Peugeot 20Coeur et 206 CC
Le concept car Peugeot 20Coeur La nouveau siècle s'annonçait périlleux pour Heuliez. La production des breaks Xantia et XM arrivait à son terme. PSA ne souhaitait plus faire appel à son partenaire de Cerizay pour fabriquer ses prochains modèles de break. Il était urgent pour Gérard Quéveau de trouver une autre activité pour faire tourner ses usines. Parallèlement, PSA avait pour projet de proposer à sa clientèle un modèle ludique de type cabriolet, afin de ne laisser à ses concurrents aucune niche de marché vierge. Le développement d'un petit spider sur base Peugeot 106 avait débuté en 1992, une étude d'industrialisation fut même menée. Heuliez fut consulté pour ses compétences dans le domaine des toits ouvrants. Mais le projet fut finalement abandonné.
Dès 1992 Peugeot et Heuliez travaillèrent sur le principe du toit rigide escamotable, testé sur ce prototype de Spider 106. En 1996, Peugeot transmettait à Heuliez différentes informations concernant la future 206. PSA souhaitait confier au carrossier le développement d'une version " sport ". Mais Gérard Quéveau comme les designers de Cerizay n'avaient pas perdu de vue l'idée du " coupé cabriolet ". Le patron de Heuliez pressentait que ce type de proposition avait un grand avenir devant lui. En juin 1997, Heuliez soumettait au centre de style de Peugeot une, puis deux maquettes avec un toit ouvrant motorisé. L'état major de Peugeot fut suffisamment séduit par ces propositions pour que soit décidée la fabrication par France Design d'un concept car qui serait exposé au salon de Genève de 1998. La 20Coeur était la vedette du stand Peugeot lors de ce salon. Sa principale innovation était la présence d'un toit en dur rétractable, qui outre son aspect pratique, permettait de maintenir deux minuscules places arrière de secours. En appuyant sur un bouton, comme sur un cabriolet à toit souple moderne, le toit rigide se cachait automatiquement dans le coffre. L'engouement extraordinaire suscité par ce prototype fit réfléchir l'état major de Peugeot. C'est bien Peugeot qui présenta la 20Coeur, et non Heuliez. Dans sa stratégie de communication, Peugeot avait choisi de taire le travail du carrossier sur ce dossier. Comme à l'accoutumée, les équipes de Gérard Quéveau respectèrent les indications de leur donneur d'ordre, même si une certaine frustration était perceptible. Certes, Heuliez et Peugeot ne furent pas les premiers à proposer leur version réactualisée d'un " coupé cabriolet ". La Mercedes SLK présentée sous la forme d'un concept car au salon de Turin 1994 avait ouvert la voie. Elle fut commercialisée à partir de l'été 1996. Mais la démarché était déjà engagée chez Heuliez depuis pas mal de temps. La SLK servi simplement d'accélérateur, bien que le pari d'Heuliez était d'une autre envergure, en raison du faible coût envisagé. Après quelques hésitations, la décision de produire en série celle qui allait devenir la 206 CC fut prise quelques semaines après le salon de Genève. C'est une véritable lutte contre la montre qui s'engageait pour passer du stade de prototype à celui de véhicule produit en série. Peugeot allait être le précurseur dans le segment des " coupé cabriolet " abordables, et profiter seul de ce marché naissant. Les obstacles à franchir pour passer au stade industriel furent nombreux. L'éloignement géographique entre Mulhouse et Cerizay ne facilitait pas la tâche des ingénieurs. Les études de marché donnaient le vertige. La production de 400 véhicules par jour se devait d'être étudiée. Et Peugeot comme Heuliez avaient la même ambition de proposer un véhicule à la qualité irréprochable.
La production des modules dans les ateliers de Cerizay Heuliez qui aurait pu espérer récupérer l'assemblage complet de la voiture dans les Deux Sèvres dut hélas se contenter de fournir à Peugeot les modules " toit + coffre " peints et assemblés. Ceux ci étaient ensuite livrés à Mulhouse sur la chaîne de la berline 206. L'ensemble avait été conçu comme un module prêt à poser. Le toit et l'encadrement de lunette arrière étaient réalisés à Cerizay sur des lignes de ferrage spécifiques. Le niveau de précision de montage était une première mondiale en carrosserie mécanique puisqu'il atteignait le 1/10ème de millimètre. Ce sont 32 points dimensionnels qui étaient vérifiés sur la chaîne mise en place. La qualité de la peinture et sa teinte devaient se marier de manière irréprochable avec le reste de la carrosserie peinte à Mulhouse. Le groupe PSA ne faisait que suivre là une tendance lourde de l'industrie automobile de rapatrier dans ses usines les petites et moyennes séries confiées jusque là à des carrossiers. En Italie, Pininfarina subissait le même sort avec Peugeot pour ses coupés. Opel apprenait aussi à se passer des services de Bertone. En France, c'est Renault qui réintégrait dans ses usines la production de l'Espace, jusque là sous traitée auprès de Matra. Peugeot avait déjà expérimenté dès 1935 ce principe de toit escamotable en tôle d'acier sur la 402 Eclipse. La version électrique fut abandonnée dès 1936 au profit d'un système manuel moins capricieux. Il fut produit 580 exemplaires de cette Peugeot découvrable jusqu'en 1940. Le constructeur sochalien ne se priva pas de mettre en avant ce savoir-faire " ancestral " lors du lancement de la 206 CC.
La Peugeot 20Coeur de 1998, avec en arrière plan la 402 Eclipse de 1936
Photo d'époque de la 402 Eclipse, " Il n'y a de nouveau que ce qui a été oublié " L'Auto-Journal, dans son édition du 17 décembre 1998, décrivait ainsi le futur processus de production dans les usines Peugeot : " Cette variante convertible de la 206 sera produite sur les chaînes de montage de la berline, à Mulhouse. L'opération est plus simple qu'il n'y paraît. La plate-forme de la 206 est momentanément extraite de la ligne de ferrage (elle se présente alors sous la forme d'un châssis nu, sans carrosserie) afin de recevoir, sur une ligne parallèle, les éléments de carrosserie spécifiques. La coque ainsi montée réintègre la ligne de montage, au rythme de production de la berline (c'est important pour diminuer les coûts de fabrication), afin de recevoir sa mécanique, ses trains roulants et son habillage. Heuliez, dépositaire des brevets du convertible, fournit l'intégralité du toit. Ces pièces concernent en fait l'encadrement de pare-brise, l'ensemble toit coffre assemblé, peint et mécanisé ainsi que les sous ensembles spécifiques de châssis et carrosserie. Cet ensemble - également appelé " cassette " est livré peint, prêt au montage.
Photomontage avec les hommes de chez Heuliez et leur création devant le bâtiment H de l'usine de Cerizay. On reconnaît à gauche Jean Marc Guillez, Directeur de Recherche Avancée de Heuliez, et Gérard Quéveau
La 206 CC de Ludovic Bellinato sponsorisée par Heuliez sur la piste de l'aérodrome Henri Heuliez La 206 CC était commercialisée en septembre 2000. En 2001, le délai de livraison atteignait six mois. La 206 CC était devenue en quelques temps le cabriolet le plus vendu en Europe. Le rythme quotidien de 400 unités était atteint dès 2002. Du statut initial de voiture de niche, la 206 CC avait acquis le statut de voiture de moyenne série. Gérard Quéveau, président de Heuliez, déclarait en 1999 : " Le convertible sera la révolution automobile du 21ème siècle, tout comme l'Espace de Matra a été celle de la fin du 20ème siècle ". Mais il n'imaginait sans doute pas que Peugeot allait rapidement apprendre à se passer de ses services.
La Peugeot 206 CC de série Comme toutes les nouveautés, la 206 CC n'échappait pas à l'usure du temps. Ainsi, les ventes chutaient de 26 % en 2004 par rapport à 2003. De nouvelles motorisations, une finition " Sport " et des séries limitées (Roland Garros et Quicksilver) contribuèrent à maintenir le cap. Il fut tout de même produit plus de 360 000 modules à Cerizay, et autant ... de voitures à Mulhouse. La 207 CC remplaçait la 206 CC au printemps 2007. Le nouveau coupé cabriolet était entièrement produit par Peugeot dans son usine de Madrid, mettant ainsi fin au partenariat avec Heuliez. La cinématique du toit, qui s'inspire des travaux de Heuliez, fut conçue en interne. Pour le moment, Heuliez pouvait encore s'appuyer sur la production de l'Opel Tigra Twin Top.
Peugeot 207 CC Autre évolution sur le principe du toit rétractable, le concept car " Ciel bleu " de 2001 apportait une ambiance lumineuse à l'habitacle de la 206 CC. Quoi de plus naturel que de vouloir profiter au maximum de la lumière ou de pouvoir regarder, même par mauvais temps, la nature, sans avoir bien évidemment à ouvrir le toit.
La cinématique de l'ensemble possédait les mêmes caractéristiques que celles du toit de la 206 CC " normale ". Aucune suite en série ne fut donnée à cette proposition.
Le prototype de cette 206 CC lumineuse dans les réserves de Heuliez en juin 2009
La même voiture lors de la vente Heuliez du 7 octobre 2012 En 2002, Heuliez exposait la 206 CC Sun Roof, un prototype équipé d'un toit ouvrant Webasto, pour ceux qui souhaitent bénéficier d'une ouverture de toit sans avoir à ouvrir totalement celui-ci, tout en conservant la possibilité d'opter à tout moment pour les plus belles journées de la transformation complète en cabriolet.
Le Deflectop, un accessoire breveté par Heuliez, était présenté au Salon de Genève 2003, avec une application sur la Peugeot 206 CC. Cette projet fut validé par des essais dans la soufflerie Jules Verne du CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment) de Nantes. Les photos suffisent pour comprendre l'intérêt de ce système.
Deflectop Heuliez sur Peugeot 206 CC |