Stutz


Jusqu'en 1919, Harry Stutz


Harry Stutz naquit en 1876 dans l'Ohio, d'une famille d'agriculteurs d'origine hollandaise. Passionné de mécanique, il travailla pendant de nombreuses années dans diverses entreprises mécaniques et de construction automobiles. Parmi ses premiers projets figure un moteur à combustion interne et un châssis surbaissé créés en 1905. Par la suite, Harry Stutz passait chez Marmon, où il restait jusqu'en 1910, année durant laquelle il fondait avec Henry Campell la Stutz Auto Parts Co. pour assurer la fabrication de ponts arrière et de transmission. Cette société fusionnait en 1913 avec Ideal Motor Car Co. pour donner naissance à la Stutz Motor Car.

Harry Stutz (1876/1930)

Harry Stutz appartenait à cette lignée de créateurs et de constructeurs qui estimaient que les courses constituaient le meilleur banc d'essai pour ses réalisations. C'est pour cette raison que sa première voiture fut un modèle de course préparé pour le plus important évènement sportif de l'époque, la première édition des 500 Miles d'Indianapolis en 1911. La voiture de Stutz se classa onzième après avoir fait une course très régulière. Cette démonstration suffit à faire connaître le nom de Stutz. En 1913, Stutz proposait son modèle le plus connu, la Bearcat, une voiture légère, réduite à sa plus simple expression, sans porte. Elle était disponible dans une version compétition,  qui fit beaucoup pour la renommée de la marque sur circuit, de nouveau à Indianapolis, où elle remporta la troisième place en 1913 et 1915.

Stutz Bearcat, 1915

L'aspect de cette deux places de sport rappelait tellement celui de la Mercer Raceabout qu'une rivalité s'installa entre les amateurs des deux marques. En quelques années, Stutz renforçait sa notoriété en remportant de nombreuses victoires face aux Mercer et Marmon, puis plus tard face aux Duesenberg et Hispano Suiza.

Le pilote Earl Cooper à bord de sa Stutz Bearcat à Indianapolis en 1914

En peu de temps, la Stutz Bearcat dans sa version civile devint la coqueluche des grandes fortunes de Hollywood ou de New York. Elle atteignit rapidement des chiffres de ventes supérieurs à ceux de sa concurrente Mercer, et domina le marché jusqu'au début des années 20.

Stutz, 1914


1919, Stutz sans Harry Stutz


Harry Stutz se retirait en 1919. La conjonction de mauvaises décisions, d'une expansion incontrôlée et de l'intervention d'un spéculateur peu scrupuleux avaient précipité la chute de son entreprise. La firme était reprise en main financièrement par de nouveaux actionnaires, sous la houlette du magnat de l'acier Charles Schwab. Celui-ci orientait la politique produit vers des voitures combinant sportivité, sécurité et luxe, à l'image de Bentley en Grande Bretagne. Schwab avait bien conscience que l'atout principal de la marque était sa réputation de qualité et de durabilité. La compétition demeurait aux yeux des dirigeants de Stutz un outil indispensable et utile au développement de leurs voitures de série.

Au coeur des années 20, les Stutz représentaient la plus haute expression de l'automobile outre-Atlantique, en concurrence avec les fabrications les plus réputées de l'industrie européenne. Mais une partie des acheteurs qui en avaient les moyens se montraient toujours réfractaires à ces modèles. Cette attitude du public s'expliquait par le fait que les Stutz étaient connues comme étant des voitures essentiellement sportives, et qu'elles séduisaient donc plutôt une petite frange de la clientèle à la recherche d'une voiture de caractère, et non pas les amateurs de confort, de souplesse ou d'économie.


1926, Frederick Ewan Moskovics


En 1926 se produisait un changement radical au sein de l'entreprise. La direction était confiée à Frederick Ewan Moskovics, un ancien de chez Daimler, Marmon et Franklin, avec la collaboration de Paul Bastien comme responsable du bureau d'études. Ce dernier avait occupé le même poste auprès de la firme belge Métallurgique.

Le premier acte de la nouvelle équipe fut le lancement de la Stutz AA, appelée également Verticale Eight, dotée d'un moteur moderne à huit cylindres en ligne de plus de 90 ch, puissance portée par la suite à 113 ch, qui lui permettait de réaliser des performances exceptionnelles. Toutefois, la publicité pour la AA était surtout basée sur la sécurité, plus que sur la puissance et la vitesse. Cette voiture fut également appelée Safety Stutz (Stuz sûre), car elle était notamment équipée de freins hydrauliques puissants sur les quatre roues.

Stutz 1926

En 1928, la Black Hawk, aussi désignée BB, venait s'ajouter à la AA. Le constructeur proposait une pléthore de carrosseries. L'une des plus chères était le  magnifique Speedster dont la conception et la ligne s'inspiraient de la vieille Bearcat. C'est justement une BB qui fut la protagoniste malheureuse du défi lancé à Hispano Suiza, qui vous est raconté dans le dossier consacré à cette marque. 

Toujours en 1928, une Stutz prenait la 2ème place au Mans derrière une Bentley, la meilleure position pour une voiture américaine jusqu'en 1966 (Ford GT 40). En début de course, chacune des marques battait le record du tour. Au final, Bentley s'imposait avec une avance de 13 km après que furent parcourus 2669 km. Stutz fut de nouveau présent au Mans de 1929 à 1931, mais sans renouveler la performance de 1928.

Stutz 1927

Un dernier modèle Stutz fit parler de lui. C'est en 1931 qu'était présentée la DV 32. Son nouveau moteur 8 cylindres en ligne de 5,3 litres, avec distribution à double arbre à cames en tête et à quatre soupapes par cylindre, faisait de cette voiture un modèle d'avant-garde au point de vue technique. Cet aspect imposant allait de pair avec une élégance raffinée. Dans sa version Speedster à deux places, pouvant atteindre 160 km/h, cette voiture avait été baptisée une nouvelle fois du nom de Bearcat.


Un déclin inéducable


A côté de la DV 32, Stutz avait également au catalogue un certain nombre de voitures économiques, grâce auxquelles le constructeur avait en vain espéré maintenir ses positions. Ainsi, en 1931, le modèle le plus économique était proposé à 1995 dollars, tandis que le plus coûteux exigeait un règlement de 7 495 dollars.

Malheureusement, la crise économique mondiale des années 30 marqua également pour Stutz un déclin qui devait en l'espace de cinq ans l'obliger à cesser toute activité. La firme Stutz aux produits spécialisés, chers et de haute qualité, suivit le même chemin que beaucoup d'autres. Après de très belles années, jusqu'à 3692 voitures produites en 1926, les ventes chutaient à 1038 voitures en 1930, 310 en 1931, 206 en 1932, 80 en 1933, puis 6 en 1934, pour sombrer à 2 voitures en 1935, dernière année pour la marque. Depuis ses débuts, environ 35 000 voitures avaient été fabriquées.


Virgil Exner


Des répliques de Cord et d'Auburn virent le jour dès les années 60. Mais la nouvelle Stutz de 1970 dessinée par Virgil Exner était une voiture moderne, même si elle adoptait un style baroque. Exner fait partie de ces personnages exubérants qui animèrent les plus belles années du design automobile aux Etats-Unis.

Virgil Exner

Virgil Exner a débuté sa carrière en tant que responsable du style chez Pontiac, et ce jusqu'en 1938. Cette année-là, il rejoignait la compagnie Loewy Associates. La cohabitation avec Raymond Loewy s'avéra très vite orageuse. Ces deux fortes personnalités, aussi mondaines et créatives l'une que l'autre, n'accordèrent jamais leurs points de vue. En partant chez Studebaker en 1944, Exner faisait un pied-de-nez à son employeur, en rejoignant l'un des principaux clients de Loewy.

Recruté chez Chrysler en 1949, il allait donner au style de ce grand constructeur une vraie personnalité,  après des années d'égarement et le traumatisme subit par l'échec de l'Airflow. De 1951 à 1961, il assura la fonction de directeur du style du groupe. La démesure du style Exner, avec ses déferlements de chrome et d'acier, était à la hauteur de cette époque opulente aux Etats Unis. Mais au-delà de ces extravagances, notre homme avait un goût affirmé pour les belles carrosseries. Il fut à l'origine d'une collaboration durable avec Ghia, et de la création de plusieurs concept cars italo-américains.

La Imperial 1955 du groupe Chrysler, dessinée sous l'autorité de Exner

L'une de ses marottes consistait à réintégrer sur des voitures modernes de grande série des éléments empruntés au passé. Le designer ne parvenait pas à s’adapter au modernisme affiché par les états-majors consuméristes d’une industrie automobile américaine en pleine expansion.  Sa conception " art-Déco " et sa recherche d’une élégance d’avant- guerre remise à la mode des sixties et seventies l’éloignèrent petit à petit du pragmatisme ambiant.

En 1961, Exner quittait le  poste important de décideur qu’il occupait au sein du groupe Chrysler. Le constructeur perdait du terrain par rapport à ses concurrents. Exner n'était plus en phase avec la direction de l’époque. Son pouvoir et ses prérogatives se réduisaient de plus en plus. Il fut invité à s'éclipser. C’est donc un homme plutôt isolé qui fondait  cette même année son studio de style à Birmingham dans le Michigan.

Exner abordait le thème " rétro " en imaginant pour le magazine Esquire des projets de résurrection de marques disparues : Packard, Duesenberg, Stutz et Mercer, puis plus tard Pierce Arrow et Jordan Playboy. On retrouva ces projets sous forme de maquettes au 1/25 chez Renwall. Le projet Mercer aboutissait pour sa part à un vrai concept car exposé en 1964 dans différents salons automobiles.






Packard, Duesenberg, Stutz, Mercer, Pierce Arrow, Jordan Playboy, vues par Exner

A la même époque, une Bugatti 101 habillée selon les idées d'Exner fit beaucoup parler d'elle. Il s'agissait de l'un des tout derniers châssis produits à Molsheim en 1951, acheté par Exner lui-même. Ce châssis, notre homme essaya en vain de le surbaisser, finit par le raccourcir de presque 50 centimètres, et fit au final carrosser le tout par Ghia selon son dessin sous la forme d'un cabriolet nanti d'une calandre placée " en avant ", une constante du style Exner.

La belle ressuscitée était présentée au Salon de Turin en novembre 1965, dans une livrée bleue, comme il se doit pour une Bugatti. Les puristes firent la fine bouche, mais tous les autres, les Américains surtout, l'encouragèrent à poursuivre son travail. Mais poursuivre quoi ? La Bugatti 101 qu'il venait de dévoiler n'était rien d'autre qu'une véritable Bugatti habillée de façon néoclassique, il ne restait plus de châssis à " revisiter ", l'aventure était belle et bien terminée.

Bugatti 101 par Virgil Exner

La nouvelle indépendance d'Exner lui permettait de développer ses projets avec une liberté et des moyens que Chrysler n’avait pas jugé opportun de lui accorder. C’est dans cette ambiance d’outsider qu’il allait entreprendre ses différents projets de résurrection et c’est à la porte de Chrysler qu’il revenait frapper cinq ans plus tard, persuadé cette fois que son projet Duesenberg remporterait tous les suffrages ... Mais la production de démarra jamais.

Duesenberg, par Virgil Exner

L’aventure Stutz des années 70 ne fut rien d’autre qu’une radicalisation d’une vision que notre homme défendait depuis le début des années soixante. Ce fut aussi, en quelque sorte, un constat d’échec sur le plan professionnel pour le capitaine d’industrie qu’était Exner. Les Stutz ne furent produites qu’au compte-goutte et demeurèrent des voitures marginales.

C'est une ironie du sort. Au cours des années 2000, Chrysler proposa des automobiles  néoclassiques de grande série : Chrysler Pt Cruiser, Chrysler 300 ..., mais aussi plusieurs concept cars nostalgiques comme la Phaeton ou l'Atlantic ... De nombreux industriels, qui font l'objet de ce dossier, s’acharnent à faire revivre des marques disparues. Exner était-il passéiste, mégalomane, psycho rigide, ou au contraire un visionnaire qui avait eu tort d'avoir raison trop tôt ? Les événements d’aujourd’hui tendraient à prouver qu’il avait eu, au moins, une intuition aux accents prophétiques. Lui qui déclarait en 1970 : " le style américain est en train de mourir à petit feu " ... Nous connaissons la suite, et il suffit par exemple d’évoquer la longue crise d’identité stylistique traversée par plusieurs constructeurs pour comprendre qu’il n’avait pas tout à fait tort.

Les propositions trop radicales d'Exner et son refus de composer avec son temps furent pour beaucoup responsables de sa marginalisation. Restent les Stutz, voitures de luxe exubérantes, nées du génie de ce créateur qui essaya de faire accepter sa vision à une industrie automobile froide et peu encline à laisser libre cours à quelques délires originaux. Virgil Exner mourrait en 1973 à l'âge de 64 ans, suite à des problèmes cardiaques. L'aventure Stutz continuait sans lui.


La nouvelle Stutz de James O'Donnel


Outre Exner, la nouvelle Stutz devait surtout son existence à l'engagement financier du banquier New Yorkais James O'Donnell, dont la curiosité fut attirée par les projets du designer à la recherche de capitaux pour produire des voitures néoclassiques, qui combineraient la technique américaine et le savoir faire italien pour la carrosserie. C'est en 1968 que Virgil Exner sollicita James O'Donnell. L'idée initiale d'Exner était de produire la nouvelle Duesenberg qui n'avait pas intéressé Chrysler. Il était accompagné dans son projet par Fritz Duesenberg, le neveu du célèbre constructeur des années trente. Mais malgré l'existence d'un prototype, le projet ne semblait pas suffisamment probant pour O. Donnell.

Toutefois, la fascination qu'exerçait sur lui ce type de voiture néoclassique incita O' Donnell à reprendre contact avec Exner quelques mois plus tard. Aux yeux du banquier, le projet devait être abordé avec une voiture différente. Les deux hommes allaient se répartir les tâches, à Exner la conception et à O'Donnell le financement et la gestion.  O'Donnell commanda une étude de marché pour ce type de voiture de grand luxe, dont les résultats ne firent que renforcer ses convictions. Les seules automobiles disponibles aux Etats-Unis dans le segment de prix visé étaient toutes d'origine étrangère, en particulier européenne. La difficulté à assurer un service après-vente de qualité était leur principale faiblesse. Aux Etats Unis, les récentes Cadillac Eldorado et Lincoln Continental Mark III, toutefois plus neutres sur le plan du style, avaient doublé leurs objectifs de vente. Il existait une niche de marché pour des modèles de ce type personnalisés.

Cadillac Eldorado, 1970

Le choix de Virgil Exner se porta sur le châssis et la mécanique de la Pontiac Grand Prix. A cette époque, John Zachary DeLorean (oui, le père de la De Lorean de 1981) dirigeait la division Pontiac de la General Motors. O'Donnell et Exner furent reçus par notre homme. Celui-ci se montra intéressé par le projet qui lui semblait réalisable, et assura les deux compères de sa coopération pour la fourniture des châssis.

O'Donnell, surpris par l'enthousiasme de DeLorean, lui demanda pourquoi la General Moteors ne pouvait-elle pas produire elle-même cette voiture.  DeLorean lui répondit que " pendant que vous faites le prototype, Pontiac fabriquera un million de voitures ". Il précisa aussi qu'une automobile aux lignes si complexes s'accommodait mal avec une production industrielle, et que seul un assemblage artisanal était envisageable.

Il restait désormais plusieurs questions à résoudre : quel était le budget à débloquer ? Où fabriquer le prototype maintenant que les plans étaient arrêtés ? Quel carrossier italien pouvait prendre en charge une production régulière ? Quelles réglementations devaient être prises en compte pour l'homologation ? Quelle gamme de prix devait être visée ? Quel canal de distribution fallait-il adopter ? etc ...

Un point essentiel devait aussi être abordé. Quel nom porterait la nouvelle venue ? O'Donnell avait eu durant son enfance un ami de lycée dont le père possédait une Stutz Bearcat. Il avait gardé un souvenir extraordinaire de cette voiture, en particulier du confort que l'on ressentait à son bord. L'utilisation de la marque Stutz, qui avait disparu depuis plus de trente ans, n'était plus protégée par aucun droit. Elle appartenait au domaine public. Cela n'empêcha pas quelques batailles judiciaires pour repousser les assauts de quelques opportunistes.

O'Donnell se mit à la recherche d'un prestataire en Italie capable de produire la Stutz. La carrosserie Saturn dans la ville de Cavallermaggiore dans le Piémont fut sélectionné dans un premier temps. Le prototype roulant y fut assemblé, et les moyens de production organisés.

La carrosserie Saturn dans la ville de Cavallermaggiore

Avec un nom, une idée, les croquis d'Exner et un apport réduit de capital, O'Donnell parvint à réunir les fonds nécessaires à l'aventure. Dès 1969, le premier prototype en argile était confectionné à partir des côtes de la Pontiac Grand Prix. Chaque composant de la Stutz devait pouvoir s'adapter au châssis d'origine. L'acquéreur d'une Stutz devait pouvoir s'appuyer sur la disponibilité du réseau Pontiac pour la partie mécanique, tandis que tout artisan suffisamment outillé devait être capable d'intervenir sur la carrosserie. 

La première voiture était terminée en décembre 1969, un coupé deux portes avec Hardtop. Ce modèle fut baptisé Blackhawk. Bien que le nom de Bearcat soit plus populaire dans la mémoire collective, le constructeur souhaitait le conserver pour une future version découvrable. Mais suite à la mise en application de nouvelles règles gouvernementales concernant les cabriolets aux Etats Unis, le projet de voiture ouverte fut décalé afin de se mettre en conformité avec la loi. Le luxe était omniprésent sur la Stutz, avec de nombreux éléments plaqués en or : allume cigares, poignées, clef, et même la jauge d'huile .... Aucune Stutz n'était rigoureusement identique à une autre. Il s'agissait vraiment d'une production sur mesure.

Sammy Davis et sa Stutz Blackhawk

La Blackhawk était officiellement présentée à l'Hôtel Waldorf Astoria de New York le 20 janvier 1970. La presse américaine et les autres médias firent un large écho à cet évènement. L'époque était propice au lancement d'une telle voiture aux Etats-Unis. Nous n'étions plus dans les années d'euphorie précédant la crise de 1929, mais la demande était pourtant bien réelle pour un objet de luxe réalisé sur mesure, situé un cran au-dessus des productions des " big three ". 

Rien ne fut négligé pour la promotion de la nouvelle Stutz. O'Donnell donna de sa personne en participant à de nombreuses émissions de télévision. Les relations publiques furent confiées à un prestataire qui s'assura notamment de réserver un emplacement pour les salons automobiles aux Etats Unis, en Europe et au Moyen Orient. 

Le magazine " L'Automobile " présentait ainsi la nouvelle Stutz dans son numéro 286 de mars 1970 :

" Voulant faire renaître le nom de cette firme et de ce modèle américain qui fut célèbre et s'illustra notamment aux 24 Heures du Mans en 1928 et 1929, ainsi qu'à Indianapolis en 1911, le financier O'Donnel a constitué, aux Etats-Unis, un groupe financier, dont la première réalisation est une GT sur base Pontiac Grand Prix, reprenant les canons esthétiques des années 30. Les Américains sont d'ailleurs friands de ce genre de reconstitution, les Excalibur, aux silhouettes de Mercedes et de Bugatti, en témoignent s'il le faut. Présenté à New York ce mois de mars, on ne sait d'ailleurs pas quel sera l'avenir de ce prototype, non plus que celui de sa firme reconstituée. En cas de production, des accords sont passés avec le carrossier modenois, Giorgio Neri, connu pour avoir déjà réalisé de semblables travaux sur les mécaniques de prestige. On peut penser que, compte tenu du degré d'élaboration de la Blackhawk, de sa silhouette très " old timer ", et du prestige que pourra en tirer l'heureux propriétaire, les acheteurs d'Outre-Atlantique se passionneront pour ce nouveau modèle qui tranchera avec bonheur au milieu de leurs modèles stéréotypés "

Ce même magazine mentionne en septembre 1970 la présentation d'une version quatre portes de la Blakhawk :

" O'Donnel destine ce nouveau modèle aux chefs d'Etats, aux corps diplomatiques ou autres personnalités. Il vise là le très grand prestige. Pour ce faire, il a doté sa voiture de tous les raffinements possibles. On remarquera, par exemple, que la portière arrière, en s'ouvrant, dégage une partie du toit, afin d'en facilité d'accès, même coiffé du plus haut des hauts-de-forme. Le compartiment avant est, bien entendu, séparé du compartiment arrière, lequel, climatisé, comprend téléphone, radio, télévision, bar, etc. Toutes les commandes d'ouverture des glaces, y compris celles séparant les passagers du conducteur, sont électriques. L'intérieur est revêtu de velours gris perle et de moquette rouge, le conducteur bénéficiant d'une peausserie de qualité ... Cette limousine est longue de 5,85 m, large de 1,95 m, haute de 1,44 m, et a un empattement de 3,55 m "

Stutz IV porte

La toute première Stutz fut vendue à Elvis Presley. Il fit plus tard l'acquisition de trois autres modèles. Deux sont aujourd'hui dans le musée de Graceland. Frank Sinatra, Dean Martin et Sammy Davis Jr. lui emboîtèrent le pas. Bientôt, la Stutz fut la voiture préférée des vedettes hollywoodiennes. Une Stutz était aussi bien à sa place devant le Plaza Hotel de New York que devant une boutique de luxe.

Elvis Presley et sa Stutz

O'Donnel poursuivait seul l'aventure après la mort d'Exner. Entre 1968 et 1988, celui-ci fit la traversée vers l'Europe une soixantaine de fois, afin de superviser la production et la vente des Stutz. En dehors des Etats Unis, quelques acquéreurs se manifestèrent en Angleterre, France, Allemagne, Monte Carlo ...

Une gamme complète fut déployée, avec des coupés, cabriolets, berlines quatre portes et limousines.

L'ensemble de la production de la marque jusqu'en 1990 s'inscrivait dans une gamme assez complexe à suivre, avec différents types de carrosseries : coupé, cabriolet, berline, limousine. Le constructeur proposa dans le temps différentes évolutions de détail sur les multiples carrosseries. Plusieurs bases mécaniques furent utilisées successivement : Pontiac Grand Prix au début, puis Pontiac Bonneville et Firebird, mais aussi Oldsmobile et Cadillac. En effet, les voitures servant de base de travail aux différents modèles furent remplacées au fil du temps par leurs constructeurs. Les Stutz héritaient des qualités et des défauts de ces voitures.

Durant les années 80, on vit une apparaître une éclosion de productions néoclassiques, que cela soit sous les marques Clénet, Zimmer, Di Napoli ... Force est de reconnaître que Stutz fut le seul avec Excalibur à avoir soutenu durant une longue période une production continue. En 1988,  James O'Donnell quittait la présidence de Stutz. En 1990, il revendait l'entreprise. La production cessait aussitôt. O'Donnel décédait le 12 janvier 1997. La production des Stutz période O'Donnel est évaluée à 617 voitures.

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