Lamborghini Flying Star II

A la fin des années 50, la carrosserie Touring, fondée en 1926, doit pour faire face aux nombreuses commandes qui s'accumulent se remettre en question. Désormais, ses clients demandent un nombre important des carrosseries pour un même modèle. L'époque des années 30 et de la production à l'unité ou en toute petite série est bien révolue. Il est nécessaire de  passer à un stade plus industriel comme l'ont fait il y a peu Pininfarina ou Bertone. Cela suppose de mettre en oeuvre un véritable plan d'investissement pour réponde à la charge de travail imposée par les industriels que sont Sunbeam, Alfa Romeo, Lancia et Maserati.

Une nouvelle usine est mise en chantier dans la banlieue de Milan. Dans ces locaux neufs, l'organisation du travail s'inspire des constructeurs automobiles : chaînes de peinture, d'assemblage, de finition ... Les dépenses vont déjà bon train, avant même que ne soit produit le premier véhicule. Le transfert des équipements et de l'organisation des  anciens ateliers vers la nouvelle unité est complexe à mettre en oeuvre. Le site est enfin opérationnel en 1962.

Mais le main-d'oeuvre habituée au travail artisanal ne retrouve pas ses bases. Paradoxalement, il est devenu plus simple de recruter des salariés inexpérimentés que de former les anciens à de nouvelles méthodes de fabrication. Cette année 1962 est aussi celle d'importants mouvements de grève en Italie dans le milieu de la métallurgie. Touring n'y échappe pas, et ce au moment où son carnet de  commandes ne cesse de gonfler. A la fin du conflit, une partie du retard est comblée,  mais quelques commandes sont annulées.

Paradoxalement, alors que Touring est enfin prêt, une période de récession s'annonce. Les voitures que produit le carrossier arrivent pour la plupart en fin de carrière chez leurs constructeurs respectifs. Le groupe Rootes, propriétaire de la marque Sunbeam, est en passe d'être racheté par l'américain Chrysler. Certains projets en cours sont alors suspendus. Le marché des grosses cylindrées en Italie - terrain de prédilection pour les clients de Touring - est frappé de plein fouet par une nouvelle fiscalité qui leur est désormais fortement défavorable.

Pourtant chez Touring on persévère, et le carrossier soumet régulièrement de nouveaux prototypes aux constructeurs, hélas bien souvent en pure perte. Le bureau d'études parvient, avec peu de moyens, à faire des miracles. Les nouvelles machines de l'usine Milanaise sont loin de tourner au maximum de leur capacité. Touring, au bord du gouffre, se met sous la protection de l'Etat italien en mars 1963. La production des Lancia Flaminia GT, Alfa Romeo Giulia GTC et 2600 Spider, Autobianchi Primula Coupé et Lamborghini 400 GT est maintenue.

Lancia Flaminia GT Coupé

Malgré une année 1964 qui voit une réelle reprise de la production, la dette demeure très importante. La recherche d'un acquéreur potentiel qui pourrait poursuivre l'activité s'avère infructueuse. La production cesse définitivement le 31 janvier 1967, une fois les commandes en cours honorées. Après sa fermeture, l'usine sera reconvertie à d'autres activités industrielles qui n'auront rien à voir avec l'automobile. La présentation de la Flying Star II au Salon de Turin en novembre 1966 dans un contexte difficile pour Touring montre bien à quel point ce prototype n'est pas un prototype comme les autres.

Lamborghini Flying Star II

Touring collabore depuis 1964 avec Lamborghini, et habille les 350 GT puis 400 GT. Parallèlement, il  est mis en concurrence avec Bertone sur le projet de celle qui va devenir la Miura, mais c'est son adversaire qui remporte l'appel d'offre, tant en ce qui concerne l'étude de la voiture que son industrialisation. Véritable chant du cygne pour Touring, la Flying Star II est assemblée sur un châssis de Lamborghini 400 GT. Son nom de baptême est un clin d'oeil à une autre création de Touring datant de 1931, qui habillait soit un spider Alfa Romeo 1750 GS soit une Isotta Fraschini 8A.

Lamborghini 400 GT de série

La Flying Star II ne peut à elle seule sauver Touring de la faillite. Quoi qu'il en soit, elle ne retient pas l'attention des dirigeants de Lamborghini. Le prototype est vendu à Jacques Quoirez, le frère de Françoise Sagan, qui après l'avoir repeinte en orange Miura, s'en sert pour son usage quotidien. Cet exemplaire unique a depuis lors connu de nombreux propriétaires. L'usine en a assuré une première restauration complète en 1979. Il est ensuite réapparu publiquement au salon Rétromobile en 1987. Il arbore de nos jours une teinte gris métallisé.

Source : http://www.sellerie-cimes.fr

Lamborghini Flying Star II, reine des concours d'élégance

Point de vue de l'Auto Journal en 1967 :

" Avant la guerre, les carrosseries spéciales étaient l'apanage de quelques voitures de haut luxe, mais celle-ci ne purent survivre en grand nombre avec la vulgarisation de l'automobile. Des firmes telles que Duesenberg, Hispano, Delage, Delahaye s'éteignirent tour à tour, entraînant dans leur naufrage les maîtres artisans qui habillaient leurs prestigieuses mécaniques. Pour échapper à ce sort, les carrossiers furent donc contraints à l'industrialisation. Touring fut l'un des derniers, en Italie, à se soumettre à cette loi, et ce refus l'a tout naturellement conduit à sa perte. Bien qu'il soit récemment passé sous le contrôle de l'état, Touring a dû déposer son bilan en mai dernier. Ses dernières réalisations furent l'Aston Martin DBS, qui aurait dû être fabriquée en série régulière, et la Lamborghini 400 GT Flying Star, prototype doté d'un arrière original, mi-coupé, mi-break ".

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