Spectre, 007 ?
Fondée en 1993 par Ray Christopher, qui était auparavant constructeur de répliques de Ford GT40, la firme Spectre présente un coupé de Grand Tourisme en 1993 (interprétation moderne de la GT 40) qui sera fabriqué en 23 exemplaires jusqu'en 1997. Ray Christopher fonde en 1985 la société GT Developments afin de produire des répliques de Ford GT 40. L'affaire bénéficie d'une réputation enviable, et devient très rentable avec des clients dans plus d'une quinzaine de pays à travers le monde. Mais Ray Christopher a toujours eu envie de dessiner, développer et commercialiser une automobile de sa propre conception. Celle-ci pourrait prendre la forme d'une interprétation moderne de la GT 40.
GTD 40, photo PRG Media Il présente en 1993 au London Motor Show la Spectre R42. R pour Ray, et 42 pour le nombre de pouces correspondant à sa hauteur, soit 107 cm. Une subtile allusion à la GT 40. Il s'agit d'une véritable voiture de course " en tenue de soirée ", même si la face avant est plus séduisante que la partie postérieure, truffée de sorties d'air peu gracieuses.
Spectre R42 La brochure publicitaire précise que la Sceptre doit " to be the ultimate driving machine between two points ". La mécanique est connue. Il s'agit d'un V8 Ford 4601 cm3, 4 soupapes par cylindre, poussé à 350 ch et installé en position centrale arrière. La sonorité du moteur, rauque à bas régime, devient vite méphistophélique. Le couple offert est impressionnant, à l'américaine. La finition de l'habitacle est perfectible, même si des boiseries en noyer et des tapis Wilton sont de la partie. Les poignées de porte, les feux arrière et certains éléments du cockpit sont empruntés à la grande série (Toyota MR2, Honda, Ford Fiesta...). La Spectre ne pèse que 1250 kg en ordre de marche, grâce à l'utilisation de métaux légers comme l'aluminium ou le kevlar, et affiche un cx de 0,28. Sa vitesse est d'environ 280 km/h. Son empattement est identique à celui de la mythique Ford GT 40. Ses suspensions inspirées de la compétition offrent un très bon comportement. Preuve du sérieux du projet, Ford a apporté son assistance pour la bonne intégration et le bon réglage de ses moteurs. La Spectre se veut plus abordable que la moins chère des Ferrari, en l'occurrence la F 355. Et contrairement à ce qui peut se pratiquer chez d'autres, le coût de la maintenance et des réparations est contenu.
Ray Christopher Le début des années 90 est morose sur le marché des GT d'exception. La bulle spéculative née durant les années 80 vient d'éclater. De nombreux propriétaires se retrouvent avec des GT de marque qui ont perdu plus de la moitié de leur valeur en quelques semaines. Pourtant, une étude commandée à un cabinet extérieur identifie le potentiel de la Spectre à 300 unités par an, même pour une voiture sans réelle image. Chez GT Developments, on préfère rester modeste, commencer petite, et tabler sur un volume d'environ 70 exemplaires.
Spectre R42, des ateliers impeccables ! Ray Christophe garde à l'esprit sa motivation initiale, celle de faire courir une Spectre dans la plus célèbre course d'endurance au monde, les 24 Heures du Mans. Il veut faire revivre l'épopée des GT 40. Il est donc nécessaire de produire un certain nombre d'exemplaires civils pour pouvoir prétendre ensuite à une homologation en course. Hélas, faute de moyens financiers suffisants, le projet de s'inscrire au Mans est abandonné. Le développement d'une GT comme la Spectre R42 exige d'avoir les reins solides financièrement avant même d'envisager la vente de la première voiture. La conception du châssis en aluminium et kevlar est complexe à mettre en oeuvre, et nécessite d'importants capitaux. Il n'est pas non plus très simple de recruter des compétences techniques, avec des moyens limités. Ray Christopher se trouve hélas très vite à court de liquidités, et il est contraint de déposer le bilan de son affaire. Il fonde aussitôt une nouvelle entité, sous le nom de Spectre Supersport Ltd. Mais des difficultés de tous ordres restent à résoudre. Un agent commercial de GT Development, Anders Hildebrand, vient à son secours. Il parvient à rassembler quelques investisseurs pour relancer la machine.
Spectre R42 Ray Christopher n'est plus maître chez lui. Il est même cordialement invité à abandonner ses responsabilités. Anders Hildebrand reprend les commandes de l'affaire. Il réussit à attirer un pilote de talent, Derek Bell, cinq fois victorieux au Mans entre 1975 et 1987. Ce consultant de luxe lui fait bénéficier de ses compétences de metteur au point. C'est aussi un excellent " faire-valoir " auprès de la presse et du public. Le pilote est nommé président de la compagnie en 1996.
Derek Bell - source : http://lemans.eklablog.com L'optimisme est de rigueur, et Spectre propose une version améliorée, la R45. On remarque l'adoption de phares classiques en remplacement des éléments escamotables. La R45 est présentée au Salon de Londres en 1997 par l'acteur Desmond Llewellyn, le fameux Q dans les films de James Bond, pourvoyeur de gadgets en tous genres.
Desmond Llewellyn Mais son prix élevé et son absence d'image refroidissent les plus téméraires. Un seul exemplaire est assemblé. La suite de l'aventure sera plus laborieuse. La Sceptre se fait de plus en plus discrète sur les salons, avant de ressurgir ici et là, puis de disparaître définitivement. Au total, ce sont 23 voitures qui ont été produites jusqu'en 1997.
Spectre R45
Texte : André Le Roux / Jean-Michel Prillieux |
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