Marcos, un parcours chaotique


Marcos est une marque britannique de voitures de sport créée en 1959. La marque, dont le nom est formé à partir des premières lettres des noms de ses fondateurs Jem Marsh et Frank Costin, acquiert une certaine notoriété dans le milieu de la compétition. Elle disparaît en 2007.


Les débuts de Marcos


En 1948, Jeremy (" Jem ") Marsh, alors âgé de 18 ans, construit sa propre voiture sur une base d’Austin Seven. Puis il devient négociant de pièces automobiles. En 1959, il fait la connaissance de Francis (" Frank") Costin, un ingénieur qui a travaillé chez l’avionneur De Havilland et chez Lotus. C’est son frère Mike Costin qui l’a fait rentrer chez Lotus, ce dernier étant l’un des principaux collaborateurs de Colin Chapman, fondateur de la marque. Mike Costin créera l’entreprise Cosworth en 1958.

Frank Costin travaille sur les voitures de compétition de marque Vanwall - une marque créée par Tony Vandervell - qui obtiennent quelques succès sur les circuits. L’association de Jem Marsh et Frank Costin se forme donc en 1959, avec pour objectif de proposer une petite voiture de sport à un tarif imbattable.

Frank Costin qui a travaillé pendant la Seconde Guerre mondiale sur le De Havilland Mosquito réputé très léger, pense pouvoir s’inspirer de sa conception spécifique dans le domaine automobile. Comme cet avion, la voiture imaginée par les deux hommes est dotée d’une structure en bois, recouverte d’une peau en contreplaqué. Comme pour Lotus, le souci de Marcos est de réduire drastiquement le poids des voitures.

La GT n'était pas vraiment belle avec son aspect de batracien boursouflé, son habitacle bulbeux au pavillon haut perché, ses ailes avant de bicyclette et sa minuscule entrée d'air frontale.

La Marcos GT (ou Xylon) est dotée d’un train avant de Triumph Herald et d’un train arrière de Standard Ten. Son moteur provient de la Ford Anglia contemporaine. Le style de la voiture est assez particulier et peu harmonieux. Elle se vend à 9 exemplaires, et est remplacée en 1961 par la Gullwing. Celle-ci est proposée avec différentes carrosseries  : coupé, cabriolet et fastback. Elle est surtout vendue en kit à monter soi-même, ce qui augmente sensiblement le volume de sa clientèle, qui bénéficie ainsi de l’exonération de la TVA. Elle acquiert une bonne réputation en raison de ses différents succès en compétition.

Malgré cela, Frank Costin quitte l’entreprise en 1961, après un différend avec Jem Marsh concernant le design des futurs modèles. En 1963, la GT est redessinée d’après les souhaits de Jem Marsh qui obtient finalement gain de cause.


1964 : Marcos 1800 GT


Avec l’apparition de la 1800 GT en 1964, la firme Marcos passe du stade d’artisan à celui de véritable constructeur. La silhouette de la voiture est remarquable, et tranche avec les modèles précédents. Il y a un peu d’Iso Grifo dans cette ligne basse (1,05 mètre) et musculeuse. Les phares sont dissimulés sous des globes en plexiglas, et la poupe rebondie s’achève sur un arrière tronqué.

Alors que le châssis est réalisé en contreplaqué de bois, la carrosserie est en fibre de verre, comme certaines sportives de l’époque (Alpine, CG, René Bonnet, DB Panhard). Contrairement à ce que laisse supposer sa silhouette, la 1800 GT est très courte, pas plus de 4,07 mètres sur 1,59 mètre de large. Son moteur situé à l’avant est un 1 780 cm3 de 100 ch d’origine Volvo, monté sur le coupé Volvo P1800 (1961-1973). Sa puissance est portée à 115 ch en décembre 1964. La voiture ne pesant que 820 kilos, cette mécanique procure un rapport poids/puissance exceptionnel.

La Marcos 1800 GT lancée en 1964 est une très attrayante voiture sportive qui rappelle l’Iso Grifo de 1963 dessinée par Giorgetto Giugiaro pour le compte de Bertone.

D’autres moteurs sont montés progressivement dans la Marcos, comme le 1,6 litre de la Ford Cortina dès 1967, le 3 litres de la Ford Zodiac en 1968, le 2 litres de la Ford Corsair en 1969 et le 3 litres de la Volvo 164 en 1970.  Les vitesses s’échelonnent entre 180 km/h et 200 km/h selon les moteurs. La version 3 litres pèse 100 kilos de plus que la version originale 1,8 litre.

Les appellations des modèles suivent la cylindrée de chaque moteur : 1500 GT, 1600 GT, 2000 GT, 3000 GT. En terme de prix, la Marcos la plus chère, la 3 litres, se situe au niveau des coupés Volvo P1800 S, Fiat 2300 S, Jaguar Type E, Porsche 911 et Alpine 1300 S berlinette. Le nombre de Marcos GT produites n’est pas connu avec précision. La société Marcos est placée en liquidation judiciaire en 1971, obligeant le constructeur à arrêter la production du modèle.


1965 : Mini Marcos


Avec la Mini Marcos lancée en 1965, le constructeur vise une clientèle plus populaire. Le nouveau modèle qui s’ajoute à la 1800 GT est encore plus court, puisqu’il ne dépasse pas 3,45 mètres. Il reprend l’ensemble mécanique de la BMC Mini. La voiture proposée en kit connaît un honnête succès, aussi bien dans les ventes qu’en compétition. Dotée du moteur 850 cm3, puis du 1 000 cm3 et enfin du 1 275 cm3 des Mini et Mini Cooper, la Mini Marcos avec son poids plume de 475 kilos bénéficie d’un rapport poids/puissance aussi bon que sa grande sœur.

La Mini Marcos lancée en 1965 sur base Austin/Morris Mini est moins élégante que le coupé Marcos GT, en raison de ses petites dimensions, mais on peut dire qu’elle a une " gueule ".

La silhouette de la Mini Marcos est assez particulière, loin d’égaler la finesse des 1800 GT, mais suffisamment éloignée des premières Marcos laides à souhait. Si la Mini Marcos conserve l’empattement court de la Mini, elle mesure 42 centimètres de plus en raison de son profilage, et surtout elle est plus basse de 23 centimètres. Légère et aérodynamique avec sa carrosserie en fibre de verre, la Mini Marcos peut s’approcher des 140 km/h. Les ventes ne sont pas connues avec précision, en raison du montage de la voiture en kit, mais on peut les estimer à 1 300 unités environ.


1968 : Marcos Mantis


La Mantis est lancée en 1968 par l’intermédiaire d’un prototype de voiture de course, la Mantis XP. En 1969, apparaît la Mantis de série avec un moteur Triumph de 3 litres (monté sur le TR6) et un châssis en bois. Mais au bout de quelques mois, le châssis original est remplacé par un châssis en acier tubulaire afin, d'une part de réduire les coûts de fabrication et de réparation en cas d'accident,  d'autre part d'améliorer la sécurité du véhicule en vue de son exportation vers le marché américain. Cette tentative d'implantation outre-Atlantique va précipiter la faillite de Marcos.

La Marcos Mantis lancée en 1968 fait penser à une Mini Marcos que l’on a étiré sur 5,10 mètres. Le résultat est particulier. Ce modèle connaît un échec commercial retentissant qui provoque la faillite de la marque.

La Mantis, lancée officiellement en 1970, ne rencontre pas le succès, notamment à cause de son design jugé trop avant-gardisten et du durcissement des règles d'homologation des véhicules aux Etats-Unis qui nécessite de coûteux investissements que le constructeur n’est pas prêt à faire. Longue de 5,10 mètres et ne dépassant pas 1,12 mètre en hauteur, la Mantis n’est pas un chef d’œuvre d’harmonie, mais plutôt un engin sorti tout droit d’une BD. Seulement 32 Mantis sont vendues au total, avant l'arrêt d'activité du constructeur en 1971. Le constructeur Marcos est racheté par un groupe industriel, qui poursuit la production des Marcos GT et Mini Marcos sur le marché britannique pendant une courte durée.


1981 : Marcos redémarre


En 1976, Jem Marsh rachète les droits de la marque Marcos et en 1981, dix ans après le dépôt de bilan, il relance la production des modèles GT de la fin des années 1960. En 1984 est lancée la Mantula, un nouveau modèle toujours basé sur la GT de 1969, et équipée du moteur V8 Rover d’origine Buick. En 1991, s’ajoute la Martina, une version low-cost de la Mantula dotée de la même carrosserie mais d'un châssis de Ford Cortina afin d'en réduire le coût.

En 1981, dix ans après le dépôt de bilan de Marcos, la marque ressuscite et propose de nouveau le coupé GT, dont les origines remontent à 1964. Il est rebaptisé Mantula en 1984, disponible en version cabriolet

La même année on retrouve la Mini Marcos livrée en kit, qui bénéficie encore de la réputation qu'elle a acquise il y a deux décennies, et qui a été adopté par plusieurs artisans britanniques après plus ou moins de modifications. Ceci fait que la Mini Marcos a continué de vivre sous diverses formes et sous diverses appellations entre 1971 et 1991 … C’est le miracle des modèles de l’industrie automobile britannique qui disparaissent, puis réapparaissent toujours sous une forme ou sous une autre. Une version de la Mini Marcos reprise par Jem Marsh en 1991 est dotée, non plus du moteur de la Mini du groupe Austin Rover, mais de celui de l’Austin Metro, en 1 120 cm3 ou 1 396 cm3, avec différents niveaux de puissance. En 1993, Marcos abandonne le marché des voitures livrées en kit.

La Mantara, une GT modernisée, est alors produite de manière traditionnelle. Pour cette voiture, dont les origines remontent à 1964, Jem Marsh propose des mécaniques Ford et Volvo. Il s'agit comme jadis d'un 1600, d'un 2 litres ou d'un 3 litres. Mais d’autres moteurs sont aussi montés sur cette voiture de sport, comme les V8 Rover 4,0 litres et 4,6 litres, le V8 de l’AC Cobra ou le V8 de la Chevrolet Corvette. La Mantara, disponible en coupé et en cabriolet, est commercialisée en petit nombre jusqu’à la fin des années 90, une centaine d'exemplaires par an.

En 1993, la Marcos Mantara est une énième version du coupé GT disponible également en version cabriolet

Parallèlement, la marque renoue avec la compétition sportive notamment dans des championnats GT au Royaume-Uni ou aux 24 Heures du Mans, et trois modèles de course, également homologués pour la route en petites séries, voient le jour : les LM 400, 500 et 600. Un modèle coupé cabriolet basé sur ces LM fait renaître le nom Mantis en 1997. Mais trois ans plus tard, en 2000, l'entreprise connaît une nouvelle faillite.


La fin de Marcos


Jem Marsh cède alors sa société au canadien Tony Stelliga, qui renomme l'entreprise Marcos Engineering. Ce dernier développe un nouveau modèle. La Marcasite TS est lancée en 2002. Elle est dotée d’un V6 Ford de 2,5 litres ou d’un V8 Rover de 5 litres, ce qui confirme la montée en gamme de Marcos observée depuis le milieu des années 90. Si le dessin rappelle dans ses grandes lignes la Marcos GT et ses dérivées, la partie avant est totalement redessinée, plus en accord avec les canons de l’époque. En 2004, apparaît la Marcasite TSO équipée d'un moteur V8 de 5,7 litres d’origine Chevrolet Corvette, développant 350 ch, et jusqu’à 420 ch dans sa version la plus puissante. L’objectif de Tony Stelliga est de vendre une voiture du niveau d’Aston Martin au prix d’une TVR …

La Marcos TSO est  fabriquée entre 2004 et 2007. Elle est équipée d'un moteur Chevrolet V8 en versions 350 ch ou 420 ch. L'ingénierie du châssis a été réalisée par Prodrive.

En 2005, la Marcasite TSO GT2 avec ses 475 ch constitue le chant du cygne de la marque Marcos. A force de voler toujours plus haut, et de s’approcher plus près du soleil, on finit par se brûler les ailes … Les coûts d'homologation des voitures toujours plus puissantes, et le dilettantisme du management de la marque incompatible avec une clientèle exigeante, condamnent Marcos à cesser définitivement toute activité. L'entreprise est placée en liquidation judiciaire en octobre 2007.

Texte : Jean-Michel Prillieux
Reproduction interdite, merci.

A voir aussi : http://leroux.andre.free.fr/ukmarcos.htm

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