Luigi Colani



Luigi Colani - Allemagne - 1928

Vouloir retracer la carrière de Luigi Colani déborderait du cadre de ce sujet consacré aux designers, stylistes et carrossiers. Son site http://www.colani.ch vous permettra d'en savoir plus. Nous vous proposons ici un survol de quelques-unes de ses créations dans notre domaine de prédilection sans prétention d'exhaustivité.


Formation : Académie des Arts de Berlin où pendant 4 ans il étudie la peinture et la sculpture.

Son père Suisse est créateur de décors pour le cinéma et sa mère actrice d'origine polonaise. Luigi Colani est dès son plus jeune âge plongé dans un environnement artistique entretenu par ses parents.

Après guerre et années 50

Il quitte Berlin pour la France où il est engagé chez Propag, un bureau d'études dirigé par Jean Terramorsi (qui jouera ensuite un rôle important dans la course automobile chez Renault).

Participation à la Revue Vedette, le magazine promotionnel de Ford. Parallèlement, on le retrouve occasionnellement en tant qu'illustrateur pour le mensuel " L'Automobile ".

" Conçue au bureau d'études de l'Automobile, cette voiture française, de conception ultra moderne, l'Espadon 52, en voie de construction, sera une cinglante réplique au Sabre (NDLR : concept car de la General Motors) ". Luigi Colani illustrait la couverture du numéro 69 du célèbre mensuel daté de janvier 1952.


Il est remarqué par Michel Gauthier, alors responsable du département course de Simca qui l'invite à réaliser la première voiture française en fibre de verre. 

Il se perfectionne entre 1948 et 1952 en aérodynamique à la Sorbonne et au contact de Charles Deutz.

La courbe va acquérir une importance primordiale dans l'oeuvre de cet artiste. L'arrête vive disparaît pour laisser la place à la douceur de l'arc de cercle et aux rondeurs étudiées pour que l'air glisse d'une manière plus efficace.

En 1953, mise en pratique de ses connaissances chez l'avionneur Douglas aux Etats Unis.

Retour à Berlin en 1954 où il entre au service du carrossier Rometsch. Après un passage chez Erdmann und Rossi, il ouvre son propre atelier d'où commence à sortir une multitude de voitures de sport et de prototypes. Il collabore avec plusieurs constructeurs.

Son domaine d'activité déborde déjà largement du cadre de l'automobile. Il conçoit notamment pour certaines maisons parisiennes plusieurs collections de chaussures.

Années 60

Le magazine l'Automobile présente dans son numéro de décembre 1962 la première voiture de sport réalisée par Colani à partir d'une Volkswagen 1200. Le styliste s'en est remis au verdict de la soufflerie pour définir les lignes de l'auto. L'initiateur du projet prévoit déjà la construction d'une petite série de 200 exemplaires. Plusieurs kits furent effectivement vendus à un public essentiellement jeune qui souhaitait se faire plaisir à moindre coût

Luigi Colani, et son premier prototype en bas des impressionnantes falaises du circuit de l'Avus


En 1964, Colani propose une nouvelle évolution sur base Volkswagen, la Whippet. L'ambition de produire sa voiture en petite série est toujours bien présente. Le moteur Oettinger est placé en porte-à-faux arrière. Le principe des portes papillon est retenu. L'arrière est doté d'une custode verticale en retrait du prolongement de la carrosserie à la manière de la Porsche 904. Le poids ne dépasse pas 490 kg, et la Whippet atteint 200 km/h avec une boîte à cinq rapports. Quelques exemplaires sont effectivement commercialisés.

Colani Whippet, 1965


En 1965, Luigi Colani achève une berlinette sur base BMW 700. Le moteur, les suspensions, les roues et les freins proviennent de la BMW. Le châssis est une plate forme en matière plastique, tout comme la carrosserie dont le profilage est particulièrement travaillé. L'habitacle s'ouvre d'arrière en avant. Colani annonce là aussi 200 km/h en vitesse de pointe, pour un poids de 430 kg. La voiture s'arrête au stade du prototype.

Colani BMW 700, 1965


La Colani RS exposée au salon de Francfort en octobre 1965 devait être construite chez Heinkel, constructeur connu pour sa microcar Kabine. La carrosserie en polyester ne dépasse pas 95 centimètres de hauteur. L'acquéreur devait avoir le choix de la mécanique, qui variait du VW 1300 au Chevrolet Corvair Monza. Comme la BWW 700, La RS demeure au stade du prototype.

Colani RS


En novembre 1967, Colani dépose de brevet de la C-Form. L'idée consiste à canaliser l'air sous la voiture, et de l'exploiter pour permettre d'atteindre de grandes vitesses tout en conservant une très bonne assise au sol et une excellente stabilité directionnelle.

La C-Form est appliqué à ce projet de Colani


Colani continue d'oeuvrer dans des domaines très divers : meubles, lunettes, vêtements ...

Années 70

En 1970, Colani s'installe au château de Harkotten à Füchtorf, dans un décors à sa mesure. Né Lutz Colani, il abandonne en 1971 ce prénom pour celui de Luigi.

Alors que la mode est plus que jamais aux angles vifs, Colani affirme son indépendance avec des sculptures automobiles dont les formes s'inspirent de la nature. Il explique que la ligne droite n'existe pas dans la nature, et que celle-ci crée des formes parfaites. Le terme bio design n'est pas encore employé dans les studios de style.

Il offre au public américain le spectacle d'un véhicule hautement sophistiqué reprenant le moteur et les trains de la Lamborghini Miura. L'engin n'a rien de commun avec la conception que l'on peut avoir à l'époque de l'automobile. Ces deux corps accouplés ne peuvent qu'étonner le public d'outre Atlantique. L'idée première du créateur a été de séparer la partie groupe propulseur de l'habitacle, véritable nacelle indépendante. Celle- ci adopte des formes qui rappellent le planeur, dont la coque en forme de goutte d'eau est le fruit de recherche en matière de résistance à l'air.

Lamborghini, 1970


Toujours en 1970, en collaboration avec Mercedes, il extrapole une carrosserie inédite à partir du véhicule expérimental C 111. La lunette arrière de grande dimension est inscrite dans la forme générale de l'engin. Elle est nettoyée par un imposant essuie-glace.

C112, 1970 (en réponse à la Mercedes C 111 de 1969)


Colani est un designer difficile à cerner. Est-il un imposteur ou un visionnaire ? Il ne correspond pas à la définition classique du designer automobile et il est à mille lieux du profil de ses " confrères " présentés sur ces pages. Il élargit son champ d'action au design des camions, des trains, des avions, des stylos, des téléviseurs, des pianos, des cuisines complètes ...

Il se permet en 1974 de retoucher l'oeuvre magistrale de Leonardo Fioravanti, la mythique Ferrari Daytona. Si le résultat sur le plan de l'aérodynamisme est prouvé, le travail effectué demeure particulièrement discutable sur le plan esthétique.

Ferrari Daytna revue par par Luigi Colani


Luigi Colani expose l'Aiglon au Salon de Genève 1976, un monstre de 7 mètres de long et de 2,25 mètres de large. L'Aiglon représente, selon son créateur, l'image d'une voiture de rêve qui aurait pu voir le jour durant les années 39/45 si la guerre n'avait pas arrêté l'évolution de l'automobile. Cette deux places est destinée à un prince arabe (voir aussi : http://www.gatsbyonline.com).

L'aiglon, 1976


En 1977, à Genève, Luigi Colani expose un camion et jette à cette occasion un pavé dans la mare. Pour les uns, il s'agit d'une injure, tandis que pour les autres c'est l'aboutissement d'une évolution logique de concepts appliqués à l'automobile dans un premier temps, puis désormais aux poids lourds. Nombre de ses idées ont été reprises depuis cet époque, essentiellement sur les autocars.

Colani expose à Francfort en 1977 son camion profilé " 2001 ". Les industriels du poids lourd en sourient. Aujourd'hui, la réduction de la prise au vent est une contrainte adoptée par tous.

Un Mercedes, dans le même esprit. Notez l'essuie glace en forme d'étoile !


Colani est consulté par de nombreuses firmes européennes (Audi, VW, BMW ...), mais aucune n'ose commercialiser ses solutions tellement radicales.

Volkswagen, 1977

Volkswagen, vers 1979


1979

Extrait de l'Automobile N° 392 de février 1979

Colani le stylite allemand qui s'est singularisé et continue à se singulariser avec des productions plus ou moins originales, plus ou moins heureuses aussi d'ailleurs, nous offre une nouvelle expression de son talent. En collaboration avec la firme allemande Thissen Umformtechnik, il vient de concevoir et de réaliser un tout terrain, le Sea Ranger. Cet engin à l'allure étonnante pèse 4 tonnes et mesure 6,20 mètres de long et peut tout à la fois circuler sur la route, emprunter les chemins de terre et forestiers, traverser les rivières, les lacs et se déplacer dans la boue. Le Sea Ranger utilise une base mécanique issue de l'amphibie Unimog Mercedes. Il a été carrossé en aluminium " marine ", aluminium spécialement traité contre la corrosion. Animé par un moteur diesel de 5 litres et 110 ch, sa vitesse maxi est de l'ordre de 110 km/h sur route. Un réservoir de combustible de 500 litres lui assure une autonomie de 2500 km et de plus on a prévu une réserve de 500 litres d'eau potable pour les expéditions " longue durée ". Aménagé pour recevoir quatre personnes à bord avec équipement complet (tentes, lits de camp, matériel divers, etc ..) il permet les randonnées les plus longues. On a poussé très loin la sophistication en ce qui concerne l'équipement avec une super antenne, radio télévision, computeur, émetteur récepteur avec liaison par satellite. Ajoutons aussi que le siège pilote est du genre " ascenseur " ce qui le transforme en " mirador " d'observation en cas de besoin ou en " pliant " pour la pêche. Prototype original sans nul doute le Sea Ranger et tout aussi original en ce qui concerne son prix de revient, qui, suivant l'équipement, serait de 690 000 à 1 500 000 F. De quoi rêver. 

Colani Sea Ranger


Depuis les années 80

En 1982, Colani quitte son château et son pays. Les japonais avec lesquels il est en contact depuis 1972 l'accueillent comme le messie. Il leur dispense la bonne parole, en les exhortant à ne plus copier l'Europe, mais en les incitant à s'appuyer sur leur culture ancestrale.

Mazda, 1983


Quelques unes de ses oeuvres sont commercialisées par les plus grandes marques : Sony, Canon, Yamaha, Nec ... En quelques années, il est devenu le designer européen le plus demandé au Japon.

Colani a toujours dénoncé " l'impérialisme américain et sa démesure vulgaire, le manque d'audace de la veille Europe, et l'aberration de vouloir intégrer des objets cubiques dans un monde aux formes molles ". A cette époque, il n'hésite pas à proposer ses services à la Russie, la Chine, l'Iran ou la Libye.

Le style automobile qui s'impose au cours des années 80 lui donne raison. Tous les designers se gargarisent alors de bio design avec plus ou moins de bonheur (Ford Sierra, Toyota Celica ...).

Au printemps 1987, pour selon ses dires " ne pas se sentir responsable du naufrage de l'Europe ", il fait son retour en Suisse, sous la raison sociale " Colani Design Berne ".

En 1989, l'artiste marque son retour en occident en louant pour deux semaines le célèbre lac salé de Bonneville dans l'Utah. Il prend pied chez ses ennemis de toujours, les américains. Une douzaine de véhicules (dénommé Utaht-1 à Utah-12), du vélo au camion en passant par le tricycle, la moto et la voiture, font le show. 

Colani, Utah-1

Colani, Utah-6

Colani, Utah-8


Il dispense lors de son voyage sa bonne parole aux designers de Ford à Deaborn, puis aux élèves de l'Art Center College of Design de Pasadena, avant de rencontrer d'autres visionnaires parmi lesquels Georges Lucas et Steven Spielberg.

Il s'installe en 1988 à Toulouse, en France, patrie du Concorde et du TGV.

Colani Ferrari Testa d'Oro, 1989

D'un extrême à l'autre, la sobriété des lignes caractérise cette étude pour un vélo aérodynamique

La vision de Colani pour un retour de la marque Horch, 1996


Poursuivez la découverte de l'oeuvre de Luigi Colani sur http://www.colani.ch


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