Imperia
Les constructeurs belges étaient à l'avant-garde de la construction automobile avant 1914. De nombreuses conditions favorisèrent ce développement spontané : la présence d'ingénieurs compétents, de financiers entreprenants, une main-d'oeuvre qualifiée, et surtout un marché très porteur sans grande concurrence étrangère. La première guerre et l'occupation de la Belgique et de ses usines par les Allemands portèrent un premier coup sérieux au potentiel belge dans ce secteur. Alors que tous les autres pays européens voyaient leurs usines se multiplier pour faire face aux besoins de la guerre, comme Citroën en France qui produisait des obus, les usines belges ne pouvaient pas moderniser leurs équipements, ce qui leur aurait pourtant permis de repartir d'un bon pied après le conflit. Malgré ce handicap, dès 1919, les firmes belges réagirent en se concentrant sur la production de voitures de grande qualité. Mais un marché restreint et la multitude des marques en présence ne permettaient pas d'atteindre des volumes importants. Dès 1930, la crise força ces constructeurs soit à disparaître, soit à se tourner vers la construction de véhicules utilitaires, soit à s'unir sous l'égide du dernier grand groupe belge, Minerva Imperia. La seconde occupation de la Belgique par les Allemands fit disparaître quasiment tous les constructeurs belges. Un d'entre eux survécut jusqu'à la fin des années 50 : Imperia. C'est son histoire que nous allons ici développer. Un passionné tente de faire revivre la marque depuis 2008, sans grand succès jusqu'à présent ... Les origines, Adrien Gustave Piedboeuf Au début du 20ème siècle, Adrien Gustave Piedboeuf, descendant d’une famille de sidérurgistes belges installée en Allemagne, fondait à Aix-La-Chapelle, avec Hans Aschoff, une agence pour la vente des voitures des marques Cudell et Métallurgique. Sa famille possédait des usines sidérurgiques dans cette ville depuis 1830. En 1904, il quittait cette société et rentrait au pays pour commencer à Liège la construction d'une motocyclette de sa conception, qu'il baptisait du nom de Forward. L'année suivante, il sautait le pas, et se lançait dans la construction d'une automobile étudiée avec l'aide d'un ami ingénieur allemand, Paul Henze, qui avait auparavant dessiné les Cudell d'Aix-la-Chapelle. C’est lors du Salon de Paris de 1906 que l’on entendit pour la première fois parler des ateliers Piedboeuf. Face aux constructeurs français et étrangers, les débuts étaient modestes, mais la presse spécialisée aida bien le petit constructeur, en vantant le haut niveau de finition et les prix raisonnables de ses automobiles. Ces voitures furent baptisées Imperia, en souvenir du séjour d'Adrien Piedboeuf à Aix-La-Chapelle, ville où mourut Carolus Magnus, dit Charlemagne, en 814. L'insigne de radiateur était d'ailleurs décoré d'une couronne. Celle-ci, sous diverses formes, resta le symbole de la marque jusqu'à sa disparition. Les premières Imperia étaient produites en petit nombre, de manière artisanale. Adrien Piedboeuf, à l'étroit dans son petit garage de la rue Fragnée à Liège, cherchait à développer son affaire et à répondre à une demande croissante. Il rachetait en 1908 l'usine d'Henri Pieper à Nessonvaux, en vente suite à l'abandon de la construction automobile par cette entreprise, qui était par ailleurs un fabricant d'armes reconnu. Piedboeuf démarrait sur ce site déjà bien équipé une production à plus grande échelle. En 1910, l’usine employait plus de 300 ouvriers. Imperia, à l'image de son compatriote Minerva, devenait en peu de temps un important constructeur à la réputation solidement établie dans plusieurs pays européens. L'usine de Nessonvaux, qui a survécu jusqu'à nos jours, est avec ses faux airs de château fort, un bel exemple de richesse architecturale industrielle.
L'usine de Nessonvaux La reprise en main par Jules Springuel En 1911, Imperia fusionnait avec le constructeur automobile Springuel à Huy, un confrère mais néanmoins concurrent qui proposait depuis 1907 des automobiles proches dans leur conception des Imperia. En janvier 1912, au Salon de Bruxelles, les deux marques partageaient le même stand sous le nom de Springuel Imperia. Jules Springuel prenait la direction du nouvel ensemble à partir de Huy, tandis que Nessonvaux était dirigé par Paul Henze. Adrien Piedboeuf, malade, prenait du recul sur les affaires quotidiennes, tout en demeurant actionnaire. Il mourrait en 1919. Imperia restait un petit constructeur, avec environ 200 voitures assemblées par an avant guerre. Springuel en produisait environ deux fois moins. Les Imperia participèrent à de nombreuses compétitions à travers l'Europe jusqu'en 1914. Elles s'en tirèrent le plus souvent avec les honneurs, simplement avec des voitures retravaillées et carrossées légèrement. Chez Imperia, on n'avait ni l'ambition ni les moyens d'entreprendre la fabrication de voitures spéciales. L'épisode Abadal Don Francesco Sarramlera y Abadal, ancien coureur cycliste, fut agent d'Hispano Suiza à Madrid de 1904 à 1912. Il avait étendu son rayon d'action à Barcelone en 1908. En 1913, il signait un important contrat avec Imperia, dans l'objectif de produire en Espagne une voiture capable de rivaliser avec les prestigieuses Hispano Suiza. Paul Henze fit dessiner par ses ingénieures des modèles très inspirés de l'Hispano Suiza Alfonso XIII. Imperia fournissait les pièces (moteur, châssis ...) à Abadal qui assemblait les voitures à Barcelone, et qui les vendait sous la marque Abadal. Ce nouveau contact offrait des débouchés à Imperia vers l’Espagne et l’Amérique Latine, où Abadal était bien introduit. Parallèlement, Imperia vendait des Abadal sur ses marchés traditionnels, mais sous la désignation Imperia Abadal.
Imperia Abadal Malgré un lancement en fanfare, l'Abadal conçue trop hâtivement présentait de multiples problèmes de finition qui entachèrent sa réputation. Imperia décidait dès lors de rapatrier la production en Belgique. Celle-ci reprenait en 1919, et s'échelonna jusqu'en 1922. Environ 170 Imperia Abadal furent produites après-guerre, contre moins de 90 avant-guerre. Imperia Abadal, magazine Omnia, novembre 1921 Avec de si faibles volumes, les Abadal ne pouvaient pas lutter à armes égales avec les ténors de la catégorie à la réputation bien mieux établie. Fort de ce constat, Imperia préféra jeter l'éponge en 1922. Don Francesco Sarramlera y Abadal s'associa dès lors avec Buick pour de nouvelles aventures.
Imperia Abadal Un nouveau repreneur, Mathieu van Roggen Comme déjà évoqué, la production automobile fut interrompue en Belgique entre 1914 et 1918. Après la guerre et les pillages exercés par les Allemands, tout était à refaire : achat de nouvelles machines et recrutement de personnel en particulier. Peu à peu, Imperia reprenait ses activités, modestement au départ en réparant les véhicules des armées belges et alliées. Les grands constructeurs américains profitèrent de ce KO pour s'imposer sur un marché disséminé, où aucun grand constructeur national ne s'imposait vraiment, et sur lequel les droits de douane étaient faibles. En 1920, un nouvel actionnaire, Mathieu van Roggen, d'origine hollandaise, propriétaire des marbreries de Sprimont, mais aussi patron de la marque automobile ATA de Trooz, rachetait l'entreprise à Jules Springuel. La production au compte goutte de grandes et coûteuses voitures dérivées des modèles d'avant-guerre n'était plus viable économiquement face à une concurrence exacerbée. Il était devenu nécessaire d'aller à la rencontre du marché en proposant des véhicules plus légers, plus accessibles financièrement. Imperia avait depuis toujours hésité entre le marché des voitures populaires et celui des voitures de prestige. Mathieu Van Roggen tranchait en accordant la priorité à cette seconde catégorie. Il allait redonner toute l'énergie nécessaire à Imperia, en forgeant à la marque une nouvelle image flatteuse en matière de conception. Pour cela, il recrutait en 1922 un nouveau directeur technique, Arnold Couchard. Celui-ci bénéficiait d'une longue expérience dans l'automobile depuis 1899. Il avait travaillé pour Pieper, Ruhl, et Mécaniques & Moteurs à Lièges avant d'entrer chez FN en 1905 où il était devenu chef des études en 1918. Sur le plan sportif, le premier travail de Couchard fut de préparer les trois voitures destinées au GP de Belgique, première épreuve organisée sur le tout nouveau circuit de Francorchamps. Sur les trois Imperia Abadal engagées, l'une d'entre elles remporta l'épreuve, tandis que les deux autres abandonnèrent sur problèmes mécaniques. Le nouveau modèle économique conçu par Couchard apparaissait sur le marché en 1923. L'Imperia Tili était une quatre cylindres de 997 cm3 avec un moteur sans soupape au fonctionnement original. Van Roggen et Couchard s'inscrivirent personnellement aux 200 miles de Brooklands dans une version 1094 cm3 de la Tili, sans pouvoir participer à la compétition pour un problème réglementaire après une épreuve de bruit ! Sur le modèle de série, le 997 cm3 fut remplacé par une version dégonflée du 1094 cm3 de compétition. En 1927, Imperia proposait plusieurs variantes de sa sans soupape : 25 ch (le modèle de base), 28 ch (type sport) et 35 ch (type super sport). Arnold Couchard, technicien hors pair, allait devenir l'âme de l'entreprise. Grâce à lui et à Mathieu Van Roggen, Imperia accédait pendant un temps au peloton de tête de l’industrie automobile belge, avec des volumes de production en croissance régulière : 250 voitures en 1925, 420 en 1926, 504 en 1927, contre une cinquantaine d'unités au début des années 20. Imperia avait retrouvé sa raison d'être.
Imperia 1927 Imperia n'avait pas tout à fait renoncé à offrir un produit plus étoffé. A côté de sa 8 HP, le constructeur proposait un nouveau modèle six cylindres, d'aspect et de technique assez proches. Elle était un peu plus grande que la 8 HP avec un empattement supérieur de 20 cm. Son 1650 cm3 offrait 40 ch. En 1929, la Grand Sport de 1794 cm3 disposait quant à elle de 50 ch, et atteignait 130 km/h. Grandir par croissance externe, pour résister Les années 20 furent celles de l'envahissement du marché belge par de nombreux constructeurs étrangers, contre lequel les constructeurs nationaux, petits et agissant en ordre dispersé, ne pouvaient lutter. Une bataille féroce sur les prix achevait les plus faibles. Pour lutter, Mathieu van Roggen était convaincu de la nécessité de s'unir au sein d'un consortium regroupant les principaux constructeurs belges. Il réalisait en partie son projet, en rachetant Métallurgique et Excelsior en 1927, Nagant en 1928, ainsi que la carrosserie Matthys & Osy. Après ces fusions, face aux géants étrangers, il ne subsistait que deux groupes nationaux en Belgique : Imperia Excelsior et Minerva FN (un " Pacte de l'Amitié "avait été signé en 1927 afin de créer une communauté d'intérêts techniques et commerciaux entre les deux constructeurs). Imperia s'associait par ailleurs avec Gabriel Voisin, en prenant une importante participation dans le capital du constructeur français. L'objectif était de construire des Imperia en France, chez Voisin. Au final, seules quelques Imperia furent carrossées par le Français dans son usine d'Issy-les-Moulineaux, dans son style si personnel. Plus tard, en 1937 et 1938, quelques Imperia TA-9 sortirent de chez Voisin, mais elles étaient vendues sous la marque Minerva, plus connue à l'étranger qu'Imperia. Des pourparlers furent aussi engagés avec Benz et Wolseley, mais sans suite. En 1928, Imperia, bénéficiaire et en forte croissante, s'offrait une piste d'essais d'un kilomètre de développement construite partiellement sur les toits de l'usine. Cela répondait à une demande des riverains qui se plaignaient du bruit et du danger des essais sur route. L'idée avait été reprise de l’usine Fiat Lingotto à Turin. Grâce aux virages relevés, les automobiles pouvaient atteindre la vitesse de 140 km/h.
La piste d'essais de Nessonvaux Sauvé de la faillite grâce à l'Adler Trumpf Les répercussions de la crise de 1929 en Europe réduisaient à néant les efforts de développement et de consolidation d'Imperia. Les chiffres de production diminuaient de mois en mois, faute de demande, et en raison d'une gamme qui avait vieilli. La direction avouait pudiquement en 1931 avoir limité ses fabrications afin de stabiliser ses prix de revient ... La vérité est qu'Imperia n'avait plus les moyens de développer un nouveau modèle pour sortir de la crise. Par chance, la fidélité de plusieurs fournisseurs permit d'éviter la faillite. C'est dans ce contexte que fin 1933 Imperia négociait un accord avec l'Allemand Adler pour produire une voiture moderne sous licence, la toute nouvelle Trumpf (atout en français) à traction avant.
A l’intérieur de l’usine Imperia en 1931 Cette voiture était l'oeuvre d'un grand ingénieur, Hans Georg Röhr. Celui-ci avait créé sa propre marque pour fabriquer une 8 cylindres d'assez petite cylindrée, mais faute de moyens pour en achever le développement, il avait revendu son affaire en 1931. C'est à ce moment qu'il fut recruté chez Adler afin de concevoir un nouveau modèle de voiture légère, la Trumpf, présentée au début de 1932 et construite en série à Francfort à partir de septembre de la même année. La Trumpf était une voiture bien au point, solide, confortable, tenant bien la route. Elle était capable d'atteindre 95 km/h. Chez Imperia, la Trumpf était rebaptisée TA-9. L'usine importait les moteurs (1494 cm3 ou 1645 cm3 à partir de 1933) et transmissions d'Allemagne, tandis que les châssis, suspensions et carrosseries étaient fabriqués en Belgique. Une version plus légère, la TA-7, toujours dérivée d'un modèle Adler (en fait la Trumpf Junior de 1934, 995 cm3, 24 ch), complétait l'offre d'Imperia. Elle fut produite en 3315 exemplaires jusqu'à la guerre. Sur ces bases, la gamme évolua au fil du temps, avec de nouvelles carrosseries et de nouvelles dénominations : Albatros, Mouette, Hirondelle, Mésange, Alouette ... En 1936, l'usine Imperia était capable de produire dix voitures par jour. En France, Lucien Rosengart qui avait rencontré Röhr à Francfort en 1931 avait aussi fait l'acquisition de la licence Trumpf. Devant la presse, il présenta en décembre 1932 sa Supertraction, en fait une simple Trumpf en version française. André Citroën popularisa pour sa part le principe de la traction avant à partir de 1934, sur la voiture du même nom. En 1938, la TA-9 était remplacée par la TA-11 ou Jupiter, disponible en trois versions, berline quatre portes, quatre portes décapotable et cabriolet deux portes quatre places. Le moteur était celui de la nouvelle Adler Zweiliter, un 1912 cm3 de 50 ch. La TA-11 fut produite en 1380 exemplaires jusqu'en 1940. Ainsi survécu Imperia jusqu'à la guerre et la réquisition de l'usine par l'armée allemande.
Imperia TA9, 1934 Mathieu van Roggen passe la main au groupe lainier Gérard Hauzer Mathieu Van Roggen rachetait une autre grande marque belge en septembre 1934 : Minerva, spécialiste des voitures de grand luxe, complexes et coûteuses à fabriquer. Ce constructeur était alors en grande difficulté. Imperia devenait dès lors Minerva Imperia, le plus puissant constructeur automobile belge indépendant. Louis Zurstrassen prenait la direction d'Imperia en 1940, tandis que Mathieu Van Roggen et Arnold Couchard quittaient Nessonvaux pour gérer Minerva. Qui était Louis Zurstrassen ? Sous le régime du Parti national-socialiste allemand, l'économie fonctionnait partiellement sous forme de troc. Ainsi, Imperia obtenait les éléments mécaniques du constructeur allemand Adler, en échange de textiles que produisait notamment le groupe lainer Gérard Hauzer dirigé par Louis Zurstrassen. Celui-ci se montra intéressé par la reprise d'Imperia, et c'est dans ce contexte que l'entreprise changea une nouvelle fois de propriétaire. L'occupation allemande La seconde guerre allait de nouveau stopper l'évolution d'Imperia. L'usine fut occupée par les Allemands, qui acceptèrent que soit poursuivie quelque temps la production. Il était encore possible d'acquérir une Imperia TA-7 à condition d'obtenir une autorisation des autorités allemandes et de pouvoir l'équiper d'un gazogène ou de bonbonnes de gaz. Cette situation ne dura pas, et le site industriel fut pour l'essentiel reconverti à l'entretien et à la réparation des véhicules Adler de l'occupant. La reprise après guerre Les propriétaires d'Imperia retrouvaient leur usine à la libération. Adler n'était plus en mesure après la défaite allemande d'assurer ses approvisionnements à Imperia. Le constructeur belge annonçait dès août 1946 la mise au point d'un nouveau modèle, la TA-8. Sa production démarrait en mars 1947, et l'usine espérait en assembler 200 exemplaires par mois. La mécanique provenait de l'Amilcar Compound, produite chez Hotchkiss en 1938 et 1939. Hotchkiss qui ne souhaitait pas reprendre après guerre la production de l'Amilcar se débarrassait ainsi à bon compte d'un important stock de moteurs. Mais l'aventure TA-8 s'achevait prématurément début 1949. Le manque de fiabilité des mécaniques et des transmissions Hotchkiss incita Imperia à mettre un terme à l'expérience. Selon les sources, entre 300 et 1000 TA-8 furent assemblées.
Imperia TA8, extrait d'un catalogue En 1946, Volkswagen proposait à Imperia d'assurer le montage de sa nouvelle Coccinelle. La marque belge était réputée pour son savoir-faire. Les contacts noués n'aboutirent pas, la direction d'Imperia se refusant par patriotisme de construire cette automobile née sous le régime Nazi. Le mariage de raison avec Standard Triumph Le réalisme de la situation imposait de s'unir avec un autre constructeur. C'est ainsi qu'Imperia, après avoir importé des Standard et des Triumph dès 1945 (Standard avait racheté Triumph cette année-là), devenait une usine d'assemblage pour ces deux marques à la fin des années 40. Des automobiles arrivaient d'Angleterre en pièces détachées par voie maritime puis par chemin de fer jusqu'à la gare de Nessonvaux. De nouveau, l'activité de l'usine était fébrile. Elle compta durant cette période jusqu'à 700 salariés.
Les Standard britanniques sont diffusées en Belgique par Imperia Après l'arrêt de la TA-8, on inaugura en mai 1949 une nouvelle chaîne de montage destinée à assembler le dernier modèle de Standard, la Vanguard. La capacité de production était d'environ 300 voitures par mois. Pour la petite histoire, citons le cabriolet Vanguard conçu chez Imperia en 1950. Sa production fut on ne peut plus limitée, environ une voiture par jour, du moins à ses débuts. Cette carrosserie parvint à séduire la direction britannique de Standard, qui accepta d'en écouler quelques exemplaires en dehors de la Belgique par l'intermédiaire de son réseau, là où pouvaient se manifester les rares demandes.
Standard Vanguard par Imperia
Imperia Cabriolet Nessonvaux Imperia entretenait à cette époque d'excellentes relations avec Alfa Romeo. Les voitures italiennes furent un temps montées et diffusées en Belgique à travers le réseau Imperia. Imperia se diversifia aussi vers le montage de motos Adler et de camions Büssing. Depuis 1934, la fabrication de machines-outils constituait une autre source de revenus. Imperia assemblait en Belgique la TR2 à partir de 1953, pour la TR3 à partir de 1955. La Francorchamps, une version spéciale de la TR2 habillée en coupé, fut produite en 22 exemplaires par Imperia entre 1953 et 1955. Il ne s'agissait pas d'un hard-top, mais d'un véritable coupé disposant d'une partie ouvrable en plexi teinté.
Cette version coupé de la TR2 fut imaginée et assemblée en Belgique chez Imperia Triumph se désengageait en 1958. Les derniers salariés prirent leurs congés d'été en juillet et août, pour ne jamais revenir. L'usine fermait définitivement ses portes. La Belgique avait laissé mourir son dernier grand constructeur, un fleuron de son industrie, dans la plus grande indifférence après cinquante années d'activité. Imperia renaît de ses cendres Yves Toussait, un passionné d'automobile belge, entreprenait en 2008 de faire revivre la marque Imperia.
Imperia GP Après ses études à l'Université de Liège, Yves Toussaint s'intéressa à l'électromécanique. Il passa plusieurs années au Brésil et en Ethiopie en coopération au développement, où il réalisa ses premières ébauches de voitures hybrides. A son retour, il devenait assistant à l'Université de Liège en motorisation thermique automobile. C'est au début des années 2000 qu'il décidait de concrétiser son projet, la création d'une société spécialisée dans la propulsion hybride. Il la baptisait Green Propulsion. Initialement, l'activité de cette structure était la construction de prototypes. Renault fut l'un de ses clients. Une quinzaine d'engins de toutes sortes (voitures, camionnettes ...) furent conçus. Mais Yves Toussaint avait une autre ambition, celle de créer de toutes pièces sa propre automobile " propre ", en visant le créneau du haut de gamme. Pour se faire connaître, il fallait à son auto un nom connu, qui fasse écho. Son choix se portait sur la marque Imperia, libre de droits. Il obtenait de " l'Office Bénélux de la Propriété Intellectuelle " l'autorisation d'en exploiter le nom et la représentation visuelle. Le jeune entrepreneur faisait connaître son projet sur le net dès février 2008. " Imperia Automobiles " voyait le jour en septembre 2009 par scission partielle de Green Propulsion. Sa vocation était de concevoir, industrialiser et commercialiser une Imperia résolument sportive aux formes néo-rétro, inspirée des réalisations passées de la marque. Après quelques hésitations - on évoqua un V4 2 litres de 170 ch -, le moteur retenu provenait d'une étude menée conjointement par BMW et PSA, pour équiper notamment les Mini John Cooper Works et la Peugeot RCZ. Ce quatre cylindres 1.6 litre de 200 ch était associé à un moteur électrique de 150 ch. La puissance totale était donc de 350 ch, pour un poids inférieur à 1200 kg. Cette motorisation permettait à l'Imperia GT d'effectuer le 0 à 100 km/h en 4 secondes, soit les mêmes performances qu'une Porsche 911 Carrera S. Le design extérieur de l'Imperia GP était signé Denis Stevens. Né en 1981, il a fait ses études d'ingénieur à Liège de 1999 à 2003. Il a poursuivi sa formation en entreprenant une licence en design de 2003 à 2006. C'est durant cette période qu'il a travaillé sur le style extérieur de l'Imperia GP. Certains jugent son dessin assez maladroit dans l'harmonie des formes, en évoquant le fruit de l'accouplement malheureux d'une Wiesmann et d'une Plymouth Prowler. Imperia annonçait en février 2010 plus de 300 intentions de commande. La première pierre de l'usine était posée en juillet 2010. Un directeur de production était recruté, pour piloter l'implantation d'une chaîne de montage et le recrutement du personnel. Un châssis carrossé était présenté au Salon de Bruxelles en 2011. Un premier prototype fonctionnel roulait sur le circuit de Spa Francorchamps lors du " Spa Classic " en mai 2012. Le projet prenait forme, les clients potentiels pouvaient enfin y croire ! Des essais presse furent même organisés, ce qui tendait à confirmer la crédibilité à l'aventure. Au fil du temps, le prix initial de 85 000 euros ne cessait d'augmenter. Les dernières annonces faisaient état d'un tarif de 134 000 euros. Mais le démarrage effectif de la production prenait encore et toujours du retard. L'échéance était désormais fixée à fin 2015. De nouveau, les candidats à l'achat pouvaient légitimement commencer à douter du sérieux du projet. Green Propulsion et Imperia étaient finalement placés en redressement judiciaire en décembre 2015. Un repreneur se fit connaître pour Imperia, Jean Paul Rosette, un homme d'affaires qui avait relancé depuis peu la société Carat Duchatelet, bien connue pour ses aménagements luxueux et ses blindages sur base Mercedes, Range Rover ou Toyota. Mais l'offre fut jugée insuffisante par les tribunaux. La belle aventure de ce revival d'Imperia reste en suspens ...
Imperia GP, 2013, photographie de Kevin Wellens |