Panther, symphonie inachevée
Panther était un constructeur britannique, réalisant des véhicules atypiques pour une clientèle marginale mais fortunée, à la recherche d’une voiture capable de se distinguer des autres. Créée en 1972, la marque Panther a cessé ses activités en 1990. Les débuts de la marque Panther La firme Panther est créée en 1972 par Robert Jankel, à quelques pas du circuit de Brooklands, dans le Surrey. La spécialité de cette entreprise est la fabrication artisanale de voitures sportives et luxueuses de style rétro, basées sur des modèles de grande série contemporains. La marque se positionne à mi-chemin entre Morgan et Excalibur, sur un segment de marché qui sera bientôt occupé par d’autres artisans qui proposent des modèles inspirés des années 1930, comme Clénet, Classic Motor Carriages, Diamante, Spartan ou Zimmer, ou par d'autres qui fabriquent des répliques plus fidèles de voitures anciennes comme Sbarro, Stimula, Elite Heritage, etc ... La demande pour ce type d'automobile ne va cesser de croître dans les années 70 et 80. 1972 : Panther J72 Le premier modèle Panther est lancé en 1972. Il s’agit de la J72, un roadster deux places avec ailes apparentes et phares séparés, qui s’inspire des anciennes Jaguar SS 100, un modèle vendu à 310 exemplaires entre 1935 et 1940. La réplique de Panther possède une carrosserie en aluminium et un intérieur en cuir. Elle est proposée avec des moteurs Jaguar six cylindres de 3,8 litres (265 ch), 4,2 litres (265 ch) et douze cylindres de 5,3 litres (290 ch). La J72 s’écoule à 376 exemplaires entre 1972 et 1981, faisant même mieux que le modèle original. On a vu de nombreuses célébrités à son volant.
Lancée en 1972, la Panther J72 est un roadster au style rétro propulsé par des moteurs Jaguar, à six ou douze cylindres. Une belle carte de visite ! 1974 : Panther FF En 1974 est lancée la Panther FF, pour Felber Ferrari, dotée d'un moteur Ferrari Colombo V12 de 4,0 litres de 300 ch. La carrosserie, qui adopte toujours un style rétro, est totalement différente de la J72. Le style évoque cette fois les anciennes voitures de sport Allard type 2/J2X vendues à 149 exemplaires entre 1950 et 1954. La calandre rappelle celle de la Lotus Seven, une auto qui s’est immiscée à sa façon depuis 1957 sur le marché de la voiture sportive. Mais un prix excessif, et la crise économique consécutive au choc pétrolier de 1973, empêchent la voiture de se vendre correctement. Seulement sept exemplaires sont fabriqués.
Lancée en 1974, la Panther FF est un roadster au style différent de la J72 et équipé d’un moteur Ferrari, à douze cylindres. 1974 : Panther Lazer En 1974, Panther dévoile une autre voiture sportive, la Lazer. Ce modèle au design futuriste produit à un seul exemplaire a été conçu à la demande de l’importateur canadien de la marque. Celui-ci souhaitait que Robert Jankel construise une automobile unique comme cadeau pour sa femme. La voiture emprunte son moteur, sa boîte de vitesses, sa suspension indépendante et son système de freinage à la Jaguar XJ 12. C'est un étrange véhicule à trois places de front avec une carrosserie en aluminium et un aileron arrière proéminent. Livrée en août 1974, la Lazer est rapidement renvoyée dans les locaux britanniques de Panther, où elle reste parquée pendant quelques années avant d'être revendue au prince héritier d'Iran, Reza Pahlavi, qui n'est alors encore qu'un adolescent. Elle est désormais exposée au Musée national de l'automobile d'Iran.
Dévoilée en 1974, la Panther Lazer est un roadster d’allure futuriste pour un client unique, mais cette automobile n'aura pas le succès escompté auprès de sa destinataire, et sera retournée rapidement à l’envoyeur … 1974 : Panther De Ville Toujours en 1974, Panther dévoile la limousine De Ville, dont le nom est emprunté à l’univers Cadillac et le style de la carrosserie à la … Bugatti Royale, excusez du peu. Dessinée par Robert Jankel, la voiture dotée d'une mécanique Jaguar, un six cylindres de 4,2 litres ou un douze cylindres de 5,3 litres, est proposée en deux versions de carrosserie : limousine ou cabriolet. La De Ville est comme les Bugatti équipée d’une calandre en fer-à-cheval, et d’un habitacle somptueux avec tout le confort des années 1970, et même plus : sellerie en cuir Connolly, profusion de bois précieux, climatisation, autoradio, boite de vitesses automatique, vitres électriques. A cela s’ajoute, en option, un toit ouvrant électrique, un téléphone, la télévision et un minibar.
Lancée en 1974, la Panther De Ville est une somptueuse limousine au style rétro, nettement inspirée par la Bugatti Royale, mais les portes proviennent plus prosaïquement d’une Austin 1800 … La voiture sans option coûte deux fois plus cher qu’une Rolls-Royce Silver Shadow. Malgré cela, 46 limousines et 11 cabriolets trouvent preneur entre 1974 et 1982. Elton John et Oliver Reed ont compté parmi les clients de Panther. Une limousine à six portes a été produite en un exemplaire unique pour un prince du Moyen-Orient. 1975 : Panther Rio En 1975, alors que la crise économique bat son plein, Robert Jankel commercialise la Panther Rio en forme de réponse à la conjoncture ambiante. Son souhait est de proposer tout le luxe d’une Rolls-Royce dans une berline compacte. En quelque sorte, il s'agit de faire du Vanden Plas en mieux, cette marque ne proposant alors que la 1500 basée sur l’Austin Allegro. Les tractations avec la British Leyland, propriétaire de Triumph, débouchent sur un accord pour embourgeoiser la Dolomite, une berline compacte lancée en 1972. La voiture reçoit une nouvelle face avant inspirée des Rolls-Royce, le reste de la carrosserie évolue également pour se démarquer du modèle original.
Lancée en 1975, la Panther Rio est une Triumph Dolomite amplement modifiée pour se situer au niveau des berlines les plus luxueuses. Mais la mayonnaise ne prendra pas … Au final, la Rio équipée d'un moteur Triumph 1 850 cm3 de 92 ch ou 1 998 cm3 de 129 ch coûte trois fois le prix d’une Dolomite de série. Son prix est supérieur à celui d'une bien plus représentative Jaguar XJ 12, alors que la Rio a plus l'aspect d'une concurrente de l'Humber Sceptre bien moins chère. Le tarif excessif de la Rio limite ses ventes. En effet, elle ne séduit que 38 acheteurs entre 1975 et 1977. 1976 : Panther Lima En 1976, apparaît la Panther Lima qui reprend le thème rétro des roadsters J72 et FF, mais en s’inspirant cette fois des Bugatti sportives d’avant-guerre. Concurrente des Morgan, la Panther Lima est un petit roadster long de 3,61 mètres ne dépassant pas 900 kilos, ce qui lui procure de bonnes performances (180 km/h). Son moteur quatre cylindres de 2,3 litres est emprunté à la Vauxhall Magnum. Il développe 110 ch, ou 180 ch avec un turbocompresseur. La cellule centrale est issue de la MG Midget, qui offre tout son habitacle, du pare-brise jusqu’aux portes. La Lima dont la carrosserie est fabriquée en fibre de verre devient le modèle d’entrée de gamme de la marque, qui souhaite élargir ainsi sa clientèle. Et les résultats commerciaux valident la stratégie du constructeur, puisque 897 exemplaires sont vendus entre 1976 et 1982.
Lancée en 1976, la Panther Lima est diffusée en France par Jacques Savoye, également importateur de la marque Morgan. 1977 : Panther Croisette En 1977, un exemplaire unique de la Panther Croisette est assemblé dans l’usine de la marque. Dessiné par Felber, ce modèle se présente sous la forme d’un break de chasse établi sur la Ferrari 365 GT4, dont toute la partie avant et centrale est conservée. Cette voiture apparaît mal proportionnée, ce qui représente presque un crime de lèse-majesté par rapport au dessin initial si pur de Pininfarina.
La Panther Croisette est un break de chasse basé sur le coupé Ferrari 365 GT4 2+2, bientôt rebaptisé 400. Cette automobile produite en un seul exemplaire n'est pas restée dans les mémoires. 1977 : Panther Six La Panther Six de 1977 est un extravagant cabriolet à six roues, dont quatre sont positionnées à l’avant et deux à l’arrière. Le modèle est équipé d’un moteur Cadillac V8 de 8,2 litres situé en position centrale, derrière l’habitacle. C’est la première fois que la firme Panther fait appel à un moteur d’origine américaine pour propulser l’un de ses modèles. La carrosserie est très moderne, à des années-lumière de la Lima. Seulement deux exemplaires sont fabriqués. On peut se demander quel intérêt peut bien susciter un tel modèle doté de deux paires de roues avant plus petites que la paire de roues arrière … L’engin équipé d'un téléphone et d'une télévision au tableau de bord reste sans conteste un concept car plutôt étrange.
La Panther 6 est un pur délire de designer, avec ses six roues, dont quatre à l’avant et deux à l’arrière. Son moteur est un énorme V8 Cadillac placé en position centrale. Ce modèle fabriqué à deux unités laisse franchement dubitatif. La firme Panther connaît d’importantes difficultés financières dès la fin des années 70, et s’effondre en 1980, après le second choc pétrolier. L’entreprise est alors rachetée par le coréen Young Chull Kim (Jindo Industries), et la production des J72, De Ville et Lima redémarre en 1981. Cette année-là, apparaît la Panther Brooklands qui ne survit que deux ans, et qui n'est qu'une J72 à peine modifiée. 1982 : Panther Kallista La Kallista apparaît en 1982. Elle succède à la Lima, dans un style qui à l'exception de quelques détails reste le même. Mais le modèle repose désormais sur une base Ford Europe et non plus Vauxhall. Les moteurs sont des Ford 1,6 litre et 2,8 litres. Seul le 2,8 litres V6 sera effectivement commercialisé. La Kallista représente en 1983 la quasi-totalité des ventes de Panther, puisque les Lima et De Ville ne sont plus produites depuis 1982. Au total, 1 437 exemplaires sont vendus entre 1982 et 1990, ce qui constitue le plus gros succès commercial de ce petit constructeur.
Lancée en 1982, la Panther Kallista succède à la Lima. Sous un style très proche, le modèle troque sa plateforme Vauxhall contre une plateforme Ford Europe. En 1987, Jindo Industries vend sa participation dans la Panther Car Company au constructeur coréen Ssangyong. Pour répondre à la demande de Kallista, une seconde usine est ouverte en 1988 à Harlow dans l’Essex, tout en poursuivant la production à Brooklands, mais cette initiative ne permet pas de relancer l'affaire. Panther n’a plus que deux ans à vivre. 1989 : Panther Solo La Panther Solo conduit le constructeur dans un autre registre, celui des voitures de sport modernes. C'est la dernière voiture conçue et produite chez Panther. Issue d’un prototype présenté en 1984, la Solo à carrosserie en fibre de verre abandonne le style rétro pour des formes franchement contemporaines, avec moteur central et phares rétractables, dans l'esprit de la Lotus Elan M100 commercialisée de 1989 à 1995, ou de la deuxième génération de Toyota MR, disponible entre 1989 et 1999. Le quatre cylindres 2 litres de 204 ch est emprunté à la Ford Sierra RS Cosworth. L’objectif du constructeur est d’en vendre entre 1 500 et 2 000 par an. Mais le rachat de Panther par Ssangyong vient perturber les plans, car l'industriel coréen n'a pas les moyens ni la volonté de produire le nouveau modèle. Seulement une vingtaine d’exemplaires sont vendus jusqu’en 1990, entraînant la disparition de la marque Panther.
Lancée en 1989, la Panther Solo au style ultramoderne n’a pas connu la carrière qu’elle méritait. Le rachat de Panther par Ssangyong a fini par tuer la Solo qui ne s’est vendue qu’à une vingtaine d’exemplaires. Epilogue Ssangyong décide de reprendre en 1992 la fabrication de la Kallista sous son propre logo. 78 exemplaires seulement sont diffusés sous cette marque. Une Solo dotée d’un six cylindres de 3,2 litres est présentée au Salon de Séoul 1995, mais aucune suite n’est donnée à ce projet. En 1999, Ssangyong connaît à son tour des difficultés financières et est repris par Daewoo. Robert Jankel rachète le nom Panther en 2001, mais il décède quatre ans plus tard, alors qu’il finalise une nouvelle voiture de sport. Son fils avoue alors que l’aventure Panther reste une symphonie inachevée.
Texte : Jean-Michel Prillieux Voir aussi : http://leroux.andre.free.fr/ukpanther.htm |
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