chères, les Type 41, fabriquées entre 1926 et 1931.
Après 3 200 derniers exemplaires produits en 1936, la marque de Lansing stoppe définitivement la fabrication de voitures. REO pendant et après la Seconde Guerre Mondiale Pendant la Seconde Guerre Mondiale, REO assemble un certain nombre de camions Studebaker US6 sous licence, même si l'essentiel de la production est assurée par Studebaker. Les versions REO sont quelque peu différentes des versions Studebaker d’origine, avec des poignées de porte spécifiques et un moteur plus puissant. On estime que REO en a produit environ 20 000 unités, et contrairement aux camions Studebaker d'origine, qui ont été utilisés par l’armée américaine, les versions REO ont été exportées en masse vers l'Union Soviétique.
Le constructeur REO survit aux années de guerre en produisant des poids lourds sous licence Studebaker, dont nombre sont exportés vers l'Union Soviétique. Bien que les commandes de camions pendant la Seconde Guerre mondiale lui aient permis dans une certaine mesure de se relancer, la firme REO reste fragile au cours des premières années d’après-guerre, entraînant une nouvelle réorganisation de la société pour éviter la faillite.
En 1952, Santa Claus livre les jouets aux enfants américains grâce aux tracteurs REO En 1954, la société est toujours instable, et elle décide de vendre ses activités de fabrication de camions à l’entreprise Bohn Aluminium and Brass Corporation de Detroit. Trois ans plus tard, en 1957, l'usine de fabrication de véhicules de REO devient une filiale de la White Motor Company spécialisée dans la production de camions. White fusionne REO avec Diamond Trucks en 1967, pour former la division Diamond Reo Trucks. En 1975, cette société dépose son bilan, et la plupart de ses actifs sont liquidés. Volvo reprend ensuite White, et détient donc actuellement les droits sur la marque REO. Epilogue Après avoir vendu les activités de fabrication de véhicules de REO, la direction commence à liquider le reste de l'entreprise. Pour des raisons fiscales, un groupe d'actionnaires conteste avec succès en 1955 la liquidation, et force REO à racheter une petite société de services appelée Nuclear Consultants, dans le cadre d'une prise de contrôle inversée. La Nuclear Corporation of America qui en résulte se diversifie peu à peu, et achète d'autres sociétés, pour devenir un conglomérat s'étendant dans un éventail de domaines très différents, notamment la fabrication de logements préfabriqués et de poutres d'acier, en plus des services. La plupart de ces affaires se soldent par des échecs, et l'entreprise fait de nouveau faillite en 1966. Après une nouvelle réorganisation, seule l'entreprise prospère de poutres d'acier subsiste. Elle s'intéresse à la production d'acier recyclé sous le nom de Nucor. Le fondateur de REO, Ransom Eli Olds, décède le 26 août 1950. Quant à la marque Oldsmobile, filiale du groupe General Motors, elle disparaît en 2004.
Texte : Jean-Michel
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