Maxwell, l'ancêtre de Chrysler


Maxwell était une marque automobile américaine créée en 1904 qui fut pendant plusieurs années le troisième constructeur américain derrière Ford et Buick. Rachetée par Walter Percy Chrysler en 1923, la marque Maxwell est supprimée en 1925 au profit de Chrysler qui sera à l’origine de la formation du groupe du même nom et qui deviendra lui aussi le troisième constructeur américain derrière General Motors et Ford.


 Les débuts de Maxwell


Jonathan Dixon Maxwell est né en 1864. Il débute sa carrière professionnelle en tant que réparateur de cycles à Kokomo (Indiana) dans l'atelier des frères Elmer et Edgar Apperson. C'est là qu'il conçoit en 1894 avec les deux frères Apperson et Elwood Haynes la première automobile produite aux Etats-Unis. Ceux-ci fondent en 1896 la Haynes-Apperson Company, l'une des premières usines automobiles américaines. De son côté, Maxwell suite à un différend avec ses associés préfère reprendre sa liberté, et rejoint dans un premier temps Ransom Eli Olds, fondateur de la marque Oldsmobile, puis l'ingénieur Charles Brady King au sein de la Northern Manufacturing Company, avec qui il conçoit la Silent Northern, première automobile avec un ensemble moteur / transmission intégré, et aussi première voiture américaine dotée de marchepieds latéraux.

La première voiture américaine de la marque Haynes-Apperson est exposée de nos jours à la Smithsonian Institution à Washington. Jonathan Dixon Maxwell a participé à sa conception.

En 1903, Benjamin Briscoe, prospère métallier à Detroit (fournisseur à ce titre de la Northern Manufacturing Company), propriétaire de la Briscoe Manufacturing Company, et actionnaire chez Buick, a le projet de construire lui-même des automobiles. Il prend contact avec Jonathan D. Maxwell, qui est convaincu que l'avenir de l'automobile passera par des véhicules simples, fiables et robustes. En effet, à cette époque, la plupart des routes américaines ressemblent encore à des pistes, où il ne faut pas craindre de s'enliser.

Comme Henry Ford, Maxwell a la conviction qu'il faut en finir avec l'artisanat. La réduction des coûts passe par une industrialisation massive, qui exige des capitaux. Benjamin Briscoe vend les actions qu'il possède chez Buick, lance un emprunt auprès de la banque J.P Morgan, et parvient à intéresser quelques investisseurs privés. Maxwell entreprend l'étude d'une automobile inspirée par son travail sur la Silent Northern. Une toute nouvelle usine voit le jour en 1904 à Tarrytown, dans l'Etat de New York : La Maxwell-Briscoe Motor Company.

La première Maxwell, la type L de 1905, est un runabout à deux places équipé d'un deux cylindres à plat de 8 ch. Avec 823 voitures produites cette année-là, Maxwell est déjà huitième au classement des constructeurs américains, qui compte une centaine de marques. En 1906, la gamme s’élargit avec un choix de cinq carrosseries et deux moteurs dont un nouveau quatre cylindres de 40 ch. En 1907, un incendie détruit l’usine de Tarrytown et la compagnie décide de s'installer dans des locaux plus grands, situés à New Castle dans l’Indiana. Cette implantation forme alors la plus vaste usine automobile des Etats-Unis,  même si ce record sera vite dépassé. Maxwell produit cette année-là 3 785 voitures, et est propulsé à la quatrième place des constructeurs américains. 

L'usine Maxwell de New Castle sera utilisée par le groupe Chrysler de 1924 à 2004

Une crise financière en 1907 conduit plusieurs actionnaires de Maxwell à se désengager. La période est critique pour Briscoe, qui doit trouver les financements nécessaires à la poursuite de la construction de l'usine de New Castle. Cet investissement est indispensable à la pérennité de la marque qui comme d'autres doit grandir pour survivre. Pour obtenir de meilleures conditions auprès des banquiers, Briscoe tente de fédérer sous une même bannière plusieurs constructeurs automobiles. Des premières négociations entamées avec Ford, Buick ou Reo n'aboutissent pas.

Il choisit donc en 1910 de fonder sa propre holding, la United States Motor Company (USMC) qui regroupe une dizaine de marques automobiles américaines et qui est une réponse directe à la création en 1908 avec les mêmes objectifs de la General Motors. La USMC propose plus d’une cinquantaine de modèles différents. C'est trop. Une rationalisation du catalogue et des coûts s'impose. Certaines marques n'y survivront pas.

En 1912, à la suite d’une mésentente avec ses actionnaires concernant les économies à réaliser, Briscoe se retire de l'USMC, qui regroupe à cette date (entre autres) les marques Maxwell, Stoddard-Dayton, Chalmers et Flanders. Il est justement remplacé par Walter Emmett Flanders, dirigeant de la marque portant son nom, dont l'existence fut brève, de 1910 à 1913. Cette même année, Maxwell quitte la marque qu'il a fondée. Celle-ci est complètement fragilisée par des résultats financiers catastrophiques.

Flanders a fait ses preuves chez Ford entre 1906 et 1908, où il travaillé à une réduction massive des dépenses superflues. Au sein de l'USMC, il entreprend de réorganiser les usines, d'uniformiser les productions, et d'orienter celles-ci vers des modèles plus accessibles en ayant recours à des mécaniques 4 cylindres, voire des camions, secteur dans lequel à défaut de prestige les marges sont plus importantes.   


Le développement de Maxwell


Au sein du groupe USMC, la marque Maxwell va se développer rapidement et prendre une place prépondérante dans l’association. Elle n’hésite pas à pratiquer de sensibles baisses de prix de ses modèles pour accroître ses ventes sur le marché américain, face à Ford qui pratique la même politique. Le volume de production de Maxwell passe ainsi de près de 8 000 unités en 1912 à 16 198 en 1913, 23 587 en 1914, 44 625 en 1915, 74 689 en 1916 et 75 748 en 1917. C’est en 1913 qu’est lancée la première six cylindres Maxwell qui illustre l’éphémère montée en gamme du constructeur.

Le groupe USMC doit faire face à l'autre géant qu'est la General Motors initiée par William C. Durant. Celui-ci est parvenu à convaincre des constructeurs autrement plus importants de l'intérêt de se regrouper, en particulier Buick, Oldsmobile et Cadillac. Mais Maxwell qui se porte bien se permet de racheter la marque Chalmers et son site de Detroit.

Pendant quelques années, la marque Maxwell reste en troisième position sur le marché américain derrière Ford et Buick, mais elle se fait dépasser par Chevrolet et Dodge à la fin des années 1910. Imitant alors la politique de Ford, Maxwell concentre sa production sur un seul modèle, le Type 25 né en 1914, qui va être proposé jusqu’en 1924, même si ce modèle quatre cylindres de 3 litres de milieu de gamme va évoluer en matière de carrosserie, de puissance et de longueur d’empattement tout au long de sa carrière.

Introduite en 1914, la Maxwell Model 25 ciblait essentiellement Ford et son Model T.  Elle fut la seule voiture produite par la marque pendant une dizaine d’années, imitant la politique de Ford du modèle unique dont le prix baissait régulièrement. Elle fut produite au total à 495 000 exemplaires.

Le volume de production tombe 34 000 unités en 1918, avant de remonter à 47 408 en 1919 et de retomber à 22 355 en 1920 et 15 706 en 1921. Les soubresauts de l'économie américaine viennent une fois de plus de frapper. L'inflation est forte, le prix des matières premières ne cesse de varier. Les fournisseurs peinent à produire des pièces de qualité, car ils subissent eux-mêmes la raréfaction des matières premières et composent avec ce qui est disponible sur le marché. Grâce aux modifications apportées au Type 25 (puissance du moteur augmentée, empattement plus long, choix élargi à dix carrosseries différentes), le volume de production remonte à 48 850 unités en 1922, 58 313 en 1923 et 49 857 en 1924.

Entre-temps, un homme providentiel a été appelé par les actionnaires de l'USMC. Il s'agit de Walter Percy Chrysler (1875-1940) qui avait occupé le poste de dirigeant de la marque Buick après la formation du groupe General Motors en 1908 et qui avait alors complètement révolutionné le système de production de l’usine Buick de Flint, introduisant des processus de chaînes de montage mis au point par Henry Ford qui ont permis de tripler son volume de production.


 Disparition de la marque Maxwell


En 1925, Walter Percy Chrysler fait disparaître la marque Maxwell et ce qui restait de la United States Motor Company. La Maxwell Type 25 devient alors la Chrysler Four toujours motorisée par le moteur Maxwell quatre cylindres de 3 litres développant 40 ch. Walter P. Chrysler voulait en effet depuis le rachat de Maxwell créer sa propre marque et pourquoi pas fonder un groupe concurrent de Ford et General Motors. Chrysler arrivera à ses fins en créant la marque portant son nom, mais également celles de Plymouth et De Soto de gamme inférieure en prix, et en rachetant la marque Dodge qui était alors un acteur important sur le marché américain.

La Maxwell Model 25 devient la Chrysler Four en 1925, après quelques retouches. Alors que Maxwell ciblait la marque Ford, Chrysler va progressivement cibler la marque Buick plus haut de gamme et placera la marque Plymouth sur le marché de Ford à partir de 1928.

Avec ces quatre marques, Chrysler devenait le troisième constructeur américain derrière General Motors et Ford. Il devenait en même temps le troisième constructeur mondial et le restera jusqu’en 1976, sauf durant les années 1961 et 1962 où le style baroque des voitures dessinées par Virgil Exner fut boudé par une partie de la clientèle et où Volkswagen réussit à devenir pendant ces deux années le troisième constructeur mondial, grâce notamment au succès de sa Coccinelle sur le marché américain.

Texte : Jean-Michel Prillieux
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